Le Parlement européen a adopté ce mardi 3 mai une feuille de route sur l’intelligence artificielle. Elle servira de base pour les législations à venir. Toutefois des interrogations persistent sur la protection des droits humains.
Lors de la plénière du Parlement européen du 4 mai, les eurodéputés ont refusé de voter le budget 2020 de l’Agence européenne de garde-frontières et garde-côtes, plus connue sous le nom de Frontex, qui s’élevait à près de 360 millions d’euros. Cette décision fait suite à la démission de Fabrice Leggeri, le directeur général de l’agence, le 29 avril dernier. Sa gestion était mis en cause dans un rapport de l’Office européen de lutte anti fraude (OLAF), suite à des révélations médiatiques au sujet du refoulement illégal de migrants aux frontières extérieures de l’UE.
« Le Parlement européen souhaite mettre un terme à ces dérives. En dépit de nos demandes, le conseil d’administration de Frontex a refusé que le rapport de l’OLAF soit publié ou que les députés européens puissent le consulter », a critiqué Michèle Rivasi, élue chez les Verts et membre de la commission du contrôle budgétaire.
L’assemblée plénière a largement approuvé le gel de la décision. Elle conditionne la validation du budget de Frontex à la présentation « d’une feuille de route détaillée à l’autorité de décharge sur la façon dont l’Agence entend répondre aux préoccupations qui subsistent », notamment en matière de défense des droits humains. Lors du vote, les eurosceptiques et l’extrême-droite se sont opposés à cette décision, ainsi qu’un petit contingent de droite comprenant notamment François-Xavier Bellamy ou encore Nadine Morano.
« Le secteur du transport connait depuis deux mois de grandes difficultés liées notamment au ralentissement forcé de l’activité des aéroports, des ports. Nous devons y répondre avec force et solidarité ». C’est par ces mots que la commissaire européenne aux affaires intérieures Ylva Johansson a exhorté les députés européens à voter une résolution validant la création d'un plan d’actions, qui doterait l’UE de ressources suffisantes à la mise en place d’aides pour les entreprises du secteur du tourisme et des transports, particulièrement impactées par la guerre en Ukraine.
Ce plan se matérialise par un fonds alimenté par l’ensemble des pays membres, ainsi que des abattements fiscaux et une prorogation des échéances de paiement. La commission demande par ce vote que le parlement agisse dans la continuité de ce qui a déjà été validé depuis le début du conflit, notamment une plus grande souplesse en matière de transports routiers avec la suppression des obligations de péages, un allongement du temps de conduite des chauffeurs poids lourds, et un contrôle aux frontières allégé.
« C’est l’aventure d’une vie. Je suis convaincue que les choses peuvent changer ». Camille Girard, lycéenne française et plus jeune participante à la plénière de clôture de la Conférence, exprime ses espoirs de voir le travail fourni lors de la Conférence sur l’avenir de l’Europe aboutir à des mesures concrètes. L’initiative lancée il y a un an sous l’impulsion d’Emmanuel Macron vise à donner plus de place aux citoyens dans la prise de décisions politiques dans des thèmes comme la santé, le changement climatique et l'environnement. C’est aussi le cas pour la place de l’UE dans le monde, avec le souhait d’une armée commune pour les États de l’Union. Censée tracer le sillon d’un nouvel avenir pour l’UE, la conférence a rencontré un engouement sans précédent chez les participants.
Tous espèrent désormais du concret comme Michaylakis Asimakis, citoyen chypriote et lui aussi participant à la conférence. Cet européen convaincu reste pragmatique. « J’ai quelques doutes évidemment. En politique, entre les mots et les actes, il se passe souvent beaucoup de temps ».
Une opportunité de repenser l’Union Européenne
Sur le long terme, tous les parlementaires veulent repenser l’Europe pour qu’elle ressorte plus forte de la guerre. Or, s’ils sont d’accord sur cette idée, ils ne le sont pas sur les moyens. Les Verts par exemple veulent une Europe sociale qui agit pour les plus précaires et les travailleurs, alors que la droite européenne du PPE souhaite davantage une refonte économique de l’Europe pour favoriser les entreprises. À cause de ces nombreux désaccords, l’Europe apparaît incapable d’amortir le choc de la guerre et des sanctions sur le porte-monnaie de ses citoyens.
