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Quentin Lefrancois, étudiant à l’EM Business school

“J’étais confiné à Boersch, un village alsacien, dans la maison où j’ai grandi entre montagnes, champs et vignobles. J’avais une liste de choses à faire à la maison, puis j’ai relevé des réparations à faire au fur et à mesure. J’avais prévu de nettoyer les rigoles, puis j’ai retapé les escaliers et une fenêtre. Tous les trucs qui étaient pétés, je me suis dit 'c’est le moment'. Je regardais des tutos parce que faire à ma façon, ça m'aurait pris plus de temps. On a tout dans notre maison pour peindre, faire des travaux. Sinon, j’empruntais du matériel à mes grands-parents. Avant, je voulais faire du bricolage, mais je n’avais pas le temps, je repoussais. J’ai maintenant envie d’en faire plus.”

Arthur Neyer, étudiant chez OpenClassrooms

“J’étais confiné à Nordheim avec ma mère. J’ai installé un home cinéma avec de vieux matériaux et j’ai construit une enceinte bluetooth. Ça fait longtemps que je regarde des tutos sur Youtube et je connaissais bien les systèmes de son grâce à mes anciens cours en fac de physique. Je voulais faire une meilleure enceinte. Au fur et à mesure, ça se rapprochera de ce que je souhaite. Depuis que je suis déconfiné, j’utilise souvent mon home cinéma et mon enceinte. J’aimerais en faire pour les autres parce que le partage, c’est ce qui m’a le plus manqué pendant ce confinement.''

Leïna Magne
Laura Poli

Intervention d'Éric Bothorel, député de la 5e circonscription des Côtes d’Armor, à la tribune de l'Assemblée nationale lors de la présentation de la stratégie nationale de déconfinement par le gouvernement.

Et si les fidèles disposaient déjà d'offres télévisées ou radio (Kto TV, Radio Orient...), l’interactivité de réseaux comme Zoom ou Instragram rend possible les échanges entre eux, parfois pendant l’office, et offre un sentiment de communion collective. “On reçoit parfois jusqu'à 200 messages pendant les messes”, note Marc Jonas.

Quelles limites pour la religion sur les réseaux sociaux ?

Malgré le succès qu’ils rencontrent actuellement, les cultes en ligne ne peuvent se substituer aux rassemblements dans les édifices religieux. Comme le précise Jacqueline Lalouette, la religion est un système de pratiques et de croyances qui se vit en communauté : “Les fidèles ont trop souffert de ne pouvoir prier ensemble. Ils ne vont certainement pas remplacer les cérémonies habituelles par du virtuel.”

David Elie confirme. La synagogue est pour lui plus qu’un simple lieu de prière : “La knesset, c’est la maison du rassemblement, un lieu de vie, un lieu social où il y a des offices, des cours, le talmud thora, des conférences, des concerts, des réunions…” Prier à la mosquée permet également d’accomplir les bons gestes rituels tout en améliorant sa pratique religieuse, estime Kalilou Sylla : “Il faut privilégier les rencontres physiques. Avec le téléphone portable, il y a une barrière, des problèmes de connexion ou des retards possibles.”

“La pratique sur les réseaux sociaux est incomplète puisqu’il manque des éléments essentiels”, relève Isabelle Jonveaux. Certains rituels ne peuvent se faire qu’en présentiel, comme le sacrement de l’eucharistie chez les catholiques ou la toilette de purification du corps du défunt chez les musulmans et les juifs.

Les fidèles peuvent, depuis peu, retrouver le concret des rituels qui leur a manqué. Mais il faut réorganiser les offices, repasser du virtuel au réel. Préserver le collectif, tout en respectant les gestes barrières. Pour les croyants comme pour les religieux, l’heure est à la réinvention d’un culte soucieux des consignes sanitaires, sans être aseptisé pour autant. 

Rabie Farès s’exprime sur la spiritualité pendant le ramadan. Conséquence du confinement, les interventions prévues à la Grande mosquée de Strasbourg se déroulent sur Zoom et sont retransmises sur Facebook. © Page Facebook de la grande mosquée de Strasbourg

Chez les catholiques, la conversion au numérique a été en revanche unanime, “même dans les communautés traditionalistes et intégristes”, affirme Isabelle Jonveaux. 

Un terreau fertile

Les communautés religieuses étaient déjà présentes sur les réseaux sociaux mais le phénomène a été amplifié par la fermeture des lieux de culte. Comme le souligne Jacqueline Lalouette, ils n’étaient initialement pas utilisés pour “transmettre des cérémonies cultuelles” mais uniquement des petites informations relatives aux horaires des offices ou des émissions religieuses.

L'arrivée d’une nouvelle génération de religieux, utilisateurs au quotidien des réseaux sociaux, a également joué un rôle important dans la religion 2.0. Ils répondent ainsi à la forte demande d’un public jeune qui “passe spontanément par ces outils numériques pour partager leurs pratiques et interrogations”, souligne Isabelle Jonveaux. Sur Instagram ou Snapchat, de nombreux comptes dispensent par exemple conseils et rappels religieux. 

Le confinement a aussi poussé certains fidèles plus âgés vers les réseaux sociaux. C’est le cas de Jeanne Hess, 92 ans, qui réside à Bischoffsheim. Elle n’y voit que des avantages : “J’ai reconnu mon église et les gens que je connaissais déjà. J’étais heureuse de les voir, même à travers un écran.” “Avant, elle ne regardait la messe qu’à la télé. Désormais, elle se sent plus proche de la paroisse”, indique sa fille Nathalie Schott, qui l’a initiée à la messe en ligne.

Chez les protestants, à l’église Saint-Matthieu du Port-du-Rhin, la pasteure Bettina Cottin, après avoir créé une page Facebook et des groupes de prières sur Zoom, a pris les choses en main : “Nous avons même fait des formations de 20 minutes pour apprendre à certains fidèles à bien utiliser cette application !” 

L'utilisation des outils numériques pour la prière a cependant suscité des réserves de la part de certains fidèles et religieux. La question se pose surtout pour la communauté israélite, qui a fêté Pessah, la Pâque juive du 8 au 16 avril. “Il y a des différences qui relèvent de la théologie et du droit propre à chaque religion. On l’a particulièrement observé chez les juifs orthodoxes, très rétifs à l’usage d’outils numériques pour leur pratique religieuse alors que pour les libéraux il n'y a aucun problème”, analyse Jacqueline Lalouette, historienne spécialiste de l’histoire politique et religieuse. 

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