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Pêche : un plan novateur à la veille du Brexit


14 février 2019

Mardi 12 février, le Parlement européen a adopté une nouveau plan de pêche pour l’Atlantique et la Manche. Les critiques des partisans du Brexit et des Verts ont rythmé les négociations.

200 000 tonnes de merlu, langoustine, sole, hareng, cabillaud et bar. C’est ce qui a été pêché dans l’Atlantique et la Manche en 2017. Le plan adopté le 12 février par le Parlement européen concerne la pêche professionnelle de ces six poissons. Il introduit de nouvelles méthodes de calculs des quotas, de l’Ecosse de l’Ouest aux Açores. Dans les eaux atlantiques, l’Union veut que l’équilibre de l’écosystème soit atteint d’ici 2020. L’eurodéputé portugais Ricardo Serrão Santos, (S&D, social-démocrate) portugais, se réjouit : « l’objectif est ambitieux, le chemin à parcourir est encore long, mais cette ambition est présente dans ce plan.»

Les principaux pays concernés sont l’Allemagne, la France, la Belgique, le Portugal, l’Espagne, le Royaume-Uni à l’Irlande. Les quotas sont déterminés par deux organes scientifiques indépendants, le conseil international pour l’exploration de la mer (CIEM) et le comité scientifique et technique de la pêche (CSTETP). Ils fixent le rendement maximum durable (RMD), c’est-à-dire le nombre de poissons que l’on peut pêcher sans affecter la reproduction.

« Reprenons nos eaux »

Un nouveau plan négocié dans un contexte d’incertitude du Brexit. Ces quotas influencent directement le Royaume-Uni.  « Take back our waters », « reprenons nos eaux » a été l’un des slogans des partisans du Brexit pendant la campagne de 2016. Selon des estimations pré électorales de l’université Aberdeen, 92% des pêcheurs britanniques étaient en faveur de la sortie de leur pays de l’Union européenne. Principal argument à l’époque : la fin des quotas de pêche. Le plan voté par le Parlement européen a d'ailleurs été vivement dénoncé par  les partisans du Brexit, particulièrement les eurodéputés de UKIP.

Une inquiétude pèse aujourd’hui sur la sortie effective du Royaume-Uni, le 29 mars 2019. Si un accord est trouvé entre les européens et les britanniques, une période de transition de deux ans sera appliquée. Le Royaume-Uni devra alors continuer à respecter les quotas définis par l’Union européenne. Mais dans l’hypothèse d’une sortie sans accord, il ne sera plus contraint, avec le risque que les pêcheurs britanniques épuisent les stocks de poissons. Conscient du risque Karmenu Vella, commissaire européen aux Affaires maritimes et à la Pêche, se félicite d’une « adoption opportune, juste avant le retrait du Royaume-Uni ».

Ce plan régule la pêche du cabillaud, une espèce en danger selon l'ONU © Pauline Boutin

Pour l’eurodéputé du Parti populaire européen (PPE, chrétiens-démocrates) Alain Cadec, rapporteur du plan au Parlement européen : « Celui-ci revêt une importance particulière dans le cadre du Brexit, car les eaux britanniques sont directement concernées. Il pose les bases d’une coopération future dans ce domaine.»

Débat sur les quotas

Au delà du Brexit, l’objectif affiché est de mieux protéger les écosystèmes aquatiques. L’introduction de l’obligation de débarquement limite le temps passé par les navires sans accoster. La mesure vise à réduire le rejet de poissons morts dans les océans. Le plan s’inscrit également dans une logique de régionalisation des quotas :  « Il faut prendre en compte les particularités géographiques. Des mesures qui fonctionnent en mer Baltique n’auront pas les mêmes effets en Méditerranée et inversement » estime Alain Cadec. Pour établir les quotas de poissons, le texte prévoit des quotas en lien avec les spécificités de chaque espèce de poissons, dont le cabillaud qui est menacé. « Nous incluons des améliorations dans la protection des espèces sensibles, des ressources et des habitats importants » précise l’eurodéputé portugais Ricardo Serrao Santos (S&D).

Malgré ces précautions, la détermination des quotas a fait face à des contestations, notamment des eurodéputés écologistes. La suédoise écologiste Linnéa Engström (Les Verts), se désole : « ce plan, c’est toujours la surpêche. » Elle dénonce la méthode de calcul : « Le rendement maximal durable ne prend pas en compte les conditions environnementales spécifiques comme le plastique, le changement climatique, l’acidification des eaux, la multiplicité des espèces ... » et ajoute : « Nous allons arrêter la surpêche quand le désastre aura déjà eu lieu. »

Judith Barbe et Pauline Boutin

Sommaire de la session parlementaire de février 2019

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