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A l'Elsau, une balade haute en couleur

19 septembre 2015

De Watteau à Schoengauer, en passant par Michel-Ange, le quartier de l'Elsau compte 34 rues portant des noms de peintres. A l'occasion des Journées du patrimoine samedi 19 septembre, la médiathèque de l'Elsau, des associations et la Ville de Strasbourg avaient mis en place le "sentier des peintres". Une balade pour découvrir le quartier sous un autre angle, plutôt décevante.

Un parcours pour découvrir le quartier des peintres, sur le papier, l'idée peut séduire. Dans les faits, c'est plus compliqué. Proposée dans le cadre des Journées du patrimoine, cette balade d'une heure commentée et illustrée de dix reproductions de tableaux, au coeur de l'Elsau, s'est révélée haute en couleurs. A 14 h, seuls trois curieux ont fait le déplacement pour le premier circuit. Le mauvais temps a peut-être eu raison de la motivation des habitants du quartier. A l'étroit dans l'entrée exiguë de la médiathèque, les visiteurs observent deux reproductions de tableaux collées sur les murs. Claire Minard, la directrice des lieux, est aux commandes de la visite coorganisée par un collectif d'associations et les Musées de la ville.

Cheveux attachés, trieur en main, elle lit avec entrain ses fiches surlignées de jaune fluo. Premier tableau du parcours, « L'écureuse de cuivre » du peintre français Antoine Watteau. Alors qu'elle débute la description minutieuse de l'oeuvre, Maurice, habitant à l'Elsau depuis 1971, sort son appareil photo. Grand mal lui en a pris ! Les clichés ne seront pas autorisés pour cette visite, pourtant en grande partie réalisée dans l'espace public. « Nous n'avons pas affiché les crédits du musée », argumente Claire Minard.

Après cette mise au point, la balade se poursuit dans les rues du quartier. La troisième œuvre décrite est affichée derrière la vitre cassée d'une pizzeria fermée. Plus loin, c'est une jeune fille qui doit tenir les affiches pendant les explications de Claire Minard. « Avec la pluie, on n'a pas pu afficher tous les tableaux », justifie la directrice. Problème, tenir une reproduction plastifiée de près d'un mètre, qui ne cesse de s'enrouler, n'est pas une mince affaire. Maurice tente bien de lui prêter main forte. On l'enjoint de ne pas s'abîmer le dos.

Une peinture disparue, un accident de scooter et une visite en accélérée 

Dans la rue Titien, la visite tourne au cache-cache. Au bout d'une petite rue, l'oeuvre du peintre italien, censée être affichée sur une maison, a tout simplement disparu. Chacun y met du sien pour tenter de retrouver la peinture fantôme. « C'est sûrement quelqu'un qui l'a prise. Heureusement que j'ai regardé les œuvres sur Internet avant de partir », s'exclame Claire Minard, avant de se lancer, tant bien que mal, dans une description du tableau. A la moitié du parcours, le temps presse. D'autres visiteurs attendent le second circuit, prévu à 15 heures. « Il est déjà trois heures moins dix, il faut que je me dépêche », s'empresse la guide.

Le petit groupe se dirige au pas de course rue Veronese. En bruit de fond, les allers-retours de deux jeunes en scooters perturbent l'analyse accélérée de « La mort de Procris », récitée sur le trottoir de la rue. Soudain, un des jeunes tente une accélération sur la roue arrière, et termine sa course dans le scooter de son acolyte, arrêté quelques mètres plus loin. Des bouts de plastique volent, le portable de l'un des jeunes s'explose sur le sol et les insultes fusent. Les visiteurs, jusque-là très studieux, ont vite abandonné la vie de Veronese pour ne pas en perdre une miette.

Pas découragée, Claire Minard achève son récit et dirige le groupe vers les trois dernières œuvres de la visite, placardées sur la maison Action Quartiers. Cette fois, un imposant grillage sépare de plusieurs mètres les visiteurs des peintures. « La création d'Adam », de Léonard de Vinci, imprimée en format A4, peine à émerger de la masse des autres affiches de l'association, déjà collées sur les vitres. Bien décidé à repartir avec un souvenir, Maurice fait une ultime tentative de photo entre les mailles du grillage, dans le dos de Claire Minard, trop occupée à terminer dans les temps. Après un bref résumé de la vie du seul peintre de la région, Martin Schongauer, le groupe se sépare sur cette note alsacienne.

Plan interactif du "Sentier des peintres", un circuit piéton d'une heure à travers les rues du quartier de l'Elsau. Crédits : wikicommons

Estelle Pattée et Aurélie Sipos 

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