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« Le projet épouse le bâti existant sans le dominer ni l'écraser, répond Philippe Godin, qui a déjà mené à bien deux projets dans le quartier, rue des Jardiniers. Il n'est pas plus haut et laisse une part importante aux jardins. Il n'est en revanche pas question d'imiter l'architecture de la rue, au risque d'en faire un pastiche, un parc Disney... »

 

Le bras de fer est donc engagé entre les deux camps. Aucun dialogue n'a pour l'instant eu lieu entre le promoteur et les riverains. « Il y aura achat du promoteur seulement si le permis définitif est donné. Mais avec tous les recours et procédures possibles, ça peut durer des années », prévient Stéphane Meyer. « Les travaux démarreront dans un certain temps mais il démarreront car on ne peut pas s'opposer à un projet privé si celui-ci respecte l'intégralité des règles d'urbanisme », clame l'entrepreneur strasbourgeois. D'ici là, le jardin du 12 rue du Parc reste en friche, entourant la maison de mauvaises herbes.

 

Loïc Bécart

Lui et ses camarades ont dès le printemps 2012 plaidé leur cause à la mairie de Strasbourg pour un classement de la rue. Ils pensaient avoir été entendus mais l'affichage du permis de construire, en juin dernier, a été pour eux une surprise. « Quand un projet comme celui-ci est conforme aux règles d'urbanisme, on l'accepte », tranche un employé de la police du bâtiment, proche du dossier.

 

« Ne pas faire de parc Disney »

 

Pas moins d'une dizaine d'habitants ont déposé un recours gracieux auprès de la municipalité pour le voir annuler : tous ont été rejetés fin août. Ils ont maintenant jusque fin octobre pour effectuer des recours contentieux devant le tribunal administratif. Ils comptent bien y faire valoir leurs arguments et avancer leur leitmotiv : défendre la cohérence architecturale de la rue du Parc. « Les travaux ont été autorisés pour un bâtiment à toiture métallique, or ici personne n'a de toit comme ça », avance Stéphane Meyer, lui-même ancien avocat dans l'immobilier.

Peur de voir la population doubler

Elle a en effet préféré faire confiance au promoteur strasbourgeois Philippe Godin, et sa société immobilière Greenstone. « Les propriétaires vendeurs de l'ensemble 12 rue du Parc ont d'abord été démarchés directement par certains riverains, dont un "marchand de bien" habitant la rue voulant faire un "coup financier", raconte le professionnel de l'immobilier. La famille les a éconduits pour l'unique raison du prix jugé très faible par rapport à la valeur de l'ensemble. Elle a accepté de me vendre l'ensemble car j'en proposais un prix raisonnable et je sauvegarde la maison et la rénove. »

Le projet « Jardin secret 3 » prévoit ainsi un immeuble de trois étages construit sur le jardin attenant à la maison, avec huit appartements de 69 à 109 m2, ainsi que trois nouveaux logements dans la bâtisse originale. « Ce qui ferait doubler la population de la rue », s'inquiète Stéphane Meyer, en première ligne parmi les voisins frondeurs.

Un projet immobilier cristallise la colère des riverains de la rue du Parc. Leur crainte : que leur environnement soit dénaturé. Ils ont décidé de contester le permis de construire devant le tribunal administratif.

Impossible d'y échapper. Devant la plupart des maisons de la rue du Parc, un même panneau annonce la couleur : « Non à la destruction de l'environnement de la rue du parc et de la rue Adler, non à la suppression d'un jardin pour bétonner le 12 rue du parc ».

 

Car c'est bien cette maison, faisant aujourd'hui l'objet d'un projet immobilier, qui mobilise les riverains. Il y a deux ans, la propriétaire de la bâtisse, conçue comme les autres maisons de la rue par l'architecte Oberthur, est décédée. Les voisins ont alors eu recours à une tradition : trouver un nouvel occupant l'habitation, pour être sûrs qu'elle soit conservée en l'état. Ils sont tombés sur un os. « On a dit à l'héritière qui voulait s'en débarrasser : "dites-nous combien vous voulez la vendre, on vous trouvera un acheteur", se souvient Stéphane Meyer, résidant juste en face du bâtiment. Elle a refusé, arguant que seul son notaire avait le droit de le faire. »

Si le projet passe l'obstacle des procédures, un immeuble de trois étages s'élevera à côté de la maison. La nouvelle construction ne devrait pas dépasser la hauteur de la vieille habitation, d'après le promoteur Philippe Godin. (Crédit : F.D. / CUEJ)

Ici devant le 12 rue du Parc, Stéphane Meyer est un des plus farouches opposants au projet immobilier. (Crédit : F.D. / CUEJ)

Impossible d'y échapper. Devant la plupart des maisons de la rue du parc, un même panneau annonce la couleur : « Non à la destruction de l'environnement de la rue du parc et de la rue Adler, non à la suppression d'un jardin pour bétonner le 12 rue du parc ».

