Jeudi 14 février, un règlement sur l'ouverture à la concurrence du transport en autocars a été adopté par le Parlement européen. Si le texte est validé par les Etats, le marché s’en trouvera profondément transformé.
Effectuer un vol Paris-Marseille via la compagnie irlandaise Ryanair ? Cela est possible. Monter dans un train de la Deutsche Bahn qui relie Londres et Manchester ? Pas de problème. Envisager un trajet Madrid-Barcelone à bord d’un Ouibus ? Pas question. Cette contrainte pourrait être levée après l’adoption d’un règlement sur le transport interurbain, jeudi 14 février, par le Parlement européen.
Les transporteurs d’autobus européens pourront à l’avenir, comme cela est déjà le cas dans le ferroviaire et l’aérien, proposer leur service en dehors de leur pays d’origine, dans l'ensemble de l’Union européenne. Une proposition dans l’air du temps, selon son rapporteur letton Roberts Zīle (ECR, conservateur). « Nous devons ouvrir le marché à d’autres entreprises et ainsi être dans l’esprit de ce qu’est l’Union européenne », a-t-il plaidé durant les débats.
Jusqu’à présent, la plupart des transporteurs ne peuvent offrir leur service de transport interurbain que dans leur pays d’origine. Si le règlement est adopté par les Etats au Conseil, l’ouverture du marché entraînera plus de choix pour les consommateurs. Ces derniers pourront « profiter d’un service de meilleure qualité et à un prix considérablement plus bas », selon Roberts Zīle.
Cependant, la mise en place du système de filtrage ne sera pas obligatoire. « Il s’agit d’une aide à la décision pour les Etats membres. Ils sont prévenus à l’avance sur les intentions politiques et non économiques de certains investisseurs. S’ils décident tout de même d’accepter l’IDE, ils ne pourront pas dire qu’ils ne savaient pas. » explique Franck Proust. En effet, la décision finale reviendra au pays qui accueillera l'investissement.
La Chine dans le viseur européen ?
« Le texte n’est pas là pour faire du protectionnisme mais pour préserver nos intérêts dans des secteurs stratégiques. On reste ouvert aux IDE car ils sont source d’emplois et de croissance », explique la commissaire européenne Cecilia Malmström. A la question de savoir si le texte visait des pays en particulier, la commissaire répond que « c’est une décision neutre et non discriminatoire. On songe tout de même à la Chine car elle a officiellement dit qu’elle voulait investir dans des secteurs stratégiques dans des pays tiers ». Ainsi, en 2016, le port de Pirée en Grèce a été racheté par l’armateur chinois Cosco pour 368,5 millions d’euros. La même année, l’empire du Milieu s’est emparé du fabricant allemand de robots Kuka pour 7,3 milliards d’euros.
S’il y a un fort consensus à l’heure actuelle, plusieurs pays se montraient réticents à cette nouvelle législation il y a encore quelques mois. Les Pays-Bas, par exemple, se sont inquiétés du sort du port de Rotterdam qui dépend fortement des activités chinoises. « De manière générale, la crainte partagée des États était la remise en cause du principe de subsidiarité, c’est-à-dire que l’UE s’immisce dans leurs décisions », explique Franck Proust.
Initialement opposé à l’accord, le groupe ECR (conservateurs) estimait que le dispositif représentait « un danger de repli protectionniste ». « Depuis, des aspects cruciaux ont été modifiés notamment sur la sécurité juridique. », explique Joachim Starbatty, eurodéputé allemand de ce groupe. Des changements qui l'ont finalement amené à soutenir la nouvelle législation. Les Etats ont désormais la possibilité d’introduire un recours en justice contre les décisions de filtrage. Un an de négociations entre la Commission, le Parlement et le Conseil de l’Union européenne aura été nécessaire pour mettre tout le monde d’accord. Jeudi, le règlement a été adopté à une large majorité (500 voix, 49 contre et 56 abstentions).
