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Le printemps des europartis

10 décembre 2008

L'année européenne 2009 sera politique. Elle sera partisane et concurrentielle.

En 2009, le Parlement européen fraîchement élu validera la nomination des commissaires, après une série d’auditions. Les partisans de la politisation de l'Union espèrent aller encore plus loin, en obligeant le président de l'exécutif à prendre davantage en compte la composition et les revendications du Parlement avant de nommer son équipe.

En juillet 2008, le Parlement a entériné une pratique déjà existante en modifiant l’article 99 de son règlement intérieur qui porte sur les auditions de la Commission. Le nouveau texte précise que les eurodéputés approuvent l’ensemble des commissaires “sur la base de leur compétence générale, de leur engagement européen et de leur indépendance personnelle” après avoir évalué “la connaissance de leur portefeuille potentiel et leurs capacités de communication”. Ils peuvent demander tous les renseignements utiles pour juger “l’aptitude des commissaires désignés” ainsi que “toutes les informations relatives à leurs intérêts financiers”. Une annexe nouvelle au règlement intérieur détaille la procédure jusqu'à l'investiture finale du Collège.
Peu de nouveautés mais ces précisions noir sur blanc possèdent une forte valeur symbolique. Elles montrent clairement la volonté de l’assemblée de s’approprier une partie des prérogatives encore dévolues au Conseil européen et au président de la Commission: le résultat de vingt-cinq années d’intrusion progressive dans la composition de l’institution détentrice d'un quasi-monopole de l'initiative.

Depuis sa création, le Parlement n’a cessé d’étendre son pouvoir sur la composition de la Commission. En 1981, deux ans après sa première élection au suffrage universel, l’assemblée commence par émettre des votes de confiance. Dès la seconde élection, en 1984, et jusqu’à Maastricht, le Conseil européen soumet la nomination du président de la Commission, en l’occurrence Jacques Delors, à la consultation du Bureau élargi du Parlement.

Avec la désignation de Jacques Santer à la tête de la Commission en 1994, le Parlement européen, consulté pour la première fois dans son ensemble sur le président de l’exécutif, choisit d'exprimer son approbation par un vote d'investiture. Il enchaîne en instaurant des auditions des candidats commissaires, dont le collège est globalement soumis à son vote. Le traité d’Amsterdam reconnaît la première de ces pratiques et lui confère le droit de rejeter à la majorité le candidat à la présidence de l’institution, qui est désigné par les gouvernements à l'unanimité.

Le scandale qui a conduit à la démission de la Commission

La pratique continue ensuite à précéder les textes. Lors de l’investiture de la Commission Prodi pour le mandat 1999-2004, le Parlement étend son pouvoir de contrôle individuel sur le collège des commissaires. En septembre 1999 Nicole Fontaine, alors présidente de l’assemblée européenne, demande au président italien “l’engagement d'obtenir la démission des commissaires si des allégations portées contre eux s’avéraient fondées ou si, individuellement, un commissaire ne bénéficiait plus de la confiance de l’assemblée”. Un transfert de pouvoir auquel Prodi doit consentir après le scandale financier qui a conduit à la démission de l’ensemble des membres de la Commission Santer.

Désormais la composition du Parlement et les positions partisanes influent sur les négociations entre gouvernements, qui, avec Nice, désignent leur candidat à la majorité qualifiée. Après les élections de 2004, Hans-Gert Pöttering, le leader de la plus grande force politique de l’hémicycle, indique clairement au Conseil européen que son groupe soutiendra seulement un candidat de centre droit. Il est entendu.

Le Parlement entreprend alors d'étendre son droit de regard aux nominations des candidats-commissaires. José Manuel Barroso, qui croit pouvoir passer en force, en fait les frais. A quelques heures du vote d’investiture de son collège, le président de la Commission est contraint de retirer sa liste pour éviter d’essuyer un échec. L’ancien premier ministre portugais n’avait pas assez pris au sérieux les avis défavorables émis à l’encontre de plusieurs membres de son équipe.

