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A 55 ans, Ryszard Czarnecki n’avait jamais été inquiété politiquement avant cet incident. Cet ancien journaliste, député et ministre est élu au Parlement européen depuis 2004. Il est l’un des membres les plus influents du parti Droit et Justice (PiS, eurosceptique et conservateur), au pouvoir à Varsovie. Désormais ex-vice-président européen, il a déclaré mercredi à la télévision polonaise avoir « la conscience tranquille » et qu’il continuera à remplir son travail au service de son  pays. Quant à Róza Thun, elle est l’une des figures majeures de l’opposition polonaise au sein du parti PO (Plateforme civique, centre-droit). Elle affirme que, malgré des conflits récurrents, « c’est la première fois que de tels mots sont employés ».

Socialistes et Verts au soutien du PPE

Dans la semaine, les eurodéputés de tous bords ont multiplié les déclarations de soutien à Róza Thun. « L’Union européenne a été fondée pour rejeter le nazisme, la guerre et pour avoir un voisinage pacifique, a rappelé le président par intérim du groupe S&D (socialistes et démocrates), Udo Bullman. On ne peut pas tolérer d’avoir une terminologie nazie de la part des titulaires des plus hautes fonctions. » Philippe Lamberts, co-président des Verts, a reproché que, si « dans cet hémicycle tous les élus ici sont dignes de respect, lui n’a pas été à la hauteur ».

Dans l’attente d’un nouveau vice-président

Ryzard Czarnecki ne fait donc plus partie des quatorze vice-présidents. En revanche, il ne perd pas son mandat d’eurodéputé et pourra toujours siéger dans l’hémicycle. Son remplaçant sera élu lors de la prochaine session plénière, du 12 au 15 mars.

Le futur élu sera un membre de l’ECR, comme Czarnecki. « J’aurais aimé que le groupe ECR retire de lui-même M.Czarnecki de son poste de vice-président, indique le socialiste Udo Bullmann. Mais il n’y a pas de conflit. Nous sommes prêts à voter pour un autre candidat ECR. » Même son de cloche chez Manfred Weber, président du groupe PPE, qui a tenu à souligner que « ce n’est pas une mesure contre la Pologne ou le PiS. Il s’agit uniquement du comportement d’un individu ».

Mails et tracts pour influencer le vote

En début de semaine, Czarnecki a pourtant tout tenté pour essayer d’inverser la tendance. Dans un mail envoyé lundi à des centaines d’eurodéputés dans les 24 langues de l’Union européenne, que Cuej.info a pu consulter, Ryszard Czarnecki a tenté de se redonner une bonne image. « En tant que vice-président du Parlement européen, j’ai traité tous les députés, provenant de tous les partis, avec le même respect, en garantissant la liberté de parole et sans couper le micro en pleine phrase des intervenants – parce que je suis en faveur du pluralisme politique. J’ai également protégé le pluralisme linguistique, en essayant de m’adresser à chaque membre dans sa langue maternelle – vous l’avez entendu plusieurs fois ! » Mercredi, le Polonais a fait distribuer des tracts dans les bureaux des parlementaires à l’exception de ceux du PPE, initiateur de la demande de destitution. 

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Ryszard Czarnecki (275) dans l'hémicycle, quelques minutes avant sa démission forcée du poste de vice-président du Parlement européen. ©Juliette Vilrobe

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Le tract distribué aux eurodéputés avant le vote. ©Quentin Monaton

Le Polonais Ryszard Czarnecki (ECR, souverainistes) a été destitué de son poste de vice-président, mercredi au Parlement européen, après avoir insulté l’eurodéputée Róza Thun. Une première dans l’histoire de l’institution.

C’est une première depuis l’instauration en 2009 du poste de vice-président au Parlement européen. Ryszard Czarnecki, membre des Conservateurs et réformistes européens (ECR, souverainistes), a été contraint mercredi de quitter son poste. Sur les 673 députés présents, 447 ont voté pour sa destitution, 196 ont voté contre. Le Polonais a été « démissionné » pour « fautes graves ». Il a payé cher d’avoir comparé sur le site Niezalezna.pl l’eurodéputée polonaise Róza Thun (PPE, centre-droit) aux Szmalcowniks, groupes polonais qui collaboraient avec les nazis. Thun avait fait part de sa préoccupation sur l’état de la démocratie aujourd’hui en Pologne, dans un documentaire diffusé sur Arte.

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Quelle stratégie pour les entreprises ? © Clémentine Rigot, Martin Schock

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Le système ETS © Clémentine Rigot, Martin Schock

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Comprendre les quotas carbone © Clémentine Rigot, Martin Schock

Une politique à risque

 

Julie Girling, la rapporteure nationaliste (ECR, eurosceptique) du rapport, admet que l'UE ne dispose d'aucune garantie que les industriels ne feront pas le choix de la désindustrialisation vers les pays moins contraignants sur le plan environnemental. « Nous nous fondons sur des analyses de la Commission qui montrent que cette réforme n'aura pas d'impact sur l'emploi en Europe », souligne-t-elle.

 

Outre les possibles conséquences sur l'emploi, l'augmentation du prix du carbone fait encore débat au sein du Parlement. « Beaucoup de députés veulent aller plus loin avec notamment une taxe carbone sur les importations extérieures. Malheureusement, pour cela il faut un consensus des 28 Etats membres, et il semblerait que certains Etats soient plus ambitieux que d'autres, ou moins que ce qu'ils affirment ... », déplore Julie Girling.

 

Si l'Union européenne se félicite d'aller dans le sens des accords de Paris, nombre d'ONG regrettent le manque d'ambition du texte. Klaus Röhrig, spécialiste des questions climatiques européennes pour Climate Action Network Europe, critique la pauvreté de la réforme : « Il faudrait faire augmenter le prix du carbone à 80 € la tonne. Si ce prix n'est pas atteint, l'objectif de décarbonisation de la COP 21 ne verra jamais le jour. »

Clémentine Rigot et Martin Schock

Comment faire baisser les émissions de CO₂ tout en évitant la délocalisation des usines ? Le rapport adopté prévoit une baisse annuelle de 2,2% du nombre de quotas à partir de 2021 et jusqu'en 2030 (contre 1,74% actuellement) pour augmenter le prix du carbone et inciter ses entreprises à investir dans des installations d'énergie verte plutôt qu'acheter des quotas plus chers. Aujourd’hui, le carbone coûte entre 6 et 9 € la tonne. Un prix bien insuffisant, selon le Parlement, qui espère le faire grimper à 25-30 € d'ici cinq ans.

 

Dans le même temps, pour minimiser les risques de délocalisation de la production, l'UE prévoit l'allocation de quotas gratuits pour les entreprises en retard dans leur transition énergétique.

C'est cette délocalisation, aussi appelée « fuite carbone » que craint l'extrême droite européenne. Elle invoque une mesure trop risquée pour l'emploi industriel. « Les secteurs concernés, comme celui de la sidérurgie, sont déjà soumis à une concurrence mondiale impitoyable venant de pays comme la Chine qui n'a pas de normes environnementales. C'est pourquoi nous nous opposons à ce texte », explique Mireille D'Ornano, l'eurodéputée française du groupe EFD.

 

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