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“Il n’y a que l’Europe pour porter une démarche indépendante sur le blanchiment”


14 mars 2019

Le Parlement européen a demandé, jeudi 14 mars, l’ajout de sept pays sur la liste noire du blanchiment d’argent. Entretien avec Eva Joly, eurodéputée des Verts et ancienne magistrate spécialiste de la lutte contre le blanchiment d’argent.

Pourquoi le Parlement s’intéresse-t-il à la lutte contre le blanchiment d’argent ?

La lutte contre le blanchiment concerne aussi la lutte contre le terrorisme, la corruption et la fraude fiscale. Cela englobe la lutte contre criminalité de façon générale. Les États exigent des mesures pour lutter contre le terrorisme mais lorsqu’une liste de pays à risque leur est proposée, ils la rejettent. Pendant longtemps, les libéraux ont pensé qu’il s’agissait d’un élément de compétition mais aujourd’hui les dommages liés au blanchiment sont devenus une évidence.

En quoi cette nouvelle liste noire dérange-t-elle?

Parmi les sept pays que nous voulons ajouter, figurent quatre territoires américains, ainsi que Samoa, le Panama et l’Arabie Saoudite. Cette nouvelle liste a suscité l’ire des pays concernés, qui ont alors entamé un lobbying intensif, en faisant notamment valoir leurs contrats d'armement ou leur proximité géostratégique avec l’Europe. Au yeux des Etats européens, le blanchiment passe au second plan par rapport aux impératifs économiques. Nous dénonçons cette l’hypocrisie.

L’eurodéputée Eva Joly (Les Verts) exprime son “indignation” face au blanchiment d’argent © Jérôme Flury

La résolution a été adopté avec une large majorité par le Parlement. Êtes vous surprise par un tel consensus?

Ce consensus est en effet une nouveauté. Cela fait 10 ans que je travaille au Parlement sur le blanchiment. Au début, le combat était uniquement porté par les Verts. Aujourd’hui, il y a une forte pression de l’opinion publique. Les citoyens européens n’acceptent plus que certains Etats comme Malte, Chypre ou le Luxembourg augmentent leur PIB avec des produits fiscaux volés aux autres.

Propos recueillis par Emma Conquet

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