L’opposition des députés conduit alors à la réattribution de trois portefeuilles et au retrait de deux candidats-commissaires. L’homme politique italien Rocco Buttiglione, critiqué par la commission des libertés civiles pour ses propos sur l’homosexualité et le rôle de la femme dans la société, doit ainsi laisser sa place. La lettonne Ingrida Udre ne résiste pas aux soupçons de financement illégal qui ternissent son parti d'origine. Leur retrait entraîne un jeu de chaises musicales. Franco Frattini prend la place laissée vacante par son concitoyen et Laszlo Kovacs, remplacé par Andris Piebalgs à l’énergie, se substitue à la fugace Ingrida Udre à la fiscalité et à l’union douanière.

Pour les partisans de la politisation de l'Union, l’investiture de 2009 pourrait être l’occasion d’aller encore plus loin. Notamment en obligeant le président de la Commission à tenir davantage compte de la composition et des requêtes de l’assemblée et à anticiper les éventuels conflits. 
“Nous essayons d’aller vers une Commission qui devienne comme un gouvernement avec la même majorité qu’au Parlement ou qui ait l’appui de la majorité des députés européens et des États au sein du Conseil européen”, confie Béatrice Scarascia, conseillère au sein de la commission parlementaire des affaires constitutionnelles pour le PPE-DE.

Les lignes directrices du Parlement pour l'approbation de la Commission européenne

Gautier Demouveaux, Florent Godard, à Bruxelles

Simon Hix est professeur de politique européenne comparée à la London School of Economics and Political Sciences. Il passe en revue les actions déterminantes à mener pour achever la politisation des institutions.

Pour politiser davantage les institutions, il faut d'abord que les médias, les universitaires fassent pression sur les groupes politiques pour qu'ils soutiennent des candidats rivaux à la présidence de la Commission. Le plus important aujourd'hui c'est le candidat socialiste. Les socialistes devraient désigner un candidat face à Barroso. 
Certains partis au gouvernement comme les Portugais, les Espagnols et les Britanniques résistent en prétendant : "Nous aimons bien Barroso". C'est une mauvaise tactique pour eux parce qu'elle conduit à amoindrir la responsabilité politique de l'UE et à poursuivre sur la lancée d'un système non politisé, non démocratique et finalement fragile.

Plus de pouvoir à la majorité

Pour le Conseil, il faudrait simplement le rendre plus transparent. Il n'est pas nécessaire de l'ouvrir totalement aux médias pour qu'ils regardent comment il vote. C'est complètement irréaliste. Toute la cuisine se déroulerait alors en coulisses. Mais ce que l'on devrait pouvoir voir en tant que citoyen, journaliste, universitaire, c'est ce sur quoi il vote, les documents internes au Conseil, ceux de la Présidence, tous les amendements aux textes législatifs proposés par les gouvernements. C'est ce genre d'information à laquelle on devrait avoir accès dans une institution législative normale. 
Enfin, on devrait encourager le Parlement à renforcer l'enjeu des élections européennes. Par exemple en donnant plus de pouvoir à la majorité, sans pour autant en faire une sorte de Westminster ou d'Assemblée nationale à la française. Un exemple : le président du Parlement devrait être élu pour un mandat de cinq ans au lieu d'un mandat de deux ans et demi. Cela augmenterait la valeur du poste, les groupes politiques entreraient en compétition pour l'obtenir alors qu'il y a aujourd'hui un accord entre les socialistes et le PPE pour se le partager.

Clarisse Briot

Lisbonne : la grande inconnue

Combien de commissaires autour du futur président de la Commission européenne ? Comment le Parlement fraîchement élu pourra-t-il commencer à travailler sans Commission ? Réponse en octobre à Dublin. Peut-être.

“Le processus de Lisbonne est relancé. Les Irlandais seront de nouveau consultés”, a indiqué Nicolas Sarkozy à la fin du Conseil européen de décembre. Le referendum, s’il a lieu, se tiendra avant le 31 octobre, date d’expiration du mandat de la Commission Barroso.
 Outre sa date exacte qui n’est pas encore fixée, le doute plane sur les résultats. Or, les enjeux au Parlement ne sont pas les mêmes selon que l’on fonctionne sous le régime de Nice ou de Lisbonne. 
Le Conseil européen s’est également engagé à proposer, dès juin, son candidat à la tête de la Commission. Lisbonne ou pas, il devra tenir compte de la couleur politique des vainqueurs des élections européennes. Le 15 juillet, le candidat devra recueillir la majorité absolue au Parlement.

