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Comment les témoins appréhendent-ils cette période aujourd'hui ?
Paul-Antoine Joanny et Jean Salomon ont fait des études de pharmacie. Le premier, Clermontois, à l'Université de Clermont-Ferrand. Le second, Strasbourgeois, à l'Université de Strasbourg repliée à Clermont. Les deux étudiants se lient d'amitié, Jean Salomon est hébergé par la famille Joanny. A la Libération, Paul suit Jean pour terminer ses études à Strasbourg et s'installe provisoirement chez les Salomon. Puis Jean épouse la sœur de Paul.
Regards croisés, recueillis à Clermont-Ferrand, la ville où ils vivent aujourd'hui, à 89 ans.
Jeudi 25 novembre 1943 : la rentrée universitaire a eu lieu quelques jours auparavant. Le Sondern Kommando et 200 hommes de la Luftwaffe encerclent les locaux. Ils vident les amphithéâtres de l'Université et rassemblent 1200 personnes dans la cour de l'avenue Carnot. Un lycéen de 15 ans et un enseignant, le professeur Paul Collomp, sont assassinés. Dans la cour, Georges Mathieu, chef résistant passé du côté des nazis, et Ursula Brandt, surnommée « la Panthère », font le tri parmi les universitaires. Jusqu'à l'été 1943, Mathieu a réalisé de faux papiers, notamment pour les exilés alsaciens. Les gens qui ont bénéficié de ses services seront enfermés à la prison du 92e régiment d'infanterie, où un nouveau tri est effectué.
Pierre Feuerstein raconte les problèmes de communication après la Libération entre ceux revenus de la France de l’intérieur et ceux restés en Alsace.
Avec la Libération de Strasbourg, le 23 novembre 1944, le retour de tous ceux qui s'étaient exilés devient possible. Ils découvrent une ville bombardée, leur appartement parfois vidé, les difficultés du ravitaillement, l'essence encore rare.
Ils retrouvent ceux qui sont restés en Alsace, avec lesquels il faut réapprendre à vivre. Pierre Feuerstein se souvient de la joie qu'il a ressentie, mais aussi de l'incompréhension à laquelle il a été confronté.
Près de soixante ans plus tard, Armand Utz se souvient de son trajet de l'Alsace à l'Auvergne.
« Au mois de mars 1942, j'ai été libéré après six mois, comme les autres camarades alsaciens français. Qu'est-ce qu'on va faire maintenant ? J'avais déjà envie de m'évader. Mais il fallait trouver un passeur. Ce n'était pas si facile. Ça ne se trouvait pas dans les journaux. (…) Il a donné l'ordre que je sois le 16 mai à Kirchberg à 5 heures. Je le trouverais à la ferme forestière. C'était un samedi. (...)
En montant à la ferme, voilà que deux gendarmes de frontière allemands nous arrêtent. « Qu'est-ce que vous faites ici ? ». Alors là on est perdus.(...) « Heil Hitler ! ». « Heil Hitler ! ». On voulait montrer qu'on était des nazis convaincus. Encore maintenant je ne comprends pas. On avait des sacs, de l'argent français, s'ils nous avaient fouillés, on aurait été pris. Ils nous croyaient de bons nazis. J'ai présenté ma fiche de démobilisation du RAD, du Reicharbeitdienst. Je leur ai dit qu'avant d'aller à l'université allemande, on voulait faire un tour dans les Vosges. Cinq minutes après on était chez le garde forestier. (...)
Après avoir été incorporé aux chantiers de jeunesse à Pont d'Ain, j'ai rejoint en mai 1943 l'université de Strasbourg à Clermont-Ferrand. C'était la seule université qui recueillait les Alsaciens. Là-bas on avait la carte d'étudiants et l'allocation de réfugiés. On était forcé d'y aller pour l'argent. Je suis arrivé là-bas très malade. (…) Je me suis inscrit à la faculté des lettres, et tous les mois je touchais mon allocation. Et là j'ai rencontré tous les Alsaciens qui étaient réfugiés là-bas depuis 39. »
Armand Utz, novembre 2011
La lettre de Mme Mariotte au recteur.
Gaston Mariotte et Jean Salomon racontent leur rôle dans la résistance auvergnate.