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C'est un réalisateur de cinéma aussi talentueux qu'énigmatique : en quarante ans, l'Américain n'a signé que six films, dont le dernier, "À la merveille", sort mercredi.

« À la merveille », un film de Terrence Malick (sortie mercredi 6 mars 2013), avec Ben Affleck, Rachel McAdams, Olga Kurylenko, Javier Bardem...

Même une Palme d'or ne l'a pas fait venir à Cannes en 2011, pour son film cosmique The tree of life. Il ne se montre jamais en public et les interviews qu'il accorde se comptent sur les doigts d'une main. Ni promotion, ni photos de tournage. Le cinéaste américain Terrence Malick, 68 ans, impressionne ses acteurs – en particulier Ben Affleck, qui joue dans son dernier film, À la merveille, qui sort mercredi – par ses connaissances, son talent et son humour.

Mais de nombreux membres de son équipe se posent la même question à la fin de chaque tournage : Quelle forme prendra le film sur grand écran ? Car l'homme est mystérieux et s'est construit un style cinématographique bien à part. Il est considéré par beaucoup de ses pairs comme un dissident et de nombreux spectateurs n'adhèrent pas à ses films, jugés trop métaphysiques.

L'amour, la foi, la grâce, la beauté. Autant de thèmes chers à ce réalisateur américain connu pour ses lents travellings et ses plans de nature immergée de lumière. Des blés rasés par le soleil, un bruissement de feuilles, une herbe qui oscille au vent, des ondes dans l'eau. Malick est devenu le maître du cinéma contemplatif.

Tous ses films précédents – on n'en compte que cinq – sont considérés comme des chefs d'oeuvre : La balade sauvage (1973), Les moissons du ciel (1978), La ligne rouge (1998), Le nouveau monde (2005), et The tree of life (2011). Vingt ans se sont écoulés entre son deuxième et son troisième film : Malick cultive la rareté, à la manière de génies comme Stanley Kubrick. Néanmoins, c'est un record de rapidité pour l'artiste, qui retrouve aujourd'hui les salles obscures après seulement deux ans d'absence.

Perfectionniste, il passe plusieurs années à préparer ses films. The tree of life était programmé pour le festival de Cannes 2010, mais fut repoussé à l'année d'après. Pour son réalisateur, son film n'était pas parfait. Il faut améliorer le montage et le mixage. C'est l'oeuvre de sa vie, le scénario étant né en 1970...

Dans l'un des synopsis qu'il envoie aux producteurs de ce film, il décrit le personnage principal comme « une âme perdue dans le monde moderne, qui cherche à saisir, parmi les scènes fugaces de l'existence, la permanence des choses ». Ne serait-ce pas là l'autoportrait du cinéaste ? Saisir l'instant est devenu l'essence même du cinéma de Terrence Malick : marches lentes dans le sable, mains glissées dans les cheveux, un regard, une larme...

Un éloge de la lenteur que le réalisateur-poète défend encore une fois dans À la merveille. Il a pour la première fois choisi de tourner en France, à Paris et au Mont-Saint-Michel – la fameuse « Merveille », un lieu entre ciel et terre qui exprime parfaitement sa pensée.

Il est des films qui changent le regard. Les oeuvres de Malick sont de ceux-là, à condition bien sûr d'y adhérer. Dans l'une de ses rares interviews, accordée à Yvonne Baby dans Le Monde en 1979, il confiait : « Les films peuvent provoquer de petits changements dans nos cœurs, des changements qui visent à vivre mieux, à aimer plus. »

Clément Lacaton

Photos : VidéoAFP (images de The tree of life)