Lisbonne ou Nice : pas le même travail pour les députés

C’est alors que va se poser pour le Parlement le problème de la suite : Nice ou Lisbonne ? Comment éviter de se retrouver les bras croisés entre un nouveau président sans commissaires et une Commission Barroso réduite à “l’expédition des affaires courantes et privée de toute initiative”, comme le décrit Peter Schiffauer, responsable du secrétariat de la commission parlementaire aux Affaires constitutionnelles ?
En misant tantôt sur Nice, tantôt sur Lisbonne.

Côté travail parlementaire, tout doit être prêt pour septembre et d’abord l’organisation des commissions parlementaires, base de l’activité législative. Or, les prérogatives du Parlement ne sont pas les mêmes sous Nice ou sous Lisbonne et les commissions parlementaires ne représentent pas les mêmes enjeux. Avec Lisbonne, la commission Agriculture disposera de la co-décision et la commission Justice et libertés étendra ses compétences à tout le domaine de la justice et des affaires intérieures. La commission de l'énergie se voit aussi promise à de beaux jours. Celle de la défense pourrait également gagner quelques galons.

Alors, que faire ? "Jusqu’au vote irlandais, on fera comme si rien ne changeait, estime Timothy Kirkhope, vice-président de la commission aux Affaires constitutionnelles. Si le “oui” l’emporte, “le processus sera révisé. Jusqu’où ? Je ne sais pas, confesse-t-il, j’imagine qu’il y aura une nouvelle vague de nominations et que les gens pourront changer de commission”.

Ignorer le “non”

Reste la question de la Commission européenne. Avec Nice, elle est composée de 26 commissaires tout au plus. Sous Lisbonne, promesse a été faite aux Irlandais qu’il y en aurait 27. 
Et pas question d’attendre jusqu’à novembre pour commencer les auditions au Parlement des candidats-commissaires. Le scénario envisagé est cette fois d’ignorer le premier “non” irlandais, ce qui permettrait au Conseil européen de nommer 27 commissaires. Quitte à tout recommencer en cas de deuxième “non”.
Une provocation ouverte contre Dublin ? “Pas vraiment, explique Peter Schiffauer. Le vote formel du Parlement sur la Commission ne se fera qu’après l’entrée en vigueur du traité. Aucune décision ne sera prise avant le référendum”. 
Selon lui, la situation pourrait tout à fait se débloquer avant la fin du mandat de la Commission Barroso qui expire normalement le 31 octobre et au plus tard le 21 novembre à minuit*. “Si le vote est organisé le 15 octobre, on peut envisager, si volonté politique il y a, que l’Irlande se dépêche de présenter ses instruments de ratification avant le 31 octobre. Le traité entrerait en vigueur le 1er novembre”.

En revanche, prolonger le mandat de la Commission Barroso, “il n’y a aucun moyen de le faire dans les traités, précise Peter Schiffauer. Cela ne s’est jamais fait”.

* La Commission Barroso a pris ses fonctions le 22 novembre 2004.

Alexandra du Boucheron, à Bruxelles

Emilie Salvaing, à Bruxelles

 

 

 

 

Près de 900 d'entre eux sont affectés aux groupes parlementaires. Un appui indispensable.

Plus on est gros, plus on est multilingue, plus la règle de la répartition proportionnelle au nombre d’élus de chaque groupe renforce l’efficacité de sa machine. L’administrateur est la force de travail qualifiée indispensable qui multiplie les capacités politiques. 
En 2007, sur les 5000 fonctionnaires du Parlement, 883 étaient affectés aux groupes politiques. Le PPE-DE, avec 288 députés, disposait de 278 administrateurs, l’ID, 23 députés, devait se contenter de 36. S’y ajoutent informaticiens et comptables qui n’entrent pas dans les quotas. Ils sont 16 au PPE-DE.

