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Depuis l'aggravation de la crise de la dette souveraine de l'été dernier, les banques européennes, dont la capitalisation boursière à devissé à grande vitesse, sont à la peine pour se refinancer. Ce qu'elles doivent faire régulièrement, afin d'alimenter le grand cycle du crédit qui les maintient sous perfusion. Comme en 2008, après la faillite de Lehman Brothers, elles ne se prêtent plus entre elles. Et les investisseurs des marchés de gros, comme les assurances ou les fonds de retraite, ne font plus confiance en leurs bilans, lestés de dettes souveraines dépréciées et gonflés de produits dérivés à valeur incertaine ou à exposition risquée. «Il y a trop d'opacité sur qui détient, et pour combien, des « CDS » (ces assurances contre le défaut d’un État) de pays fragiles », pointe notamment Clémentine Gallès, économiste à la Société Générale.

Signe de cette tension, les banques de l'eurozone placent leurs excédents de liquidités après de leurs banques centrales nationales, bien à l'abri dans leur facilité de dépôt, plutôt que de prêter à leurs pairs. Et pourtant, « ces dépôts sont moins rémunérés que les prêts sur le marché interbancaire », remarque Clémentine Gallès. Pour éviter l'embolie du système, la BCE a décidé d'ouvrir à profusion le robinet de ses liquidités en multipliant  les « mesures non-conventionnelles » qu'elle active régulièrement depuis 2007. L'idée est d'augmenter la quantité et la maturité de ses prêts aux banques pour leur permettre de franchir cette mauvaise passe qui perdure.  «Les règles sont devenues plus généreuses », admet Philippe Mongars, adjoint au directeur de la stabilité financière à la Banque de France. Celle-ci prête aux banques résidant en France en exécution des décisions prises par le Conseil de la BCE.  

Depuis cet été, ces mesures n'ont cessé d'être renforcées. Ainsi, début décembre, les 17 banques centrales nationales de l'Eurosystème ont alloué aux banques européennes plus de 50 milliards de dollars mis à disposition par la FED pour compenser le tarissement des marchés monétaires américains. Elles se sont aussi mise à financer à long-terme en rachetant les obligations que les banques européennes n'arrivent pas à écouler. Après des prêts à 12 mois, en octobre, la BCE a ainsi annoncé deux opérations de prêts à trois ans à taux encore moins chers. En effet, elle continue de baisser son taux directeur. Depuis le 8 décembre, il s'élève à 1%. Et, en contrepartie de ses prêts, elle consent à être de  moins en moins regardante sur la qualité des titres qu'elle exige en garantie.

« La BCE prête de façon illimitée »

Alors qu'à l'origine, la BCE calibrait la générosité de ses mises à disposition de liquidités dans le but de contrôler les taux d'intérêts, la voici donc devenue principale opérateur de la stabilité du système financier. Il ne s'agit plus seulement de stabiliser les prix. Elle est désormais le dernier recours du système tout entier. Si elle n'intervenait pas, convient Clémentine Gallès, les conséquences seraient irrémédiable  : « Credit crunch », ou contraction de crédit,  c'est-à-dire une situation où les banques rationnent les crédits octroyés aux ménages et aux entreprises , et surtout faillites d’établissements , y compris systémiques». Lesquelles déclencheraient de proche en proche le grand effondrement mondial qui hante les rêves de tous les décideurs depuis 3 ans.

À en croire Christian Noyer, gouverneur de la Banque de France, la prodigalité de la BCE aurait un objectif supplémentaire: permettre aux banques d’acheter des dettes souveraines. « Nous avons un bazooka qui passe par les banques », a-t-il déclaré dans une interview sur LCI le 9 décembre. Le « bazooka », ou l'achat direct et massif de dettes souveraines sur les marchés, l'arme qui manque au FESF, mais que la BCE refuse d'utiliser elle-même. Ses largesses permettront en effet aux banques d’acheter, par exemple, de la dette publique à court terme, à 3,5% d’intérêt, et de toucher intérêt et principal avant même d’avoir à rembourser la BCE. Nicolas Sarkozy caresse les mêmes projets, affichage de muscles en prime: « la BCE prête de façon illimitée aux banques européennes à un taux de 1% sur 3 ans. (…) Cela veut dire que chaque État va pouvoir se tourner à nouveau vers ses banques », a-t-il souligné lors de sa conférence de presse impromptue lors du sommet européen.

Pour l'heure, les banques songent plutôt à se délester de ces obligations souveraines qui plombent leurs bilans et suscitent la méfiance des marchés. Au troisième trimestre, les banques françaises ont réduit leur détention d'obligations publiques de 20 à 30 %. Mais qui peut aujourd'hui refuser de se plier aux suggestions du gouverneur de sa banque centrale?

Clément Le Bris

Statistiques de la BCE sur les taux d'intérêt

 

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Le rapport Vickers veut séparer les banques de détail des banques d'affaires

Six manières de se recapitaliser

Devant les exigences en matière de fonds propres de l'autorité bancaire européenne (EBA), les banques font face à l'obligation de trouver des capitaux avant juin 2012. Pour répondre à ces défis, les établissements ont six possibilités.