Aujourd’hui, 14 Etats membres disposent de leur système de filtrage des investissements étrangers. « Le vœu pieu que j’ai, c’est que dans deux ou trois ans, les 27 Etats auront leur dispositif de filtrage », espère Franck Proust.
Muriel Kaiser et Yacine Arbaoui
Ces vingt dernières années, les investissements directs étrangers (IDE) ont changé en Europe. Même s’ils proviennent majoritairement des Etats-Unis (40%), les IDE issus des pays émergents ne cessent de croître. La part des investissements du Brésil a été multiplié par dix et celle des Russes a doublé. Les investissements chinois sont euxpassés de moins de 1 milliard d’euros en 2008 à 35 milliards en 2016, selon Rhodium Group, un institut de recherche économique. Le premier pays de destination est le Royaume-Uni (23 %), suivi par l’Allemagne (19 %), l’Italie (13 %) et la France (11 %). Le secteur des technologies de l’information et de la communication est la première cible (16 %), suivie par les transports et les infrastructures (15 %).
Un dispositif non obligatoire
L’un des objectifs du dispositif est de mieux protéger les intérêts de l’Union européenne et de développer sa politique économique. « Il faut que nous soyons plus vigoureux pour défendre l’industrie européenne et lui donner la possibilité d’être compétitive face aux autres pays dans des domaines stratégiques », insiste Bernd Lange, (S&D, sociaux démocrates), président de la commission du commerce international au Parlement.
Un règlement sur le filtrage des investissements directs étrangers dans l’Union européenne « pouvant constituer une menace pour l’ordre public et la sécurité » a été adopté par les eurodéputés jeudi 14 février.
« Toutes les puissances du monde ont leur système de filtrage des investissements. Il était temps que l’Union européenne fasse de même », constate Franck Proust, (PPE, chrétiens-démocrates) rapporteur du règlement adopté par le Parlement jeudi 14 février. Celui-ci instaure un système de filtrage pour mieux identifier les investisseurs sur le territoire européen.
L’Europe, première destination des IDE
Le but du filtrage est de rendre obligatoire « l’échange des informations entre les Etats membres sur les investisseurs étrangers dans des secteurs sensibles comme la technologie, l’industrie ou encore l’énergie », selon Franck Proust.
Le dispositif prévoit aussi que la Commission puisse émettre un avis non-contraignant sur un investissement direct étranger. « Une décision prise par un Etat membre peut avoir des conséquences dans un autre Etat. Il sera désormais possible de traiter les risques que représentent les IDE pour notre sécurité », explique Cecilia Malmström, commissaire européenne au commerce.
Mélissa Antras
Les eurodéputés ont approuvé à une large majorité, jeudi 14 février, une résolution dans laquelle ils demandent aux Etats membres de ne pas employer une force disproportionnée à l’encontre de manifestants pacifiques. Après 13 semaines de mobilisation des Gilets jaunes en France et 3200 blessés, la députée Marie-Christine Vergiat et son groupe la Gauche Unitaire Européenne, ont obtenu un débat au Parlement européen sur les manifestations et leur encadrement. Mais pour eux, la résolution adoptée à l'issue de ce débat ne va pas assez loin. « Nous demandons l’interdiction de ces armes qui peuvent être mutilantes », a précisé Marie-Christine Vergiat, mentionnant notamment les LBD40 et les grenades Gli-F4.
Les débats ont été l’occasion pour la Commission de se positionner sur les manifestations qui ont eu lieu en France, en Espagne ou encore en Grèce depuis quelques mois. Elle a insisté par le biais du commissaire Karmenu Vella sur le fait que « les libertés inscrites dans la charte des droits fondamentaux se réfèrent à un droit de réunion pacifique ». Les eurodéputés ont eux aussi été nombreux à souligner que le droit de manifester ne devait pas empiéter sur d’autres droits et à condamner toutes les formes de violences.
La Commission a toutefois précisé qu’elle « suit de très près toutes les évolutions qui pourraient affecter ces droits et s’avère tout à fait prête à agir si cela est nécessaire ».