Ces permanents forment le secrétariat des groupes qui assume le fonctionnement de la machine. Ils assurent la logistique et la tenue des agendas. Leur nombre permet de décharger les élus de toutes les tâches routinières et fastidieuses, de la prise de note en commission à la rédaction du rapport, en passant par la formulation des déclarations communes avant les plénières, ou la simple réservation d’une salle et d’interprètes. Il fait la différence entre un groupe qui peut détacher trois permanents par commission, et un autre qui doit affecter à chacun le suivi de trois. Plus on dispose d’administrateurs, et plus le député peut se concentrer sur l’exercice du cœur de son métier politique : négocier et voter.

Quand le PPE se cherche des amis dans l'administration

Le PPE cherche à développer sa culture du réseau. Et pour cause, selon un de ses cadres, « la droite a souvent été moins habile que la gauche à se constituer en réseau au sein des institutions européennes.» Elle est bien décidée à inverser la tendance.
Depuis un an, le PPE organise des réunions informelles entre fonctionnaires européens et hommes politiques. Michel Barnier et Hans-Gert Pöttering, le président du Parlement, y ont notamment participé.
Ce groupe, « les amis du parlement », a pour but d’échanger des idées sur l’Union européenne. « Ce sont un peu des discussions de café du commerce », confie un membre du PPE. Mais l’objectif sous-jacent est que fonctionnaires et politiques mettent sur pied un “groupe de contact”.
Ces réunions sont néanmoins confidentielles. « On préfère garder tout ça secret car c’est difficile pour les fonctionnaires de revendiquer une part de militantisme, continue un permanent du parti. Mais notre but n’est absolument pas d’aller contre la déontologie des fonctionnaires, on ne veut pas les mettre en porte-à-faux.»
Officiellement, pas question d’instrumentaliser les fonctionnaires dans un but partisan, mais seulement de développer un réseau d’information - savoir qui est qui et qui vote quoi - pour mieux choisir son interlocuteur. « Quand on a un problème, c’est utile de savoir qu’il vaut mieux s’adresser à telle personne plutôt qu’à telle autre.»
Les invités sont donc choisis scrupuleusement, en fonction de leur poste. « Nous n’invitons pas tous les fonctionnaires qui votent à droite, mais uniquement ceux qui ont des postes de reponsabilité.» Pas de listing officiel, ni de mail d’invitation donc, tout se fait par le bouche-à-oreille.
Ce groupe de fonctionnaires PPE est composé d’une centaine d’individus issus de tous les pays d’Europe. Quatre réunions ont été organisées depuis un an. Le but du parti, à terme, est d’étendre ce concept aux autres institutions de l’Union européenne.

Marie Regnier, à Bruxelles

Simon Hix, professeur de politique européenne comparée à la London School of Economics and Political Sciences explique pourquoi les groupes au Parlement ont des comportements de plus en plus politiques.

«Au sein du Parlement européen, on constate un degré croissant de cohésion des partis. J'entends par là le nombre de fois où les membres du groupe politique votent tous ensemble.
 Les chercheurs se sont aperçus que les groupes du Parlement européen sont probablement plus cohésifs que les Démocrates et les Républicains au Congrès américain, mais pas tout à fait autant que les partis dans les parlements nationaux en Europe. C'est compréhensible puisque dans les parlements nationaux les partis au gouvernement peuvent forcer leurs membres à les soutenir sous peine de risquer la chute du gouvernement. Cela ne se produit pas au Parlement européen.



