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Réponse à l’inflation : la BCE scrutée par les députés européens


17 février 2023

Sur fond d’inflation galopante dans toute la zone euro, Christine Lagarde, présidente de la Banque centrale européenne (BCE), a répondu aux députés mercredi 15 février. En débat, la politique de redressement des taux directeurs de la BCE pour tenter de freiner la hausse des prix.

L’inflation était sur toutes les lèvres mercredi en fin de journée dans l’hémicycle. La présidente de la Banque centrale européenne (BCE), Christine Lagarde, défendait les décisions de son institution face à la hausse des prix lors de son audition annuelle devant le Parlement européen. L’institution, qui régule la zone euro, tente de réduire l’inflation qui a atteint des niveaux record fin 2022. Le mois dernier, elle était de 8,5 % contre 10,1 % en novembre.

Freiner la hausse des prix

En juillet 2022, la BCE a décidé de relever les taux directeurs, ceux auxquels les banques de dépôts empruntent. Cette politique fait augmenter les taux d’intérêt des prêts pour les ménages et les entreprises. L’objectif est de ralentir la consommation, et donc de freiner la hausse des prix. Ce qui peut aussi avoir un impact négatif sur la croissance.

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Christine Lagarde est auditionnée par les eurodéputés chaque année à Strasbourg. © Mathieu Cugnot, European Union 2023 - Source : EP

L’institution bancaire européenne a ainsi suivi ses homologues américaine et anglaise et augmenté ses taux cinq fois en moins d’un an, passant de 0 % à 3 % en moyenne. Une première depuis 2008. Elle prévoit de continuer en mars, comme l’a rappelé Christine Lagarde, afin de maintenir la stabilité des prix en ramenant l’inflation à 2 %. Les résultats de cette politique seront difficilement visibles avant 2025, a renchéri la dirigeante. La diminution de l’inflation notée ces derniers mois serait, selon elle, davantage due à la baisse des prix de l’énergie qu’aux décisions de la BCE. 

Les risques de cette politique

Dans l’hémicycle, les discours n’étaient pas alarmistes. Plusieurs groupes politiques, de droite et du centre (PPE et Renaissance), ont soutenu la Banque centrale, assurant que redresser les taux était la seule solution possible et viable pour lutter contre la hausse des prix. “Nos économies sont plus résilientes qu’attendu”, a affirmé la commissaire irlandaise Mairead McGuinness.

Cependant, les écologistes et l’extrême-gauche (les Verts et La Gauche) ont souligné le caractère “agressif” de cette décision pour les citoyens, qui sont contraints d’emprunter à des taux plus élevés. “Les familles ont de moins en moins de ressources. La BCE prend des mesures qui ne vont pas dans le sens de la majorité sociale”, s’est exclamée l’eurodéputée espagnole Ana Miranda (Les Verts, écologistes). En parallèle des difficultés vécues par leurs concitoyens, ces eurodéputés ont critiqué les profits réalisés par les grandes entreprises du secteur énergétique qui ont bénéficié de l’inflation.

Comme l’explique l’économiste Etienne Farvaque, professeur à l’université de Lille, la BCE ne dispose pas d’autre outil pour réguler l’économie de la zone euro. Mais “on peut reprocher à la BCE de s’y être prise trop tard. Par conséquent, la politique de redressement est trop brutale”, concède-t-il.

L’enjeu de la transition écologique

Moïse Sidiropoulos, cofondateur de l’Observatoire des politiques économiques en Europe (OPEE), s’inquiète aussi de l’impossibilité pour la BCE de s’adapter au marché économique de chaque pays. “Ces mesures vont avoir des effets fragilisants pour les États déjà dans des situations compliquées, cela va renforcer une asymétrie déjà existante”, explique-t-il.

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L'inflation a atteint des niveaux record en novembre 2022 dans la zone euro. © Clara Grouzis

S’il peut contenir l’inflation, le redressement des taux directeurs risque d’être nuisible au développement de nouvelles énergies, selon les économistes. “Il faut arrêter d’augmenter les taux d'intérêt tous les trois mois. Les investisseurs ont du mal à anticiper et vont moins placer d’argent, y compris dans les énergies vertes”, précise Moïse Sidiropoulos. 

Un sujet qui a bien occupé les eurodéputés. Pour eux, la BCE devrait s’atteler davantage à favoriser les investissements dans la transition écologique. Christine Lagarde n’a pas manqué de rappeler les prochains objectifs de la BCE dans ce domaine, notamment limiter les émissions des entreprises non financières avec une forte empreinte carbone, à partir de 2024.

Keziah Cretin et Clara Grouzis

 

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