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Les étudiants de l’Institut de formation en soins infirmiers (Ifsi) de Strasbourg ont vécu la crise sanitaire en première ligne. Si la plupart d’entre eux ont confirmé leur vocation, la gériatrie, elle, peine toujours à recruter.

“On est l’offre, et la demande est tellement haute”, expose Elouan, 21 ans. Étudiant infirmier en première année, le Breton prend l’air devant le bâtiment vitré de son école, dans le quartier de la Robertsau, à Strasbourg. Décontracté, il explique que son futur métier ne lui fait pas peur: “Je vois ça comme un avantage. Les conditions de travail sont tellement pourries qu’il y a plein de postes à prendre. On arrive en position de force.” Selon une enquête de la Fédération hospitalière de France menée en 2019, il y aurait en effet 2 à 5% de postes vacants chez les soignants.

En avril 2021, Elouan a postulé à l’Institut de formation en soins infirmiers (Ifsi) de Strasbourg sur Parcoursup. Comme lui, près de 700 000 candidats ont formulé au moins un vœu dans un Ifsi cette année. Depuis la suppression du concours au profit d’une sélection sur dossier, en 2019, la formation des blouses blanches est de loin la plus demandée sur la plateforme. Cette année, l’établissement de la Robertsau a étudié plus de 3 500 dossiers de candidature pour n’en retenir que 175. S’il y a donc beaucoup d’appelés pour peu d’élus, les candidats ne se découragent pas. Un engouement d’autant plus surprenant que selon une étude réalisée par l’Ordre des infirmiers en 2021, près de 40% des infirmiers affirment que "la crise leur a donné envie de changer de métier".

 

Pourquoi vous êtes-vous installé à la Cité de l’Ill ?

C’est un choix citoyen, je veux participer à la vie de la cité! Je revendique cette position: répondre aux besoins de santé est un acte citoyen. C’est pour cette raison qu’avec un autre médecin généraliste, on a créé la MUS en 2014. En 2020, on a emménagé ici dans cette nouvelle structure, au pied de la tour Schwab. Elle propose médecine générale, soins dentaires, aide psychologique et administrative, cabinet d’infirmerie.

Mais même ainsi, je considère que l’offre reste trop faible par rapport au reste de Strasbourg. Notamment en matière de soins spécialisés et par rapport à la densité de population qu’on trouve à la Cité de l’Ill.

Quelle est la situation de santé des habitants de la Cité de l’Ill ?

Ils sont en moins bonne santé de manière catastrophique. Ils meurent plus tôt, leur espérance de vie sans incapacité est moindre. En tant que médecin, c’est terrible de penser que la pauvreté joue un rôle déterminant en matière de santé et est associée à un risque de faire un AVC, de mourir plus tôt.

À la Cité de l’Ill, j’observe un certain nombre de pathologies chroniques: des problèmes dentaires, de l’obésité, des bronchites chroniques, du diabète, ainsi que des problèmes mentaux tels que l’isolement, la souffrance, la tristesse. Certaines zones du Neuhof, de Cronenbourg et de Hautepierre sont plus pauvres encore, et la situation y est encore plus préoccupante.

Le chant du pic vert peine à se faire entendre sous le vrombissement incessant des camions qui se dirigent vers le port aux pétroles, sa zone Seveso et ses friches. À partir du Pont du Canal, une dizaine de bâtiments abandonnés ou terrains inutilisés jalonnent le quai Jacoutot. Ici, la nature reprend ses droits, aidée ou non par la main de l’Homme. Cachée par d’épais sapins, Euroasis est la première de ces friches.

Baptiste Candas et Quentin Celet

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L'espace de permaculture des jardins d'Euroasis. ©louise forbin

Destruction d’un habitat naturel 

La migration des animaux est possible car le bois de Bussière fait partie d’une trame verte et bleue, sorte de corridor écologique permettant de relier différents réservoirs de faune. Les conséquences de son remplacement par des logements sont “la destruction et la fragmentation des habitats”, comme l’explique l’Eurométropole sur le site Strasbourg ça pousse. “Certains effectifs sont en net déclin avec la disparition des habitats. C’est le cas du triton crêté qui vit dans le bois”, alerte Frédéric Petitpretz, bénévole au sein de Bufo, l’association d’étude des amphibiens et reptiles d’Alsace. Selon lui, le plus grand triton de la région, au ventre jaune vif ponctué de ronds noirs, se reproduit dans les mares rue de Bussière de mars à juillet et “fait sa petite vie terrestre la plupart du temps, sous des feuilles, des racines ou des souches”. Pour assurer la survie de cette espèce classée “quasi menacée”, il faudrait une mare tous les kilomètres environ.

Accepter l'évolution du bâti

Marc Hoffsess, l’adjoint à la maire de Strasbourg défend qu’il faut accepter l’évolution du bâti qui témoigne de son temps. “Une construction contemporaine, placée à côté d’une maison typique, affirmera l’architecture de notre époque, tout en valorisant par contraste celle du temps passé. Rien de pire que l’architecture pastiche!”

L’âme rustique de la cité, à laquelle sont tant attachés les habitants, ne risque pour autant pas de disparaître. L’exiguïté des terrains empêche les constructions massives et constitue donc un allié de préservation de l'architecture locale.

 

 

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Gaby Guthmann dans les jardins d'Euroasis. ©louise forbin

Tout en avançant, elle ajoute que le canal de la Marne au Rhin et ses berges fonctionnent comme un véritable “corridor écologique”. Il  “permet à la faune et à la flore d’y vivre et de se déplacer librement”. Dans le décor industriel du quai Jacoutot, il est encore possible de s’émerveiller. “En mai, on a vu des lucioles. Moi, je n’en avais jamais vu de ma vie”, sourit Anne Claire, d’Euroasis. “Vous avez déjà vu des lucioles, vous?”

 

Pierre Tryleski, médecin citoyen

Généraliste installé à la Cité de l’Ill depuis 1988, Pierre Tryleski préside la Maison urbaine de santé (MUS) dans ce quartier défavorisé de la Robertsau. Il défend un "choix citoyen".

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