Imposée par les partis nationaux



Il n'y a pas d'exécutif qui puisse dire : soutiens-moi ou vire-moi. Donc les coalitions au Parlement européen, comme au congrès américain, doivent se construire sujet après sujet. D'une certaine façon, construire une coalition sujet après sujet est plus difficile. Le haut niveau de cohésion au Parlement européen est donc surprenant. Alors pourquoi ?
La raison n'est pas que les chefs de groupe politique peuvent forcer cette cohésion. Ils peuvent employer la technique du whip – du chef de file – qui fournit les instructions de vote aux députés. Mais cela ne suffit pas. Alors quoi ? Je pense que cette cohésion est imposée par les partis politiques nationaux. Ce sont eux qui composent les groupes au Parlement européen. Ils sont très puissants. Ils peuvent décider de quel député va concourir pour les prochaines élections, ils peuvent débarquer les députés qu'ils n'aiment pas, soutenir les députés qu'ils aiment. Ils sont chargés d'attribuer les sièges dans les commissions, ils décident de quel député aura quel poste dans quelle commission.
Pourquoi le parti national encourage-t-il ses membres à voter selon les instructions du groupe ? Parce que le vote au Parlement européen comme dans n'importe quel parlement est répétitif. C'est une interaction, un jeu répété. Ce que tu fais aujourd'hui, tu auras à vivre avec demain. Or chaque parti regarde les autres membres avec suspicion. Pour créer la confiance et rendre l'avenir moins incertain, les partis nationaux décident donc en général de suivre volontairement les instructions de vote données par le groupe. »

 

Propos recueillis par clarisse Briot

Un statut unique du député européen entrera en vigueur dès le début de la prochaine mandature. Les membres du Parlement toucheront une seule et même rémunération, mais ils seront aussi plus contrôlés.

Les députés européens toucheront un même salaire de 7 000 euros, prélevé sur le budget de la Communauté, à partir de juillet 2009. Le statut des députés, qui entrera en vigueur après les élections européennes, met fin aux différences de traitement. 800 euros pour un Hongrois, 1 300 pour un Tchèque, 11 000 pour un Italien... Jusqu’à présent, les élus européens sont payés comme les députés nationaux de leur pays d’origine. Les conditions de vie, en matière de logement notamment, diffèrent selon les nationalités. 
« Les députés les mieux payés habitent souvent à côté des institutions européennes », témoigne ce membre de la commission du budget du Parlement européen, qui souhaite garder l’anonymat. « Quand on vient des pays de l’Est, non seulement on gagne moins d’argent, mais les déplacements à effectuer sont plus longs et donc plus coûteux. Les nations les plus pauvres ne peuvent pas soutenir le rythme de vie de Bruxelles. » « Les traducteurs, les membres du staff gagnent parfois davantage que le député lui-même », déplore le député hongrois Zsolt László Becsey (PPE).

Des dérogations jusqu'en 2019

Ces constats sont apparus évidents dès que l’Union a accueilli dix nouveaux membres en mai 2004. Mais l’apparition d’un statut du député européen était dans les tiroirs depuis 1979, date des premières élections européennes au suffrage universel. Pendant 30 ans, les principales réticences sont venues des pays riches qui craignaient, à l’instar des Italiens, une harmonisation des salaires par le bas. 
Au final, tous les intérêts ont été défendus par la réforme. Deux dérogations au statut ont été obtenues par les plus réfractaires. S’ils le souhaitent, les Etats membres pourront aligner, à leurs frais, la rémunération d’un parlementaire européen sur celle d’un député national jusqu’en... 2019. Les députés européens actuels, s’ils sont réélus en 2009, pourront quant à eux rester dépendants du système en vigueur durant leur précédent mandat. « Le droit de choisir, laissé aux députés, exclut qu’ils soient lésés dans leurs droits ou qu’ils subissent des désavantages économiques lors de cette transition », souligne le statut.



Mieux informer les citoyens



Payés sur le budget de l’Union européenne, les députés seront aussi plus contrôlés. L’indemnité forfaitaire de voyage sera par exemple remplacée par le remboursement des dépenses réellement encourues. Autrement dit, plus question d’obtenir l’indemnisation du coût d’un déplacement à l’intérieur de la Communauté européenne ou d’un repas sans présenter les factures correspondantes.

Groupes de pression

Le rapport Cappato, qui sera examiné au Parlement européen lors de la session plénière de janvier, est une autre évolution majeure. Il prône une meilleure information sur l’activité des députés, leurs indemnités, leurs dépenses, leur participation aux travaux parlementaires.
S’il est adopté, Internet deviendra le principal outil de contrôle des élus. But de l’opération: obliger les députés à adopter un comportement irréprochable durant leur mandat. Faute de quoi les citoyens et les groupes de pression pourront dénoncer les écarts de conduite.

Amaury Prieur, à Strasbourg

Assistants parlementaires : la fin des scandales ?