 

Car c'est bien cette maison, faisant aujourd'hui l'objet d'un projet immobilier, qui mobilise les riverains. Il y a deux ans, la propriétaire de la bâtisse, conçue comme les autres maisons de la rue par l'architecte Oberthur, est décédée. Les voisins ont alors eu recours à une tradition du secteur : trouver un nouvel occupant à l'habitation, pour être sûrs qu'elle soit conservée en l'état. Ils sont alors tombés sur un os. « On a dit à l'héritière qui voulait s'en débarrasser : " dites-nous combien vous voulez la vendre, on vous trouvera un acheteur ", se souvient Stéphane Meyer, résidant juste en face du bâtiment. Elle a refusé, arguant que seul son notaire avait le droit de le faire. »

 

Peur de voir la population doubler

 

Au final, la proposition retenue a été celle de Philippe Godin, et sa société immobilière Greenstone. « Les propriétaires vendeurs de l'ensemble 12 rue du parc ont d'abord été démarchés directement par certains riverains, dont un " marchand de bien " habitant la rue et voulant faire un " coup financier ", raconte le professionnel de l'immobilier. La famille les a éconduits pour l'unique raison du prix jugé très faible par rapport à la valeur de l'ensemble. Elle a accepté de me vendre l'ensemble car j'en proposais un prix raisonnable et je sauvegarde la maison et la rénove. »

 

Le projet « Jardin secret 3 » prévoit ainsi un immeuble de trois étages construit sur le jardin attenant à la maison, avec huit appartements de 69 à 109 m2, ainsi que trois nouveaux logements dans la bâtisse originale. « Ce qui ferait doubler la population de la rue », s'inquiète Stéphane Meyer, en première ligne parmi les voisins frondeurs. Lui et ses camarades ont, dès le printemps 2012, plaidé leur cause au près de la mairie de Strasbourg pour un classement de la rue. Ils pensaient avoir été entendus mais l'affichage du permis de construire, en juin dernier, a été pour eux une surprise.

 

« Pas faire de parc Disney »

 

Pas moins d'une dizaine d'habitants ont déposé un recours gracieux auprès de la municipalité pour le voir annuler : tous ont été rejetés fin août. Ils ont maintenant jusque fin octobre pour effectuer des recours contentieux devant le tribunal administratif. Devant celui-ci, ils comptent bien faire valoir leurs arguments et avancer leur leitmotiv : défendre la cohérence architecturale de la rue du parc. « Le propriétaire du 10 a voulu construire un conduit de cheminée pour sa maison mais l'autorisation lui a été refusée : cela aurait nuit à l'homogénéité du quartier, notamment par rapport à une grille qui est classée monument historique, explique Stéphane Meyer, lui-même ancien avocat dans l'immobilier. Pour le 12, les travaux ont été autorisés pour un bâtiment à toiture métallique, or ici personne n'a de toit comme ça ! »

 

« Le projet épouse le bâti existant sans le dominer ni l'écraser, répond Philippe Godin, qui a déjà mené à bien deux projets dans la quartier, rue des jardiniers. Il n'est pas plus haut et laisse une part importante aux jardins. Il n'est en revanche pas question d'imiter l'architecture de la rue, au risque d'en faire un pastiche, un parc Disney... »

 

Le bras de fer est donc engagé entre les deux camps. Aucun dialogue n'a pour l'instant eu lieu entre le promoteur et les riverains. « Il y aura achat du promoteur seulement si le permis définitif est donné. Mais avec tous les recours et procédures possibles, ça peut durer des années », prévient Stéphane Meyer. « Les travaux démarreront dans un certain temps mais il démarreront car on ne peut pas s'opposer à un projet privé si celui-ci respecte l'intégralité des règles d'urbanisme », clame l'entrepreneur strasbourgeois. D'ici là, le jardin du 12 rue du parc reste en friche, entourant la maison de mauvaises herbes.

 

Loïc Bécart

Tous les mardis au Café de l'emploi, une poignée d'habitants viennent chercher une aide pour se réinsérer professionnellement et socialement.

Le centre social et culturel Au-delà des ponts accueille chaque mardi matin « les chemins vers l'emploi », un rendez-vous où les chômeurs peuvent bénéficier d'un soutien diversifié. Ce moment offre un petit condensé de la vie de ce territoire enclavé qui compte 34% de chômeurs.

