Alors que l’Union européenne entre dans une phase de récession provoquée par l'épidémie du Covid-19, le Parlement européen a pris position en faveur d'un plan de relance économique ambitieux, solidaire et financé par de nouvelles ressources propres.
Ce vendredi 15 mai au Parlement européen, une coalition de cinq groupes politiques de droite et de gauche (PPE, Renew, Verts/ALE, S&D, ECR) a soutenu une résolution commune sur un plan de relance d'une économie européenne durement touchée par l'épidémie du Covid-19. Alors que le taux de récession pourrait être supérieur à 7% pour l'année 2020, les eurodéputés souhaitent que le financement de ce plan soit inclus dans le prochain buget de l'Union européenne.
Un plan de relance estimé à 2000 milliards d’euros
Les eurodéputés invitent l'Union européenne à faire preuve d'ambition en se dotant d'un "Fonds de relance et de transformation" doté de pas moins de 2 000 milliards d’euros. Ils estiment nécessaire de revitaliser l’économie européenne autour de deux domaines majeurs : la transition numérique et écologique. "Il faut faire passer un message d’unité. On a besoin de solidarité européenne pour les médicaments, les masques, l’agriculture", insiste l'eurodéputé portugais José Manuel Fernandes (PPE, centre-droit). Une réponse forte qui doit selon lui être européanisée pour éviter aux Etats membres de s’endetter encore plus: "C’est plus facile pour les pays de payer avec une solution européenne, qu’avec une solution nationale".
Plutôt des subventions que des prêts
Pour les eurodéputés, le financement du plan de relance ne doit pas s'accompagner d'une augmentation de la dette des Etats membres. "En tant que Verts, on se bat pour des subventions plutôt que des prêts. Pour des pays comme l’Italie, les prêts ne seraient pas une bonne réponse financière" insiste l'eurodéputé allemand Rasmus Andresen (Les Verts). La résolution adoptée par le Parlement envisage plutôt une augmentation des ressources propres de l’Union européenne, par la création de nouvelles taxes sur les GAFA ou sur les gros pollueurs. Mais ce texte, non contraignant, vise surtout à mettre la pression sur la Commission et les Etats membres qui doivent présenter leurs propres propositions de relance économique dans les semaines à venir.
Arthur Jean
Les députés européens ont appelé de leurs voeux, le 13 mai, la mise en place d'un "filet de sécurité" pour les projets européens. Celui-ci permettrait d'assurer leur financement en 2021 en cas d'échec des négociations sur le futur budget de l'Union européenne.
"Nous avons proposé un plan de contingence pour ne pas prendre de risques" . C'est ainsi que l'eurodéputé portugaise Margarida Marques (S&D, sociaux-démocrates) justifie le projet de filet de sécurité pour les bénéficiaires des programmes de l’Union européenne que le Parlement européen a largement adopté le 13 mai en session plénière (616 pour, 29 contre et 46 abstentions). Soutenu par cinq groupes politiques de gauche et de droite (PPE, S&D, Renew, les Verts et ECR), ce projet vise à assurer la continuité des financements européens dans l'hypothèse où les Etats membres continueraient à ne pas s'entendre sur le budget de l'Union européenne pour la période 2021-2027. Concrètement, le budget de 2020 serait reconduit automatiquement pour l'année 2021, à hauteur de 172 milliards d'euros. Afin de prendre en compte l'épidémie de Covid-19, de nouveaux instruments pourraient néanmoins être introduits dans le but de limiter l'incidence de la crise sanitaire.
Selon l'eurodéputé français Éric Andrieu (S&D, sociaux démocrate) un tel filet de sécurité est indispensable pour éviter que l'absence d'accord budgétaire ne mette en difficulté des secteurs entiers de l'économie européenne, comme l'agriculture. "Le budget de la Politique agricole commune dépend directement d'un accord sur le budget de l'Union européenne", rappelle-t-il. Néanmoins, le vote du Parlement européen n'est qu'une recommandation et seule la Commission européenne est en mesure de décider de l'instauration effective d'un plan de contingence budgétaire. Les eurodéputés lui ont donné jusqu'au 15 juin pour le faire, mais Margarida Marques espère avoir une réponse "dès la semaine prochaine".
Valentin Naturel
Le Parlement européen a adopté une nouvelle réglementation sur l'étiquetage des pneumatiques pour réduire les émissions de gaz à effet de serre.
Il aura fallu près de deux ans de négociations pour que la nouvelle législation européenne sur les pneumatiques soit définitivement adoptée par le Parlement européen mercredi 13 mai. Elle vise principalement à mieux informer les consommateurs en rendant obligatoire l'affichage des caractéristiques des pneus en matière d'efficacité énergétique, d'adhérence sur sol mouillé et de bruit de roulement externe. Les pneus en circulation devront également être répertoriés dans une base de données publique. Outre les véhicules particuliers et les camionnettes, les utilitaires lourds de type C3 sont également concernés par ces nouvelles mesures.
Une bonne nouvelle pour l'environnement selon le Parlement et la Commission européenne qui rappellent que 20 à 30 % de la consommation en carburant d'un véhicule dépendent de ses pneus. La nouvelle réglementation devrait ainsi permettre une réduction annuelle de 10 millions de tonnes d'émissions de CO2 d'ici 2030. Les pneumatiques devant répondre à des exigences plus fortes, une hausse de leur prix est à prévoir. Les automobilistes européens devraient cependant largement s'y retrouver puisque la Commission estime à 2,8 milliards d'euros par an l'ensemble des économies de carburants qu'ils réaliseront avec des pneus moins énergivores.
