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Pourquoi certaines maisons alsaciennes sont-elles affaiblies ?
En Alsace, le bâti rural s’est extrêmement dégradé car on a fait de mauvais choix pour le rénover. Depuis une cinquantaine d'années, on a tendance à utiliser des matériaux industriels. On croit résoudre le problème, mais c’est seulement du cache-misère, parce que ça crée de nouvelles pathologies dans ces bâtiments. Par exemple, récemment, il y a eu beaucoup d’isolations thermiques de ces bâtisses. Mais ça a été fait depuis l’extérieur, avec la création d’une sorte d’enveloppe de polystyrène, qui empêche les transferts d’humidité et la respiration du bois, et altère le bâti.
Que faut-il privilégier dans ce cas pour être sûr de rénover efficacement ces maisons ?
Il faut surtout faire attention à utiliser les bons matériaux. Tous ceux qui sont biosourcés [issus de la biomasse d'origine animale ou végétale, NDLR], sont adaptés au bâti ancien. Les matières naturelles comme le bois, le torchis et la pierre sont idéales. Car, à l’origine, les maisons alsaciennes sont très résilientes, et fabriquées avec des matériaux locaux, ce qui leur permet, en plus, d’être très écologiques, avec un très faible impact carbone. En fait, la question de consommer des produits locaux et de qualité se retrouve aussi dans le bâti !
Pourquoi tous les artisans n’utilisent pas ces matériaux, s’ils sont plus pérennes ?
Parce qu’avec l’utilisation de matériaux industriels, il y a l’idée de se faciliter la vie. C’est un peu comme si on comparait un restaurateur qui fait son marché pour acheter des bons produits et un restaurateur qui va dans une grande enseigne et achète des plats tout prêts, à réchauffer. Et puis, au-delà de ça, je pense qu’il y a aussi une forme de méconnaissance, mêlée à du lobbying. Les entreprises sont souvent formées à utiliser du matériel industriel.
Faut-il craindre pour l’avenir des maisons typiques du centre de Strasbourg ?
Ce sont surtout les bâtis ruraux qui sont menacés. La rénovation des bâtisses strasbourgeoises a été un peu plus surveillée parce que certaines parties du centre-ville, comme la Petite France, sont des secteurs sauvegardés et protégés. Quand il s’agit de travailler sur des bâtiments historiques, on fait appel à des personnes qui ont les bonnes formations et le bon matériel. La connaissance qu’on a sur le bâti ancien classé patrimoine historique ne devrait pas se limiter aux grands monuments. Il devrait être valable aussi pour le bâti ancien commun.
Alix Woesteland
C’est un endroit qu’on ne trouve pas au premier coup d'œil. Située rue Adèle Riton, entre la place de Haguenau et la gare de Strasbourg, la Boîte à musique apparaît à ceux qui aiment lire les petits écriteaux des portes d’entrées… Et osent sonner. Une fois dans l’immeuble, il faut encore descendre quelques marches pour pénétrer dans cette "fabrique de musique", comme aime la nommer Romain Jean, le propriétaire. "Ici, on fait de la répétition musicale, présente-t-il, des musiciens de tout niveau viennent pour jouer parce qu’ils ne peuvent pas faire de bruit chez eux."
Dans ce petit local aux couleurs vives, tout est fait pour les passionnés de musique. "Je dispose de huit salles. Toutes sont équipées de batterie, de sono et d’amplis et trois d'entre elles ont un piano droit", détaille le septuagénaire en ouvrant tour à tour les portes du local pour dévoiler toutes ses pièces. Dans la première, un professeur donne un cours de guitare. La deuxième abrite un jeune d’une vingtaine d’années, plongé dans le noir, car dit-il, "c’est mieux pour se concentrer sur le chant". En salle 5, un petit groupe de trois hommes répète quelques morceaux rock. Tout au fond du couloir, un homme tape frénétiquement sur la caisse claire. L’ensemble pourrait paraître cacophonique. Mais Romain Jean a pensé à tout : "Toutes les pièces sont traitées acoustiquement". Seules quelques portes mal fermées laissent entendre des bruits d’ampli mal réglé et des sons de grosse caisse.
Réglé comme du papier à musique
"Ça se passe très bien, se réjouit le propriétaire, on se fait confiance." Le système est simple : les musiciens achètent un carnet de tickets et viennent jouer quand ils le veulent. Une heure d'entraînement vaut un ticket. Et un ticket, quelques euros. "Les groupes doivent réserver, mais ont la priorité sur les personnes seules. C’est plus difficile pour eux de trouver un endroit où répéter", précise le gérant. Pas de liste d’attente : “En temps normal, on est ouvert tous les jours, même le dimanche, de 8 h 30 jusqu'à minuit, voire plus. Mais avec le couvre-feu, je dois fermer à 18 h." Romain Jean peut tout de même compter sur les habitués pour s’en sortir malgré les restrictions sanitaires. "Je suis connu, j’ai une bonne clientèle. Avant la pandémie, je voyais environ 160 personnes par jour. La porte d’entrée s’ouvre des milliers de fois par semaine, calcule-t-il. Je sais aussi que dès que les conditions seront de nouveau réunies, il y aura du monde. À la fin du premier confinement, j’ai retrouvé tous les passionnés."
Le bon timing
Aficionado de musique, Romain Jean, l’est lui-même : "Plus jeune, j’étais saxophoniste. Puis je me suis mis à la batterie." Il y a dix ans, il est passé du petit siège des percussions à celui du bureau situé à l’entrée des lieux. "Je me rendais ici pour prendre des cours. Un jour, le directeur de l’école a décidé de vendre les locaux", raconte-t-il. Lui travaillait à l’époque comme voyageur représentant placier. "Comme ma retraite arrivait et que je ne voulais pas rester sans rien faire, j’ai décidé de les racheter et de les aménager en lieu de répétition", poursuit-il. Accueillir le bruit des instruments, se rendre aux concerts de ses clients, partager son amour de la musique… Romain Jean a enfin trouvé son violon d’Ingres.
Marie Vancaeckenbergh
Depuis 10 ans, ces studios de répétitions tenus par Romain Jean permettent aux musiciens strasbourgeois de jouer en paix.
Le bâti rural traditionnel Alsacien est-il menacé à long terme ? C’est un cri d’alarme que lancent Jean-Christophe Brua, architecte du patrimoine depuis une quinzaine d’années et l’Association pour la Sauvegarde de la Maison Alsacienne (ASMA). Il alertent sur les mauvaises réparations qui altèrent ces bâtiments, au lieu de les sauvegarder, et proposent tous les mois des tables rondes pour que les propriétaires de ces bâtisses puissent poser leurs questions à des artisans et professionnels de la question.
Les maisons alsaciennes sont-elles menacées ? Jean-Christophe Brua, architecte du patrimoine depuis une quinzaine d’années et l’Association pour la Sauvegarde de la Maison Alsacienne (ASMA) alertent sur les mauvaises réparations qui altèrent ces bâtiments.