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Papa est sataniste

Fin juin 2021, le Royaume-Uni sortira du Règlement général sur la protection des données, qui encadre le traitement des données personnelles des citoyens européens. Les eurodéputés appellent la Commission à se montrer vigilante dans la négociation d'un nouvel accord.

Les eurodéputés ont interpellé, jeudi 20 mai, la Commission européenne sur la question des transferts d'informations personnelles vers le Royaume-Uni. « Les données personnelles, c'est la devise de notre époque », a affirmé l'eurodéputée allemande Katarina Barley (S&D, sociaux-démocrates). La protection des données en ligne est devenue un enjeu politique et économique majeur. C'est pourquoi les parlementaires s'inquiètent des conditions de résolution d'un problème ouvert par le Brexit : celui de la régulation des échanges de données personnelles entre l'Union européenne et le Royaume-Uni.

Avant le 30 juin 2021, date de sortie des Britanniques du Règlement général sur la protection des données (RGPD), il faut avoir mis en place une "passerelle" pour que les données des citoyens européens et britanniques continuent à circuler sans encombre. Il appartient à la Commission de décider du maintien des échanges et de ses conditions. L'exécutif européen s'apprête donc à passer une "décision d'adéquation" envers le Royaume-Uni. En d'autres termes, il s'agit de considérer que la législation britannique est similaire aux standards européens en termes de sécurité des informations personnelles.

Mais les eurodéputés incitent à plus de prudence : le niveau de protection des données personnelles des citoyens européens au Royaume-Uni n'est pas suffisant selon eux. Ils craignent notamment que ces données ne soient pas suffisamment protégées d'une potentielle surveillance de masse de la part des autorités britanniques. De plus, les accords bilatéraux du Royaume-Uni avec des pays tiers inquiètent les eurodéputés. Selon eux, ils pourraient, à terme, provoquer une perte de contrôle sur le devenir des données européennes.

Au-delà des lacunes de la législation britannique, le Parlement souligne également la manque de solidité juridique du possible accord avec le Royaume-Uni. À l'été 2020, la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) a annulé la décision d'adéquation passée entre l'Europe et les États-Unis, estimant insuffisante la protection par rapport aux services de renseignement américains. La jurisprudence fixe ainsi des standards élevés pour la sécurisation des informations. L'eurodéputée estonienne Marina Kaljurand (S&D, sociaux-démocrates) craint que la décision d'adéquation avec le Royaume-Uni soit elle aussi « rejetée par la Cour de justice de l'Union européenne. Nous nous retrouverions dans la même situation qu'avec les États-Unis. »

Face aux inquiétudes des parlementaires, la Commission répond qu'elle a prévu des garde-fous. « Le fait que la Commission ait inclu une "clause couperet" dans la décision d'adéquation montre qu'elle est consciente qu'elle doit surveiller ce qui se passe », rassure le Contrôleur européen de la protection des données Wojciech Wiewiórowski, « si elle trouve quoi que ce soit qui suggère que la différence entre le système britannique et le système européen devient de plus en plus grande, alors la décision devrait être abolie. »

Emma Bougerol

A Bruxelles, le débat sur l’accès des pays les plus pauvres au vaccin contre le Covid-19 a été dominé par la question de la levée des brevets, qui a profondément divisé les eurodéputés.

La campagne de vaccination monte en puissance dans le monde, pour atteindre le milliard et demi de doses administrées. Mais obtenir des vaccins reste « un privilège réservé aux pays qui peuvent les produire ou aux plus riches » pour reprendre les mots de l’eurodéputée belge Kathleen Van Brempt (S&D, sociaux-démocrates). Ce 19 mai, le Parlement européen s’est entendu sur un besoin de solidarité avec les pays les plus défavorisés pour faciliter leur accès aux vaccins. Mais la manière d’y parvenir a divisé les eurodéputés. Le principal point d'achoppement a été la proposition de lever les brevets des vaccins, détenus par les laboratoires pharmaceutiques. Défendue publiquement par le Président américain Joe Biden au début du mois de mai, cette idée controversée s’est logiquement imposée dans le débat européen. 

La propriété intellectuelle des laboratoires, source du désaccord

Les eurodéputés favorables à la levée des brevets sont convaincus que les capacités de production sont opérationnelles dans plusieurs pays dotés d’usines pharmaceutiques, comme l’Inde ou le Bangladesh. « Mais le problème est qu'ils se voient refuser des licences pour produire davantage », déplore Philippe Lamberts (Verts/ALE, écologistes). Pour Manon Aubry (GUE/NGL, extrême-gauche), il faut « reprendre le contrôle sur les conditions imposées par les laboratoires ». L’ONG Oxfam regrette, par ailleurs, que le vaccin ait permis à neuf dirigeants de laboratoires de devenir milliardaires. L’organisation s’en remet à la société civile pour que la Commission européenne se saisisse du sujet : « 150 000 signatures pour notre pétition. A un million, les Commissaires devront présenter un acte législatif sur la levée des brevets », explique Sandra Lhote-Fernandes, responsable plaidoyer santé de l’ONG.  

