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Favoriser le dépôt de plainte

En France, seules 12% des victimes de violences sexuelles et 11% des victimes de violences conjugales ont déposé plainte en 20194. Selon Louise Battisti, elles ne sont que 5% de femmes à le faire dans les cas de harcèlement au travail. 30% en parlent uniquement à leur employeur. "Le problème est que les femmes ont très largement intériorisé qu’on ne les croirait pas, que porter plainte serait difficile", analyse Alice Debauche. Il existe un vrai enjeu autour de la formation des policiers. Des témoignages réguliers montrent que des plaintes ne sont pas enregistrées5. "Les fonctionnaires de police ont l’obligation de rediriger les victimes vers des associations après le dépôt de plainte”, comme le rappelle Nous Toutes 67. Or, ce ne serait pas systématiquement le cas, selon le collectif.

Sos Femmes Solidarité a longtemps mis en place ces formations. "Depuis trois ans, il faut répondre à des appels d’offres pour les mener, donc nous avons arrêté”, explique Thomas Foehrlé, directeur de l’association. Le CIDFF et l’organisme de formation Themis ont pris le relais. Un apport essentiel pour Françoise Bey : "Ce n’est pas toujours évident de faire parler quelqu’un, de l'écouter et de le mettre en confiance pour qu’il soit bien pris en charge et qu’il se sente en sécurité. Quand on comprend dans quelle situation une personne se trouve, on peut apprendre à la faire parler."

Accéder à des places en hébergement d’urgence ou en foyer n’est pas facile. Thomas Foehrlé en est persuadé : "Si on ouvrait un autre centre, du jour au lendemain il serait plein." "Le temps d’attente est parfois très long, regrette Claire Fritsch. Et puis, on pense trop souvent que c’est à la femme de partir, ce qui n’est pas toujours possible ou souhaitable. Les départs rapides présentent un risque de retour au domicile élevé. Souvent les femmes battues partent plusieurs fois avant de quitter définitivement le foyer conjugal", explique-t-elle. Le phénomène d’emprise de l’homme violent sur sa conjointe est très souvent négligé par les travailleurs sociaux "mieux formés sur l’aspect juridique", à en croire Claire Fritsch. Les retours au domicile peuvent être vécus comme des échecs par ces femmes et les rendre réticentes à redemander de l’aide. Pour Françoise Bey, "la question de l’hébergement est aussi un problème d'argent : il faut y mettre les moyens. Il va falloir regarder tous les locaux vides de l’Eurométropole pour voir ce que l’on peut en faire, en concertation avec l’État", appelle l’élue.

Dans certains cas, encore rares, le parcours se termine par la condamnation des auteurs de violences. En 2017, en France, 16 829 hommes et 730 femmes ont été condamnés pour violence entre partenaires7. Dans les cas de viols, 3% font l’objet d’un procès et seulement 1% débouchent sur une condamnation8.

Lola Breton et Léa Giraudeau

L’Institut national d’études démographiques (Ined) a réalisé en 2015, une enquête quantitative (intitulée Virage) portant sur les violences subies par les femmes et par les hommes. Elle a pour objectif de saisir les multiples formes de la violence et de l’aborder dans une perspective de genre.

2 Anonyme et gratuit, ouvert 7 jours sur 7 de 9h à 22h du lundi au vendredi et de 9h à 18h les samedi, dimanche et jours fériés.

3 L’homme devait être jugé par le tribunal de Strasbourg le 17 mars 2020. L’audience a été reportée à une date ultérieure en raison de l’épidémie du Covid-19.

4 2e état des lieux du sexisme en France, rapport du Haut Conseil à l’Egalité entre les femmes et les hommes, 2 mars 2020.

En 2018, l’étude “Paye ta plainte” réalisée par le collectif féministe Le Groupe F et le tumblr Paye Ta Police recueillait plus de 500 témoignages en dix jours, dont 91 % décrivaient une "mauvaise prise en charge". Surtout, dans 60 % des cas, les femmes disaient avoir "essuyé un refus ou avoir dû insister pour pouvoir porter plainte".

C’est le cas du centre Flora Tristan, géré par Sos Femmes Solidarité, et du centre d’hébergement et de réinsertion sociale géré par l’association Home Protestant.

La lettre de l’Observatoire national des violences faites aux femmes, n°13, Novembre 2018.

The Enliven Project.

Une liaison entre Entzheim et le Grand contournement ouest devrait sortir de terre en 2021, à hauteur de Duppigheim. Méconnu des villageois, ce projet suscite des craintes.

Les mobilisations contribuent ainsi au développement de structures d’accompagnement. Indispensables pour permettre aux victimes de s’exprimer à chaque étape d’un parcours qui va de la prise en compte de la parole à la plainte. Ces dispositifs sont toutefois perfectibles.

Donner la parole et l’écouter

Au niveau national, le numéro vert 39 19 est destiné aux femmes victimes de violences (au travail, conjugales, sexuelles, mariages forcés, mutilations sexuelles), à leur entourage et aux professionnels concernés2. Mais, comme le rappelle Claire Fritsch d'Osez le Féminisme 67, "ce numéro sert uniquement à orienter les victimes. Il n’est en aucun cas un numéro d’urgence. Il permet d’expliquer les démarches judiciaires et dirige vers les services de police pour porter plainte". Les femmes trouvent plus facilement une oreille attentive dans des collectifs locaux, C’est le cas d’Entendre, croire, agir, né lorsque trois employées de la maison des associations de Strasbourg ont porté plainte contre le directeur pour harcèlement sexuel, en mars 20193. Mais l’objectif du collectif dont est membre Louise Battisti n’est pas d’accueillir les victimes : "Quand on reçoit des femmes, on les réoriente vers le Planning familial, Sos Femmes Solidarités ou Viaduq 67", des associations constituées, stables et dont les moyens financiers sont plus conséquents. Ainsi, le Centre d’information sur le droit des femmes et des familles (CIDFF), le Planning Familial 67, le Mouvement du Nid et Sos Femmes Solidarités reçoivent chacun 15 000 euros de subventions municipales par an, sur la base d’un contrat d’objectif renouvelé tous les trois ans. "Cela permet à ces quatre structures à dimension étatique d’avoir une visibilité sur leurs financements, tandis que la mairie peut suivre les actions qu’elles mènent", explique Françoise Bey, adjointe au maire de Strasbourg chargée des droits des femmes et de l'égalité de genres. 

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