Vous êtes ici

L'usage de la voiture recule à Strasbourg, mais elle pourrait aussi faire son grand retour. Les uns veulent un centre-ville dépollué, les autres des commerçants heureux.

37%. C’est la part de la voiture dans les déplacements des Strasbourgeois, selon une étude de l’Adeus (Agence de Développement et d'Urbanisme de l'Agglomération Strasbourgeoise) réalisée au premier trimestre 2019. Un chiffre qui a baissé de neuf points en dix ans. Preuve de la volonté de l’Eurométropole de réduire drastiquement l’usage de la voiture en ville.

Au delà de l’intention de diminuer les émissions de gaz à effet de serre, certains élus ont pris conscience du désir des habitants de profiter d’un espace urbain apaisé, moins bruyant.

« La question de la qualité de l’air est un enjeu de santé publique mais on a aussi cette préoccupation de libérer de l’espace public », déclare Jeanne Barseghian. La candidate EELV préconise l’optimisation des parkings existants tout en développant des parkings relais à l’entrée de la ville. Des parkings « nouvelle génération » qui permettent de stationner sa voiture et de rejoindre le centre-ville via d’autres moyens de transports plus doux, tels que le vélo ou le tramway comme c’est le cas du côté de Rotonde. « Mon but n’est pas d’interdire les voitures, comme je l’entends parfois dans des discours un peu caricaturaux, mais plutôt d’accompagner le report vers d’autres modes de déplacement quand c’est possible », poursuit-elle. 

Une idée partagée par Catherine Trautmann et Alain Fontanel, lesquels se montrent néanmoins plus nuancés sur ce sujet. Les deux candidats plaident en faveur d’un retour à la gratuité du stationnement. Quotidiennement entre midi et 14 heures afin de « soutenir l’activité commerciale du centre-ville », pour l’actuel premier adjoint. Tous les premiers samedis de chaque mois, de 9 heures à 14 heures, auxquels Catherine Trautmann ajoute dix jours annuels de stationnement gratuit, fixés en concertation avec les commerçants. Ces derniers ont souffert de ce que Jean-Philippe Vetter qualifie de « politique anti-voiture », assure t-il. Lui porte le projet de création d’un nouveau parking souterrain rue du Vieux-Marché-aux-Poissons. Autant de propositions qui plaident pour des voitures dans le centre.

Et si Strasbourg s’inspirait du modèle d’Oslo ? Depuis le début d’année, le centre-ville de la capitale norvégienne, où la voiture a été totalement chassée, est réservé aux bus et aux vélos. Un concept qui a inspiré Chantal Cutajar. La tête de liste Citoyens engagés va plus loin que ses adversaires et entend créer des zones réservées aux piétons et aux cyclistes un peu partout dans la ville.

La candidate Chantal Cutajar imagine une zone réservée aux piétons, qui s'étendrait de la gare jusqu'au parc de la Citadelle. Capture d'écran d'agissonsensemble2020.com

La zone à faibles émissions divise

Réuni le 23 septembre dernier, le conseil municipal avait entériné le projet d’une ZFE, zone à faibles émissions, sur tout le périmètre de la ville de Strasbourg. Le calendrier prévoit l’interdiction progressive des véhicules les plus polluants sur la base des vignettes Crit’Air avec, en ligne de mire, le bannissement des moteurs diesel en 2025.

En clair, dès le 1er janvier 2021 les véhicules sans vignette Crit’Air ne pourront plus circuler dans Strasbourg, puis ceux répertoriés Crit’Air 5 en 2022, les Crit’Air 4 en 2023, les Crit’Air 3 en 2024 et enfin les Crit’Air 2 en 2025. Si le projet de ZFE sert de cadre légal, c’est au maire que reviendra le pouvoir de prendre des arrêtés municipaux pour imposer ces interdictions de circuler. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que la mesure ne fait pas l’unanimité chez les candidats.

Seule Jeanne Barseghian s’engage à tenir cet échéancier. Alain Fontanel et Catherine Trautmann, d’accord sur le principe, émettent cependant quelques conditions. La socialiste juge nécessaire la mise en place de mesures d’accompagnement, notamment financières. Un point sur lequel le marcheur la rejoint. Ce dernier espère former une convention citoyenne pour apporter des solutions.

Jean-Philippe Vetter et Hombeline du Parc veulent, quant à eux, repousser de cinq ans le calendrier de la ZFE. Pour la candidate du Rassemblement national, pas de doute, c’est « encore les classes populaires qui en feraient les frais », martèle-t-elle. Dans un article des Dernières nouvelles d'Alsace paru le 18 septembre 2019, Christel Kohler, actuelle adjointe chargée des questions environnementales, explique que les véhicules Crit'Air 5 ou sans vignette concerneraient 7 900 véhicules (mis en service avant 1997), mais dont l’immense majorité sont possédés par des foyers à faibles revenus.

Si tous les candidats ne sont pas sur la même longueur d’ondes, il va leur falloir arbitrer entre urgence climatique et fin de mois.

Robin Magnier

Imprimer la page