  • Ouvrir leur capital

C'est la méthode la plus traditionnelle. Les banques émettent de nouvelles actions sur le marché. L'argent tiré de ces émissions est directement reversé dans les fonds propres des établissements bancaires. Cette solution n'est guère appréciée par les actionnaires qui voient leur part diluée. Il faut également pouvoir trouver preneur. En dernier recours, les fonds peuvent venir d'acteurs publics.

Exemple : La banque italienne UniCredit, qui doit se recapitaliser à hauteur de 8 milliards d'euros, a annoncé qu'elle émettra des titres sur le marché au cours du mois de janvier 2012.

  • Convertir leurs dettes

Les banques utilisent des instruments financiers appelés dettes hybrides. Ils permettent de transformer une dette déjà présente dans le bilan en action. La mutation faite, le créancier devient actionnaire de la banque. C'est une ouverture indirecte du capital, évitant une mauvaise publicité à l'établissement.  La banque peut faire figurer l'action dans ses fonds propres contrairement à une dette.   

Exemple : Le groupe bancaire espagnol BBVA a récemment décidé de renforcer son capital via une émission de bons convertibles en actions à hauteur de 3,475 milliards d'euros.

  • 
Réduire leurs risques

Pour diminuer leur exposition au risque, et donc les exigences en fonds propres, une banque peut réorganiser son bilan en noyant les actifs risqués au milieu d'actifs sûrs. Le risque est ainsi dilué. Ceci passe aussi par la cession d'actifs risqués. Les PME peuvent être touchées car elles restent des débiteurs risqués.

Exemple : Entre début juillet et début novembre 2011, la Société Générale s'est débarrassée de 10 milliards de titres issus de portefeuilles d'actifs, essentiellement américains, devenus indésirables depuis la crise. L'opération a  représenté un coût de 450 millions d'euros du fait de la baisse de la valeur de ces actifs.

  • Vendre leurs actifs

Les banques ont la possibilité de céder des actifs telles que des filiales à l'étranger. Cela représente une entrée d'argent à laquelle s'ajoute la cession des actifs détenus par la succursale. Néanmoins, il faut trouver un acheteur  capable de mettre un prix raisonnable pour que la vente ne se fasse pas à perte.

Exemple : Santander a mis en vente 7,8% de sa filiale au Chili « Banco Santander Chile », qui devrait lui rapporter 800 millions d'euros, et 8,2% de sa filiale brésilienne « Banco Santander Brasil », dont elle espère tirer 1,7 milliard d'euros.

  • Conserver leurs bénéfices

Au lieu de redistribuer ses profits, sous forme de bonus ou de dividendes, la banque se sert de ses bénéfices pour renforcer les fonds propres. Cependant, pour mettre en place cette solution il est nécessaire que la banque dégage des bénéfices. De plus, les actionnaires ne sont pas toujours enclins à couper dans leurs gains.

Exemple : La Société Générale a annoncé mardi 8 novembre 2011 renoncer aux versements des dividendes afin de « renforcer son fonds propre ». Elle n'exclut pas de reprendre cette pratique dès l'exercice de 2012.

  • Se désendetter

Les pouvoirs publics craignent l’usage de ce levier. Les banques dans le soucis, de diminuer leurs expositions, restreignent fortement l'offre de crédit et se contentent de toucher les versements des crédits déjà en cours. À moyen terme, cette décision peut altérer les résultats de la banque mais également provoquer le ralentissement de l'économie réelle.

Exemple : Dans un rapport publié le 25 novembre 2011, la banque d'investissement Morgan Stanley estime les futures baisses de crédits au sein de la zone euro, étendue à la grande Bretagne, entre 3 et 5 %. Lors de l'exercice 2008 – 2009, elle l'avait évalué à un niveau situé entre 1 et 2 % .

Catherine Deunf et Fabien Piégay

 

Fil twitter de l'infosphère financière.

 

 

 

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Les réseaux sociaux jouent un rôle grandissant dans la propagation de rumeurs financières. (© Cuej / Brice Lambert) 

 

  • Et sur la hausse des impôts

Le poids de la dette va encore s'alourdir

En 2012, les réductions à marche forcée des déficits publics engagées par les gouvernements ne réduisent pas leurs besoins de recourir aux marchés.
La valeur de la dette contractée qui arrive à échéance est considérable pour les États les plus exposés à la défiance des investisseurs,comme l'Italie et l'Espagne.
Quant au gouvernement français, il devra faire appel au marché en 2012 pour lever l'équivalent de 16% de son PIB.

  • La position du PS et de l'UMP sur la réduction de dépenses

Les collectivités qui ont fait confiance à Dexia croulent aujourd'hui sous les dettes toxiques. La banque franco-belge est en cours de démentèlement. (© AFP)

La crise ampute l'autonomie budgétaire des gouvernements nationaux

En 2006, le Trésor irlandais était capable de subvenir à ses besoins de financement des politiques publiques, pendant une période équivalente à 10 mois par an. Quatre ans plus tard, son autonomie budgétaire se réduit à quatre mois.
Depuis 2007, la situation des budgets nationaux de la zone euro s'est nettement dégradée. En cause, le soutien au secteur financier et les divers plans de relance de l'économie. En parallèle, le ralentissement de l'activité économique a entraîné une baisse des recettes fiscales.
Année après année, les déficits se creusent. La dette contractée pour les combler se cumule avec les échéances de la dette antérieure.
 

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