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Pour la trentième année consécutive, la production de crémant d'Alsace est en hausse. Depuis 1990, elle a été multipliée par neuf.

Ce soir s'ouvre le salon des vins des vignerons indépendants de Strasbourg. Sur les 26 producteurs alsaciens présents, 25 proposent, sur leurs stands, du crémant d'Alsace, alors que les chiffres d'un nouveau record de vente sont tombés récemment. L'effervescent a toujours connu une augmentation de ses ventes d'une année sur l'autre. Les exportations, en croissance constante, en sont l'une des principales raisons.

Si le marché hexagonal est relativement stable depuis 2008, les exportations restent le principal levier de développement. Pour cela, une stratégie marketing d'expansion à l'étranger est progressivement mise en place. "Notre notoriété est grandissante, on y travaille, avance Olivier Sohler, directeur du Syndicat des producteurs de crémant d'Alsace, cela passe par des dégustations à l'étranger, le bouche à oreille, mais aussi par une présence sur certains événements, comme sur le podium du rallye WRC." Et cela marche : alors qu'elles représentaient 8% en 1990, les exportations approchent aujourd'hui 21% des ventes totales de Crémant.

Cette stratégie de développement à l'étranger porte notamment ses fruits en Belgique, en Allemagne et aux Etats-Unis, les trois premiers importateurs de l'effervescent alsacien. Si la consommation des pays limitrophes s'explique en grande partie par la proximité de la région – l'Allemagne est par ailleurs le premier consommateur de vins effervescents au monde – les exportations américaines ont grimpé cette année de 30%, notamment "grâce au taux de change dollar/euro avantageux cette année". Cependant, un producteur présent au salon tempère les bénéfices liés à cette situation : "A l'exportation, il faut brader les prix. Pour notre domaine, on vend la bouteille 9€ en France, et à peine 5€ à l'exportation".

"Le crémant marche vraiment parce que c'est un rapport qualité-prix plus qu'exceptionnel, notamment par rapport au champagne", s'enthousiasme Claude Weinzorn, du Domaine de l'Orient, présent au Salon. D'ailleurs, la croissance du crémant surpasse même celle du champagne. "Au niveau du volume, la Champagne est arrivée au maximum de la production", décrypte Nicolas Secondé.

Si la production en hectolitres de l'ensemble des vins d'Alsace est resté stable en 30 ans, celle du crémant a considérablement augmenté. Les autres vins d'Alsace connaissent, eux, une tendance divergente. Beaucoup plus fluctuante, leur production est en baisse depuis quelques années. Une donnée qui n'échappe pas à Nicolas Secondé, oenologue au sein de la maison de vins Arthur Metz : "Globalement, c'est toute la demande en vins effervescents qui est en constante hausse. Aujourd'hui on produit moins de vin tranquille (vin non pétillant) mais plus de crémant", affirme-t-il. Cette stratégie repose en grande partie sur le sol. Le vin tranquille est "essentiellement un vin de terroir". Or, le crémant d'Alsace se libère de cette contrainte : sa qualité dépend moins du sol que du processus de création. Ainsi, "sur des terroirs de moindre qualité, on peut se tourner vers le crémant, et en produire du très bon", souligne Nicolas Secondé.

Si l'ensemble de la surface viticole alsacienne est restée stable de 2006 à 2015, la part des terres de production du crémant est passée de 2852 à 3426 hectares sur la même période, soit une augmentation de 4% en à peine une décennie. Un chiffre qui témoigne de la reconversion de beaucoup de vignerons. "J'ai commencé la production de crémant en 1982, avec à peine 5% de la surface de mon exploitation. Aujourd'hui, ça atteint les 25%", affirme Jean-Christophe Lehner, du domaine Gilg.

Romain Boulho et Valentin Ehkirch