En adoptant, mardi 18 décembre, le rapport Giuseppe Gargani, le Parlement européen a manifesté sa volonté de mettre fin aux dérives concernant l’embauche des assistants parlementaires par les députés européens. Si le Conseil donne son approbation finale, les contrats des assistants, ainsi que le versement de leur rémunération, seront gérés par les services financiers du Parlement, à partir de la prochaine mandature.
En février dernier, un rapport d’audit interne de l’institution soulignait que certains députés se rendaient coupables de nombreux abus dans le recrutement de leurs assistants : emplois fictifs, recrutement d’un membre de la famille ou d’un stagiaire en lieu et place d’un assistant qualifié...
A partir de juin 2009, le Parlement intensifiera son contrôle. « Il se dotera de mesures d’application du règlement avant les élections », souligne Orietta Zanella, assistante de la vice-présidente du Parlement européen Martine Roure. « Nous vérifierons les compétences des assistants. Il existe des critères objectifs pour les mesurer : la connaissance des langues, le diplôme, l’expérience professionnelle. L’argent public doit être utilisé à bon escient. »
Toutefois, les députés pourront toujours choisir leurs assistants et la durée des contrats. « On ne peut pas obliger un député à travailler avec une personne dont il ne partage pas les convictions. »
En 2008, le remboursement à chaque député des frais engagés pour la rémunération de ses assistants parlementaires était fixé à 16 914 euros mensuels maximum.

A. P., à Strasbourg

Le temps des enchères

Entre les élections et la session inaugurale du Parlement : la répartition des postes de la machine parlementaire. Les négociations de couloir ont commencé. Les partis britanniques et allemands, qui ont déjà constitué leurs listes, partent avec un temps politique d’avance.

« Le 15 juillet, le nouveau Parlement s’installe mais on ne sait pas qui va où... », explique Chantal Rigaud, secrétaire général de la délégation française au PSE. Surtout si on ne s’est pas préoccupé de régler la question avant. Viser un poste clé ne suffit pas, il faut s’y prendre tôt et s’assurer le soutien de ses camarades de groupe. Catherine Trautmann en a fait les frais en 2004. Elle n’a pas obtenu un rôle de coordinateur du groupe PSE dans sa commission. Un accord de vote entre les petits partis de l'est et scandinaves avait été conclu bien avant, derrière son dos. Une mésaventure révélatrice de l'importance d'anticiper.

Première étape : unir ses forces au sein des groupes

Après les résultats du 7 juin 2009 suivra la formation des groupes politiques de la septième législature, car un député sans groupe est condamné à l’inefficacité pour cinq ans. Les délégations nationales se rassemblent selon leurs affinités politiques. Il s'agit tout d'abord de penser “alliance”. Plus le groupe sera gros, plus il obtiendra des moyens humains, financiers, techniques (voir Les fonctionnaires, soutiers de la machine) et pourra prétendre aux postes les plus influents au Parlement. La formule de répartition en vigueur au Parlement y veille (voir ci-dessous la vidéo de Bernard Poignant).
Dans ces manœuvres d’approche, un enjeu de taille : à qui la présidence du groupe ? Elle n’assure pas seulement la maîtrise de l’agenda et des négociations avec les autres. Elle donne automatiquement accès à la conférence des présidents. C’est elle qui répartit les rapports entre les commissions, fixe l’ordre du jour des sessions, distribue les temps de parole. En cas de désaccord, la conférence des présidents tranche ses différends à la majorité pondérée.
Les délégations nationales une fois réunies au sein d'un même groupe devront donc transiger sur un nom. En janvier 2007, après plusieurs tours au sein du PPE, Joseph Daul avait été soutenu par la délégation allemande, la plus nombreuse. Mais, obtenir cette présidence s’est révélé coûteux pour la délégation française qui n’a obtenu aucun autre poste clé de l’appareil du groupe ou de la machine parlementaire.