Il est 9 heures au local du centre social et culturel Au-delà des ponts, au cœur du quartier du Port du Rhin. Comme chaque mardi depuis 2008, le centre propose ses «chemins vers l'emploi », en partenariat avec Reforme - Regroupement, formation, emploi- et l'OPI -Orientation, prévention, insertion. « Il y a en moyenne 5 ou 6 participants en recherche d'emplois qui viennent du Port du Rhin ou de la cité de la Musau (cité du quartier du Neudorf ndlr), et nous sommes à peu près autant d'encadrants de diverses structures pour les accompagner », explique Odile Monneret, animatrice pour Reforme de ce rendez-vous convivial où l'on s'attable autour d'une tasse de café et d'un gâteau.

Cette semaine, les participants ont choisi de faire venir Sylvie Moosmann, chargée du recrutement pour Au Port'Unes, une entreprise d'insertion implantée dans ce quartier défavorisé qui emploie plus de 80 personnes pour des travaux de nettoyage et d'aménagement. Sylvie Moosmann évoque tout de suite les conditions pour bénéficier d'un de ces emplois, renouvelables tous les 4 mois pendant 2 ans si les intéressés « adhèrent au parcours » : il faut être disponible tôt le matin, savoir lire et écrire en français , être en bonne condition physique et ne jamais avoir bénéficié d'un emploi d'insertion. Elle est également très claire pour les personnes dépendantes à la drogue ou à l'alcool, « on se soigne d'abord, on travaille après ».

Aide aux démarches administratives

Jamila, Monique, Marie-Claude et Tahar écoutent avec beaucoup d'attention les propos de la chargée de recrutement. Ils sont intéressés par le job proposé. Jamial Tahar, un tunisien de 48 ans qui semble déterminé à tout faire pour trouver du travail au plus vite, s'agite. Il sort son CV, veut partir tout de suite à la CAF pour aller chercher sa feuille d’allocations et la ramener ici… Il se perd dans la paperasse, pendant que les éducateurs lui expliquent avec bienveillance que « tout va bien » et qu'il ne faut « pas se précipiter ». Après quelques minutes, il comprend que les choses sont plus simples ici, les démarches administratives allégées. Il semble satisfait : “Je pense qu’avec cette réunion, je vais trouver un emploi, parce que c’est bien organisé.”

Monique, 59 ans, ne comprend pas bien le sens d'un papier de la sécurité sociale, « ça veut dire que j'ai le droit de travailler ? ». Jamila, la quarantaine, s'inquiète, elle, de ne pas recevoir de réponse à sa demande de formation. Odile Monneret rassure calmement et avec le sourire ces deux habitantes du quartier et prend des nouvelles de l'évolution de leurs situations.

« Une place à chacun »

Alors que la réunion touche à sa fin, deux hommes se présentent à la réunion. L'un des deux formule une excuse incompréhensible qu'il répète en boucle. Julia Duplant, éducatrice à l'OPI, lui demande d'une façon à la fois douce et ferme de s'asseoir et d'attendre qu'on lui donne la parole. L'éducatrice semble avoir l'habitude de gérer ce type de situation, « savoir observer la situation des uns et des autres est l'une de nos missions. Nous devons faire en sorte de donner une place à chacun. »

Le problème du chômage au Port du Rhin n'est en effet pas seulement un problème d'emplois disponibles. Les professionnels doivent aussi s'attaquer à des difficultés d'ordre psychologiques et culturelles, dans un quartier où, comme l'explique un éducateur, « de nombreux jeunes qui ont grandi ici n'ont jamais vu leurs parents travailler ». Sylvie Moosmann évoque avec tristesse - cette femme de 39 ans est restée attachée à ce quartier dont elle est originaire - les échecs rencontrés par Au port'unes dans le recrutement des gens du quartier : « on a déjà salarié un membre de chaque famille du quartier (le quartier compte 1500 habitants ndlr) depuis 1993. Mais ça ne marche pas, ils ne vont presque jamais jusqu'au bout. Ils travaillent pour pouvoir sortir de prison ou pour toucher le chômage, puis ils arrêtent du jour au lendemain sans prévenir. »

Pour s'attaquer à ces blocage très enracinés, les encadrantes veulent « donner une place à chacun », « valoriser » les demandeurs d'emploi, leur donner confiance en eux, en leur capacité de travailler, les rendre autonomes. Il faut pour cela sortir du strict cadre de la recherche d'emploi. Elles misent beaucoup sur les activités culturelles et artistiques pour y parvenir. Bientôt, un professeur de lettres à l'université viendra diriger un atelier d'écriture. Elles souhaitent également amener les participants à la médiathèque Malraux. Elles ne sont pas encore parvenues à les convaincre.

Nathan Kretz
Loïc Le Clerc

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