Le réglement, qui entrera en vigueur le 1er mai 2021, n'a pas été adopté sans peine. Les Etats membres se sont longtemps opposés à ce que des indicateurs relatifs aux kilométrages et à l'abrasion figurent sur l'étiquetage des pneus. Un point sur lequel ils ont fini par céder face aux pressions de la Commission et de l'aile gauche du Parlement européen. "Nous avons obtenu que les microplastiques issus de l'abrasion des pneus soient enfin étiquetés", s'est félicitée l'eurodéputée allemande Jutta Paulus (Les Verts), lors du vote du nouveau réglement. L'étiquetage des pneumatiques devra ainsi inclure également des indications sur les émissions de particules dangereuses pour l'environnement dès qu'une méthode de test adéquate sera disponible au niveau européen. La Commission a néanmoins prévenu que le développement et l'hamonisation d'une telle méthode pourrait encore prendre plusieurs années.
Marion Henriet
En Europe, la course aux applications mobiles de traçage des malades de la Covid-19 est lancée, mais en ordre dispersé d'un pays à un autre. Le Parlement européen promeut lui une réponse commune et éthique à l'échelle du continent.
"C’est un devoir pour les pouvoirs publics de mettre la technologie à disposition des citoyens", a estimé l’eurodéputée luxembourgeoise Isabel Wiseler-Lima (PPE, centre-droit) à l'occasion du débat sur les applications mobiles de traçage des malades de la Covid-19 organisé au Parlement européen le jeudi 14 mai. Alors que les pays de l’Union européenne commencent à se déconfiner, ces nouveaux outils technologiques de lutte contre l'épidémie émergent. Leur principe ? Mémoriser les contacts croisés par une personne pour pouvoir retracer la chaîne de contamination en cas d’infection. Pour ses promoteurs, ce système peut permettre de faciliter le retour à une circulation normale des personnes et des marchandises au sein de l'Union européenne.
Contre le virus, l’Union fera la force
Lors du débat, les eurodéputés se sont néanmoins inquiétés de l’absence actuelle de coopération européenne dans le domaine. "Les Etats membres vont tout azimut : les applications sont nationales, voire régionales", a regretté l'eurodéputée néerlandaise Sophia in’t Veld (Renew, libéraux). Résultat : elles ne sont pour l’instant pas toujours compatibles d’un pays à un autre. Or, pour la danoise Karen Melchior (Renew), "il faut veiller à une interopérabilité", essentielle à la restauration d'une circulation transfrontalière des personnes. Enfin, le respect des droits fondamentaux des citoyens a constitué un autre point de préoccupation pour les parlementaires. Ils ont réaffirmé que les normes européennes en matière de collecte et de stockage des données devront pleinement être respectées par ces applications, et que la liberté de déplacement des citoyens ne saurait être conditionnée à leur utilisation.
Si l’utilité de ces technologies a été largement reconnue par les eurodéputés, l'Allemande Birgit Sippel (S&D, sociaux-démocrates) a résumé leur état d'esprit général en estimant qu’ "il n’y a pas de panacée : les applications ne sont qu’un élément face à la crise, devant être additionné aux masques, à la distanciation sociale, et aux tests".
Héloïse Décarre
La session plénière du Parlement européen a été l’occasion pour les eurodéputés de réagir au récent arrêt de la Cour constitutionnelle allemande sur la Banque centrale européenne. Alors que les souverainistes applaudissent et que les élus de gauche s'inquiètent, la droite européenne peine à se positionner.
"C’est d’une gravité extrême", s’est insurgé l’eurodéputé français Younous Omerjee (GUE/NGL, gauche anti-libérale) lors de la session plénière du Parlement européen le 13 mai. La raison de son inquiétude : l’arrêt rendu par la Cour constitutionnelle allemande de Karlsruhe le 5 mai dernier. Celui-ci exige de la Banque centrale européenne (BCE) qu'elle se justifie auprès de l'Allemagne sur son plan de rachat de dette, alors même que la politique monétaire est une compétence exclusive de l’Union européenne.
Cette inquiétude est partagée par les sociaux démocrates (S&D). "Ça m’a énormément préoccupée", a ainsi confié la présidente de groupe, Iraxte García Pérez, "La Cour constitutionnelle allemande remet en cause l’indépendance de la justice de l’Union européenne, de la BCE mais aussi les fondations juridiques de l’Union".
De l’autre côté de l’hémicycle, à l’extrême droite, les élus saluent à l'inverse l'arrêt. L'eurodéputé français Philippe Olivier (ID, extrême-droite) est allé jusqu'à féliciter les juges allemands, "lanceurs d’alerte souverainistes", selon lui. "Ils sont venus réaffirmer que l’Union européenne n’est pas un État fédéral et que les États restent maîtres des traités et de leurs intérêts nationaux", a-t-il complété.
Il est plus difficile de trouver un consensus sur le sujet du côté du PPE (chrétiens, démocrates), le plus important des groupes du Parlement européen dont est membre la CDU, le parti de la chancelière allemande Angela Merkel. "On n'a pas essayé de trouver une position commune. On n'a pas essayé d’en discuter. Certains collègues ont demandé ce que ça voulait dire. Avec d’autres collègues allemands, j’ai expliqué que c’était compliqué", a indiqué l'eurodéputé allemand Andreas Schwab (PPE).
Bien qu'elle soit elle-même issue de la CDU et du PPE, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a quant à elle indiqué être prête à recourir à une procédure d’infraction à l’encontre de l’Allemagne si elle remettait en cause la préséance du droit européen.
Loeiza Larvor