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À cinq minutes de Strasbourg, la ville de Schiltigheim souhaite développer son activité touristique. Malgré les ambitions de la mairie, les commerçants peinent à croire en un potentiel lucratif.

 

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La maison d’hôte Au Merlenchanteur est classée au patrimoine historique.© Pierre Thevenet

“Nous essayons de faire de Schiltigheim une ville touristique. Elle a d’énormes atouts et du potentiel indépendamment de Strasbourg, s’exclame Éric Elkouby, employé au service du tourisme à la mairie de Schiltigheim. Son poste, créé il y a deux ans, atteste d’une apparente volonté de développer l’attractivité de la ville.

 

Pour l’heure, l’ancien député, accompagné de l’adjointe chargée du tourisme et du patrimoine, Andrée Buchmann, essaie d’organiser des projets pour attirer de potentiels touristes. Leur première initiative a été de réhabiliter l’ancienne Ferme Linck. Tous les week-ends, elle ouvre ses portes pour une exposition permanente sur le passé industriel de la ville. En deux ans, le site a attiré environ 600 visiteurs. Un démarrage timide, mais “sans avoir fait de publicité”, précise Danielle Dambach, la maire de Schiltigheim.

Développer le tourisme a aussi un coût. En témoigne la fermeture en juin dernier du Pixel Museum, seul musée de la ville, qui, malgré ses 75 000 visiteurs en trois ans, ne parvenait plus à rétablir son équilibre financier sans l'aide de la municipalité. L’inclusion de Schiltigheim dans l’Eurométropole l’empêche de profiter de certains financements de l’État. Notamment au titre du projet “Action cœur de ville”, mis en place en 2017 pour les villes moyennes ayant un potentiel d’attractivité touristique. Alain Kristofel, en charge du projet pour la ville de Haguenau, explique : “Schiltigheim n’aurait pas pu proposer sa candidature. Elle n’est pas indépendante de l’Eurométropole sur les problématiques de transport, de travail et d’habitation.”

Le Merlenchanteur, un exemple de réussite

 

Mélanie, propriétaire de la maison d’hôte Le Merlenchanteur, dans le vieux Schilick, avait déjà pour ambition de “montrer l’histoire de l’Alsace”, quand elle s’est installée voilà seize ans. Les touristes viennent loger chez elle pour vivre une immersion dans une maison typique à colombages. Même si la majorité de ses clients choisissent son gîte pour sa proximité avec Strasbourg, Mélanie a à cœur de faire découvrir Schiltigheim : “Quand les gens arrivent, je les envoie manger à Storig, au Cheval Blanc et au marché couvert des Halles du Scilt. La ville a une très belle offre de cuisine alsacienne. Et les plats sont bien meilleurs qu’à Strasbourg.”

Il est rare de croiser des touristes dans les rues de Schiltigheim. Difficile pour la deuxième ville de l’Eurométropole de se faire un nom à côté de l’ogre touristique strasbourgeois. Schilick a pourtant des atouts, dont un riche passé brassicole, peu exploité jusqu’ici.

Autrefois désignée comme “La cité des brasseurs”, Schiltigheim a vu ses cinq usines fermer les unes après les autres. Heineken, seule survivante, règne en colosse à l’entrée de la ville. La petite brasserie artisanale Storig, créée par un restaurateur strasbourgeois en 2005, contribue à perpétuer la tradition brassicole. Grâce à sa cuisine typiquement alsacienne et à ses visites guidées, elle réussit à attirer des amateurs de bière des villes alentour. Mais la brasserie, comme d’autres restaurants schilikois, peut aussi compter sur les sessions plénières du Parlement européen pour remplir ses tables. Un tourisme dit “corporate”, qui regroupe ponctuellement des groupes d’eurodéputés.

Que faire à Schilick ?

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© Laurine Jeanson et Pierre Thévenet

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Mélanie a souhaité garder une décoration alsacienne jusqu’à l’intérieur de la maison. © Pierre Thevenet

Des initiatives peu concluantes

 

Durant l’été 2019, la mairie a vainement essayé de rassembler les commerçants de Schiltigheim, lors d’une réunion pour “dynamiser l’activité touristique”. Le directeur de l’hôtel Le Forum, à l’entrée sud de la ville, se rappelle que peu de monde a répondu présent”. Pire, les commerçants s’accordent à dire “qu’il n’y a pas de visiteurs à Schiltigheim“. C’est le cas d‘Éric Ivens, nouveau propriétaire du Cheval Blanc, un restaurant situé dans la vieille ville. “Sur un mois, le nombre de touristes représente environ 2% de ma clientèle”, affirme-t-il. Les commerçants réussissent à faire tourner leurs entreprises uniquement avec la clientèle locale.

Eric Elkouby et Andrée Buchmann espèrent faire de Schiltigheim une place touristique. Développer cette activité prend du temps et l’employé en tourisme n’en a pas : “J’ai d’autres ambitions politiques pour l’avenir”, affirme-t-il. La maire Danielle Dambach l’assure, cette nomination s’inscrit dans un projet à long terme : “Si Éric doit partir, on trouvera quelqu’un d’autre.” Il reste encore du chemin.

Laurine Jeanson et Pierre Thevenet 

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