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C'était à Zografou, faubourg d'Athènes, fin 2011. Des fonctionnaires municipaux amènent des sacs de paperasse à un groupe d'habitants. La paperasse ? Des contrats d'endettement de la mairie. Le groupe ? Un comité d'audit de la dette grecque. Leur objectif ? Analyser les emprunts de leur ville, et selon leurs critères, trier ce qu'il est légitime de rembourser, de ce qui ne l'est pas.
L' idée vient du Comité d'annulation de la dette du tiers monde (CADTM), qui a vu le jour en Belgique en mars 1990. Mais ses germes remontent aux années 80. La Belgique est alors très endettée, les bourgmestres licencient les fonctionnaires à tour de bras. Eric Toussaint, principal dirigeant du CADTM, se souvient : « A Liège, ces licenciements se sont heurtés à la contestation syndicale. C'est là que j'ai commencé à me spécialiser dans l'étude des causes de la dette ». En 1989, François Mitterrand convoque le G7 à Paris. 60 000 personnes protestent alors dans la rue, dans le cadre de la campagne « Ça suffat comme ci », répondant à l'Appel de la Bastille pour l'abolition de la dette du tiers monde. Enthousiastes, Eric Toussaint et ses camarades décident de fonder le CADTM, afin de fédérer tous les mouvements belges de solidarité avec les luttes au Nicaragua, au Salvador, ou avec le mouvement des sans-terre brésiliens, des pays très touchés par la hausse des taux d'intérêts américains.
Séparer le bon grain de l'ivraie
Pour le CADTM, il y a la bonne dette : santé, éducation, social et la dette odieuse. « Les Etats la contractent en faisant des cadeaux fiscaux aux grandes entreprises et aux ménages les plus riches d'abord. Ensuite, pour combler ce manque, l'État s'endette auprès de ceux-là même à qui il a fait des cadeaux », explique Eric Toussaint. Ce message, il l'a longtemps prêché dans le désert européen.
Le CADTM produit du matériel d'analyse et de mobilisation sur cette question et essaime. Des comités se créent au Maghreb, à Haïti et au Proche Orient, puis au Togo, au Bénin, au Sénégal et en Inde. En 2008, trente CADTM nationaux fonctionnent, dont seulement quatre au nord. La même année, des Grecs se rapprochent de l'organisation. « Ils pensaient qu'il allait être très difficile de parler de la dette dans un pays épargné par ce problème. Six mois plus tard, c'était devenu une préoccupation quotidienne, massive. »
Aujourd'hui, c'est un peu la revanche d'Eric Toussaint et des siens : la dette est au cœur des préoccupations européennes, validant les thèses qu'il s'échinait à répandre. Désormais, c'est dans le vieux continent qu'il voyage, invité de tous les rassemblements militants, en mal d'explications. Fort de son expertise en la matière, il propose sa solution : construire, dans chaque ville, des comités citoyens d'audit de la dette, pour l'analyser, séparer le bon grain de l'ivraie, et mobiliser pour refuser de payer la crise. Et son travail commence à produire ses fruits : en France, en Espagne et au Portugal, des comités apparaissent et organisent des meetings. Et ce sont des jeunes qui reprennent le flambeau : la secrétaire générale actuelle du CADTM, Myriam Bourgy, a seulement 27 ans.
Elsa Sabado
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Pourquoi la créer ?
Quel est son rôle
dans la régulation financière ?
Quelles actions ?
Quels sont ses acteurs ?
Dans les années 80, les États-Unis se plaignent d'une concurrence déloyale entre les banques au niveau international. Dans leur ligne de mire : les banques japonaises implicitement soutenues par leur gouvernement. Malgré un faible capital, les établissements nippons effectuent des opérations très risquées et très lucratives sur les marchés sans craindre la faillite.
Depuis, pour atteindre une harmonisation de la réglementation, le comité de Bâle sur le contrôle bancaire (CBCB) émet des recommandations connues sous le nom d'accords de Bâle. Le premier est publié en 1988. L'idée principale est de mettre un montant minimum de fonds propres face aux actifs engagés. Bâle II (2004), Bâle 2,5 (2009) et Bâle III (2010) vont introduire la prise en compte du risque sur le marché (Risk Weight Assets).
C'est Angela Merkel qui a introduit le Fonds Monétaire International (FMI) dans l'Eurozone. En mars 2010, la chancelière allemande a exigé son implication dans le plan de sauvetage de la Grèce. Une condition qu'elle a imposé à ses partenaires européens. Depuis, il s'est installé en Irlande, au Portugal et en Italie.