Amjad Allouchi et Victor Topenot
Des listes transnationales
La proposition du Parlement doit permettre de créer une circonscription paneuropéenne, composée de 28 sièges supplémentaires. Concrètement, en France, le scrutin se déroulerait de la manière suivante : comme d’habitude, un bulletin servira pour le choix d’une liste nationale (par exemple la liste Europe Ecologie Les Verts). Mais les électeurs auront désormais un second bulletin à disposition. Celui-ci permettra de voter pour une liste transeuropéenne de leur choix, avec des candidats issus de tous les États membres et partageant des convictions politiques communes (par exemple la liste du parti Vert européen avec un chef de file qui pourrait très bien être allemand ou portugais).
Ces listes garantiront une représentation géographique équilibrée, et proportionnelle à la taille des Etats membres. Elles devront être paritaires, et proposées par des entités électorales européennes telles que des coalitions de partis nationaux, européens ou des associations d’électeurs. La perspective de voir des listes d’eurodéputés faire campagne dans toute l’UE ne fait pas l’unanimité au sein du Parti populaire européen (PPE, droite), majoritaire au Parlement. « Cette circonscription unique ne servirait qu’à créer des bataillons de députés hors-sol, déconnectés des réalités du terrain », critique Brice Hortefeux, l’un des députés du groupe.
Renforcer la citoyenneté
Cette volonté de réformer la loi électorale de l’Union s’est accompagnée d’un travail de longue haleine. Le système de suffrage actuel date de 1976, et les voix s’élevant en faveur d’une Europe plus démocratique sont de plus en plus pressantes. « Nous avons une grande chance d’écrire l’histoire européenne. Durant la Conférence sur l’avenir de l’Europe, les citoyens nous ont donné un mandat clair, ils veulent que le droit électoral soit modifié », soutient la socialiste allemande Gabriele Bischoff (S&D, sociaux-démocrates).
Ainsi, les parlementaires souhaitent aussi renforcer la citoyenneté au sein de l’UE et harmoniser le suffrage dans les différents Etats membres : l’instauration du 9 mai comme
« Dans l’Union européenne seules 30 % des start-ups sont lancées par des femmes », a souligné la danoise Pernille Weiss (EPP, droite), membre de la commission des droits des femmes, lundi 2 mai. Lors de la session parlementaire, les députés ont adopté une résolution qui inclut une série de recommandations aux Etats membres pour encourager l’entreprenariat chez les femmes : sensibilisation, suppression des obstacles administratifs ou renforcement des aides fiscales. Objectif : promouvoir l’égalité femmes-hommes.
« Les femmes doivent faire face à une barrière constituée par les stéréotypes de genre », explique l'Irlandais Billy Kelleher (Renew, libéraux). En plus de manquer de confiance en elles, quand il s’agit de diriger une entreprise, elles sont moins prises au sérieux et ont plus de difficulté pour obtenir un crédit. Le polonais Janusz Wojciechowski, commissaire européen à l’Agriculture souligne aussi : « Même lorsqu’elles sont cheffes d’entreprises les femmes ont plus tendance à travailler dans une petite entreprise ou à temps partiel avec moins d’employés et moins de bénéfices »
« Il nous reste beaucoup de travail à faire », conclut Billy Kelleher. En effet, dans leur résolution, les eurodéputés s’inquiètent du rapport de la Cour des comptes d’octobre 2021 qui conclue que dans le budget de l’UE, les hommes ont plus bénéficié que les femmes de la répartition des dépenses publiques.
Mario Draghi a appelé le Parlement européen à lancer une procédure de révision des traités européens, qui permettrait selon lui d'accélérer la prise de décisions de l’UE. Une position partagée par les citoyens participant à la Conférence sur l’avenir de l’Europe.