Pour d’autres eurodéputés, pour la majorité de groupes de droite, la levée des brevets n’est pas la solution pour intensifier la diffusion du vaccin dans le monde. Elle risquerait en effet, selon eux, de mettre en péril les Biopharma allemandes, au cœur de la conception des vaccins Arn-messager. « Si les règles du jeu changent en cours de route, les laboratoires ne prendront plus de risques pour fabriquer des médicaments », alerte l'eurodéputé français Geoffroy Didier (PPE, centre-droit). Ces arguments convergent avec la position des laboratoires. « Ce serait une menace pour l’innovation dans le futur », estime ainsi Leem, le syndicat européen du secteur. Autre inquiétude : la maîtrise de technologies de haut-niveau pour produire les vaccins, sans l’aide des laboratoires qui les ont conçus.

Pour être solidaires avec les pays moins riches, les détracteurs de la levée des brevets estiment que l’urgence reste d’intensifier la production, et l’exportation de vaccins. Chrysoula Zacharopoulou (Renew, libéraux) souligne ainsi que l’Union européenne n’a pas « à recevoir de leçons de solidarité » de Joe Biden, en rappelant que les 27 ont déjà exporté la moitié des doses produites sur leur sol, soit près de 200 millions d’unités. De son côté, la Commission européenne, par son vice-président Valdis Dombrovskis « invite les pays développés à mettre en commun leur production », le regard tourné vers les Etats-Unis qui ont jusqu'à présent drastiquement limité leurs exportations.

Maryline Ottmann

Le Parlement européen a rejeté une résolution sur l’impact du changement climatique sur les populations vulnérables des pays en développement. La proposition de "passeport climatique" est apparue comme le principal point de discorde.

Mercredi 19 mai, les parlementaires européens ont rejeté le rapport de Monica Silvana Gonzalez (S&D, sociaux-démocrates) qui appelait à une meilleure prise en compte des enjeux environnementaux dans la politique d'aide au développement de l'Union européenne. Tout laissait présager que celui-ci allait être adopté mais un flot d’amendements a tant modifié le texte que celui-ci a finalement été rejeté.

L'objectif initial du rapport était de soutenir davantage les dispositifs participant spécifiquement à la lutte contre le changement climatique dans les programmes européens de coopération extérieure. Dans ce sens, il appelait à une augmentation du budget alloué à l'aide au développement des pays les plus défavorisés, en accord avec les engagements pris dans le cadre de l’accord de Paris. Mais c’est une autre mesure envisagée, la reconnaissance du statut de déplacé avec l’instauration d’un passeport climatique, qui a cristallisé les tensions.

Pour Monica Silvana Gonzalez (S&D, sociaux-démocrates) qui portait le texte, il s’agissait « d’une mesure de protection temporaire qui aurait permis des voies migratoires légales et sûres pour les personnes victimes de catastrophes naturelles ». Une proposition controversée qui a été torpillée par l’adoption d’un amendement à l’initiative des groupes de droite. La nouvelle version du texte faisait passer à la trappe la question migratoire mais insistait davantage, à l'inverse, sur le besoin de maintenir les personnes dans leur pays d'origine.

Alice Kuhnke (Verts/ALE, écologistes) n’a pas masqué sa déception et a fustigé ces amendements au rapport initial : « les partis conservateurs ont décidé de voter pour l’inaction », estime-t-elle. « Le texte que nous avions sur la table aujourd'hui était trop faible. Ce processus a été une occasion manquée mais nous reprendrons le combat. »

Hadrien Hubert

 

Le Parlement européen souhaite favoriser le développement d'une migration de travail légale à l'échelle du continent.

Donner une image positive de la migration économique légale, telle est l’ambition principale du rapport adopté par le Parlement européen le mercredi 19 mai. « Pendant la période du Covid-19 de très nombreux travailleurs de première ligne étaient des travailleurs étrangers. Comment nos sociétés auraient pu traverser ces épreuves sans leur présence ? », fait mine de s'interroger l'eurodéputée française Sylvie Guillaume (S&D, sociaux-démocrates) qui a porté le rapport.

Celui-ci souligne la nécessité pour certains pays d’embaucher des travailleurs à l'étranger pour faire face au vieillissement de la population et au manque de main d’œuvre dans certains secteurs clés.  Son objectif est aussi de lutter contre les migrations irrégulières qui conduisent de nombreux réfugiés à risquer leur vie pour rejoindre l’Europe. Parmi les propositions phares des eurodéputés, figure ainsi la création d'un « réservoir de talents » qui permettrait de faciliter l'intégration de travailleurs migrants qualifiés au marché du travail de l’Union européenne.

Actuellement la régulation de la migration de travail relève de la compétence des États. Les députés demandent à la Commission européenne de mettre en place un cadre législatif commun à l'échelle européenne. « Le rapport appelle à l'élaboration d'un code européen des migrations harmonisé qui simplifiera les procédures pour les travailleurs migrants et fera en sorte qu'ils ne soient pas confrontés à vingt-sept procédures fragmentées sur le continent. », explique l’eurodéputé allemand David Boeselager (Les Verts/ALE, écologistes). Des propositions auxquelles se sont opposées les souverainistes. Pour l’eurodéputé français Gilles Lebreton (ID, extrême droite), « l’immigration est une anomalie quand elle n’est pas consentie par les pays d’accueils. »

Pour les députés libéraux, socialistes, écologistes et de la gauche anti-libérale en revanche ce rapport doit être suivi d'effets. « Nous espérons que la Commission reprendra nos idées dans son nouveau paquet "Talents et compétences" », insiste Damien Boeselager. Les propositions de la Commission devraient être connus en décembre 2021.

Claire Blondiaux

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