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Bâle I, Bâle II, Bâle 2,5, Bâle III, cette valse de recommandations ressemble à une course sans fin. Une course entre un système financier innovant sans cesse pour que l'argent produise encore plus d'argent et un régulateur cherchant à juguler les risques que ces inventions font courir à l'économie réelle. Nous avons demandé à deux observateurs de ce monde de la finance de nous livrer leurs sentiments sur cette spirale. Nicolas Boisvilliers est consultant en services financiers, et Michel Aglietta, professeur de sciences économiques à Paris X, consultant pour Groupama et conseiller scientifique au CEPII (Centre d'Études Prospectives et d'Informations Internationales).
« La régulation a toujours été un jeu de chat et de souris », explique Michel Aglietta. Dans les années 1980, les banques prenaient des risques sur les marchés financiers sans commune mesure avec le capital dont elles disposaient. Elles s'exposaient à des pertes insurmontables. Les recommandations de Bâle I ont donc imposé un taux de fonds propres proportionnel à l'argent qu'elles avaient sorti de leurs caisses. « Bâle I s'attachait purement aux risques liés au crédit. Il s'agissait de limiter cette délivrance de crédit par rapport aux fonds propres des banques sans prendre en compte la qualité de l'emprunteur», explique Nicolas Boisvilliers.
Mais les banques pouvaient respecter le ratio de 8% imposé par Bâle I tout en prenant des positions très risquées sur les marchés. Suivra donc Bâle II qui prend en compte ces risques. Puis Bâle III qui oblige la détention d'actifs de qualité pour éviter un manque de liquidité en cas d'urgence. Rien n'y fait, plus l'étau se resserre, plus les acteurs financiers prennent des chemins de traverses, comme le dénoncent Nicolas Boisvilliers puis Michel Aglietta.
2 mai 2010 : Les pays de la zone euro et le Fonds monétaire international (FMI) s’accordent sur un prêt de 110 milliards d’euros sur trois ans pour la Grèce. Le FMI s'engage à hauteur de 30 milliards d'euros.
28 novembre 2010 : Le FMI s'engage à participer au plan de sauvetage de l'Irlande à hauteur de 22,5 milliards d'euros sur un total de 85 milliards.
3 mai 2011 : Il s'engage à participer au plan de sauvetage du Portugal à hauteur de 26 milliards d'euros sur un montant total de 78milliards.
21 juillet 2011 : Christine Lagarde, directrice générale du FMI, participe pour la première fois au sommet des chefs d'État et de gouvernement de la zone euro. Elle participera par la suite aux sommets européens des 23 et 26 octobre, puis au sommet du 9 décembre.
3 novembre 2011 : Elle prend part à toutes les réunions du «groupe de Francfort», devenu public au G20 de Cannes.
4 novembre 2011 : José Manuel Barroso annonce que l'Italie, troisième économie de la zone euro, sera mise sous surveillance du FMI, à la demande du gouvernement italien.
25 novembre 2011 : Les chefs de la diplomatie de l'Allemagne, des Pays-Bas et de la Finlande se déclarent favorables à un rôle «renforcé» du Fonds monétaire international (FMI) dans la crise européenne de la dette.
30 novembre 2011 : Le FMI se dit prêt à soutenir l'Italie, à condition que la Banque centrale européenne participe à l'effort.
9 décembre 2011 : Les dirigeants européens annonce la conclusion de prêts bilatéraux au Fonds monétaire international, d'un montant cumulé de 200 milliards d'euros.
J.T. / B.L.
Pourquoi le créer ?
Quel est son rôle
dans la régulation financière ?
Quelles actions ?
Quels sont ses acteurs ?
Catherine Deunf et Fabien Piégay à Bâle
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C'était à Zografou, faubourg d'Athènes, fin 2011. Des fonctionnaires municipaux amènent des sacs de paperasse à un groupe d'habitants. La paperasse ? Des contrats d'endettement de la mairie. Le groupe ? Un comité d'audit de la dette grecque. Leur objectif ? Analyser les emprunts de leur ville, et selon leurs critères, trier ce qu'il est légitime de rembourser, de ce qui ne l'est pas.
L' idée vient du Comité d'annulation de la dette du tiers monde (CADTM), qui a vu le jour en Belgique en mars 1990. Mais ses germes remontent aux années 80. La Belgique est alors très endettée, les bourgmestres licencient les fonctionnaires à tour de bras. Eric Toussaint, principal dirigeant du CADTM, se souvient : « A Liège, ces licenciements se sont heurtés à la contestation syndicale. C'est là que j'ai commencé à me spécialiser dans l'étude des causes de la dette ». En 1989, François Mitterrand convoque le G7 à Paris. 60 000 personnes protestent alors dans la rue, dans le cadre de la campagne « Ça suffat comme ci », répondant à l'Appel de la Bastille pour l'abolition de la dette du tiers monde. Enthousiastes, Eric Toussaint et ses camarades décident de fonder le CADTM, afin de fédérer tous les mouvements belges de solidarité avec les luttes au Nicaragua, au Salvador, ou avec le mouvement des sans-terre brésiliens, des pays très touchés par la hausse des taux d'intérêts américains.
Séparer le bon grain de l'ivraie
Pour le CADTM, il y a la bonne dette : santé, éducation, social et la dette odieuse. « Les Etats la contractent en faisant des cadeaux fiscaux aux grandes entreprises et aux ménages les plus riches d'abord. Ensuite, pour combler ce manque, l'État s'endette auprès de ceux-là même à qui il a fait des cadeaux », explique Eric Toussaint. Ce message, il l'a longtemps prêché dans le désert européen.
Le CADTM produit du matériel d'analyse et de mobilisation sur cette question et essaime. Des comités se créent au Maghreb, à Haïti et au Proche Orient, puis au Togo, au Bénin, au Sénégal et en Inde. En 2008, trente CADTM nationaux fonctionnent, dont seulement quatre au nord. La même année, des Grecs se rapprochent de l'organisation. « Ils pensaient qu'il allait être très difficile de parler de la dette dans un pays épargné par ce problème. Six mois plus tard, c'était devenu une préoccupation quotidienne, massive. »
Aujourd'hui, c'est un peu la revanche d'Eric Toussaint et des siens : la dette est au cœur des préoccupations européennes, validant les thèses qu'il s'échinait à répandre. Désormais, c'est dans le vieux continent qu'il voyage, invité de tous les rassemblements militants, en mal d'explications. Fort de son expertise en la matière, il propose sa solution : construire, dans chaque ville, des comités citoyens d'audit de la dette, pour l'analyser, séparer le bon grain de l'ivraie, et mobiliser pour refuser de payer la crise. Et son travail commence à produire ses fruits : en France, en Espagne et au Portugal, des comités apparaissent et organisent des meetings. Et ce sont des jeunes qui reprennent le flambeau : la secrétaire générale actuelle du CADTM, Myriam Bourgy, a seulement 27 ans.
Elsa Sabado
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