En août 2011, les pays de l'Eurozone comptaient pour 44% des prêts en cours du FMI. Les pays européens ont fait passer le FMI du statut de «prêteur des pays du tiers-monde» à celui de «prêteur des pays les plus industrialisés.»
L'intervention du FMI résulte de multiples raisons. D'abord, parce que le FMI a une longue expérience dans la gestion de crise et dans la restructuration des budgets des États. Ensuite, parce que le FMI dispose également de moyens financiers importants qui proviennent des contributions de 187 Etats. Autre avantage pour les États européens et notamment l'Allemagne, le principe de «conditionnalité.» Lorsque le Fonds prête, il exige en échange des cures d'austérité drastiques.
Recourir au FMI a permis aux chefs d'Etat et de gouvernement de l'eurozone de ne pas devoir se trouver en première ligne pour imposer le vote de plans d'austérité aux parlements des pays secourus. Vérifier, avant chaque versement d'une nouvelle tranche de prêts, que les mesures demandées ont bien été appliquées, fait partie de ses procédures normales. Si ce n'est pas le cas, l'argent n'est pas versé. Parfois même, le Fonds exige de nouvelles mesures s'il juge les efforts insuffisants. Les Etats emprunteurs sont pieds et poings liés.
Le FMI dans le groupe de Francfort
Depuis le sommet de l'Eurozone du 21 juillet 2011, Christine Lagarde,directrice générale du FMI, est partie prenante des négociations européennes. En septembre, elle appelle les gouvernements de l'UE à recapitaliser les banques européennes. Une intervention qui a suscité de nombreuses critiques.
Christine Lagarde participe également aux réunions du très fermé groupe de Francfort, sorte de «super élite» politique aux commandes de la zone euro depuis sa création lors du pot de départ de Jean-Claude Trichet le 19 octobre.
Le FMI n'est pas près de sortir du jeu européen. L'accord conclu lors du sommet européen du 9 décembre prévoit le renforcement de ses capacités d'intervention à hauteur de 200 milliards d'euros par les pays de l'Union Européenne. L'objectif est de lui fournir les moyens de s'impliquer davantage la crise de l'eurozone.
Jessica Trochet / Brice Lambert
A sa naissance en 1999, l’euro valait 1,17 dollar. Fin 2011, il s’échange à 1,33 dollar. Entre temps, le cours de la monnaie commune à 17 pays de l’Union européenne s’est envolé en 2008 pour atteindre 1,6 dollar en juillet, au plus fort de la crise grecque. Alors que l’éclatement de la zone euro est régulièrement évoqué dans les médias, cette monnaie reste forte face au dollar et au yuan sur le marché des devises. Pourquoi ?
La crise de la dette de certains pays de la zone euro n’est pas la crise de l’euro. Paul Atkinson, ancien économiste à l’OCDE, relativise le poids des pays en difficultés : « L’euro est une monnaie basée sur l’économie de 17 pays.» D’un côté, il y a la Grèce, le Portugal et l’Irlande qui sont plus fragiles, mais ces pays ne représentent que 6,3 % du PIB de la zone euro. C’est environ quatre fois moins que l’Allemagne qui, à elle seule, totalise 26 % du PIB de la zone (1).
L’euro reste une alternative crédible au dollar. Si certains pays de l’union européenne sont lourdement endettés, la situation n’est pas meilleure aux Etats-Unis. En septembre, la dette publique totale dépassait 14 000 milliards de dollars, soit plus de 100% du PIB. Plusieurs Etats comme le Minnesota ou la Californie ont frôlé la faillite. En comparaison, la dette publique de la zone euro représentait 87 % du PIB au deuxième trimestre 2011(2).
L’ex-directeur de la Banque centrale européenne Jean-Claude Trichet a fait de la lutte contre l’inflation sa priorité. Une politique qui semble reprise par Mario Draghi, le nouveau directeur de la banque. En septembre 2011, l’inflation de la zone euro restait modérée à 3 % selon Eurostat. Un chiffre qui rassurerait les investisseurs. Aux Etats-Unis, la Réserve fédérale a développé la stratégie inverse. En novembre 2011, le taux directeur de la FED était six fois plus faible que celui de la BCE.
Eléa Francois
Paul Atkinson, économiste et ancien membre de l'OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques), explique la crise de confiance qui affecte la zone euro