Deuxième étape : négocier la présidence du Parlement

Débutent ensuite les négociations intergroupes sur les postes clés du Parlement. Celui de président du Parlement est le trophée le plus convoité. Sa candidature doit être présentée par un groupe politique ou par au moins quarante députés. Selon le règlement, “il convient de tenir compte de façon globale d’une représentation équitable des États membres et des tendances politiques”. Il faudra ensuite, le 15 juillet à Strasbourg, réunir une majorité sur son nom, soit 369 voix.
Dans la pratique, il est presque constant que les deux groupes majoritaires passent un ”accord technique” pour présider chacun la moitié de la législature. Mis à part l’intermède de 1999, quand les libéraux et le PPE-DE ont formé une majorité, cette alternance a toujours concerné le PSE et le PPE-DE. La première présidence va naturellement à celui des deux qui est arrivé devant l’autre aux élections.

Rumeurs d’alliances

Dans les couloirs du Parlement, on parle déjà d’une première moitié de législature 2009-2011 sous la présidence de Jerzy Buzek , PPE-DE et ancien Premier ministre polonais. La seconde moitié, 2012-2014, serait assurée par Martin Schultz, l’Allemand qui préside le groupe PSE.
Mais déjà, de son côté, l’ELDR est en campagne. "Graham Watson -le président du groupe, qui rêve du perchoir suprême-, a entamé les négociations avec certains PPE-DE voire le PSE, confirme Daniel Tanahatoe, conseiller politique du groupe. Si tout le monde se met d’accord pour avancer, on pourrait se répartir 75% des postes qui comptent au Parlement”.
Les socialistes ne semblent pas favorables à un accord avec l’ELDR. Pas favorables non plus à une alliance avec les Verts, pourtant insistants sur le sujet. Pour Juan Behrend, secrétaire général du parti écologiste, les convergences avec le PSE seraient suffisantes pour s'entendre sur un partage de la présidence entre Martin Schulz et Daniel Cohn-Bendit.
Pour l’instant, le PPE-DE se dit ouvert à une grande coalition avec les libéraux. Quant à une alliance avec les Verts, l'idée est envisagée par Angela Merkel, également désireuse de conclure ce genre d'alliance chez elle. Or, cette fois, ce sont les écologistes qui freinent : pas question de gouverner avec les troupes de Nicolas Sarkozy et de Silvio Berlusconi.
Après l’entente sur le nom et la couleur politique du président, il restera à composer le Bureau, qui assurera la gestion politique des moyens du Parlement avec ses lots de consolation : dix-sept vice-présidents et six questeurs.

Troisième étape : se partager les commissions parlementaires

Mais c’est avec les postes de présidents de commission qu’on pénètre au cœur des rouages du Parlement européen. L’essentiel du travail des députés se déroule dans les commissions parlementaires, dont les équilibres politiques sont un modèle réduit de ceux de l’hémicycle.
Obtenir la présidence de l'une des 22 commissions est un enjeu majeur. Là encore, c’est d’abord la proportionnelle entre les groupes qui est de règle. Les plus prisées, outre les affaires étrangères pour le prestige, sont les commissions législatives -celle de l’environnement, ou du marché intérieur. Les moins courues : celles des droits de la femme et des droits de l'homme où les pouvoirs du Parlement sont essentiellement tribuniciens.

Priorité à la délégation la plus nombreuse

La grande redistribution des postes à l’intérieur des groupes commence alors. Les chefs de délégation se retrouvent autour de la table et négocient en fonction de leur poids. Priorité à la délégation la plus nombreuse. "En 2004, avec 31 élus, nous étions la première délégation du groupe PSE. Nous sommes passés en premier, raconte Chantal Rigaud. Le PS a demandé la présidence de la commission économique et monétaire, l’une des plus importantes”. Chaque poste coût un certain nombre de points. “En 2004, les négociations ont duré une semaine. Chaque jour, les chefs de délégations rendent comptent à leurs compatriotes de ce qu’ils ont obtenu".
Une fois la répartition établie, ce sont capitales nationales, et leurs dirigeants de partis, qui conservent la haute main sur les nominations de chacun. “Nous avons eu une réunion dans le bureau de François Hollande avec Bernard Poignant, le président de notre délégation, se souvient Pervenche Berès. Il y avait là les cinq personnes qui pouvaient prétendre à des postes. On a regardé les meilleurs solutions possibles et il y a eu un accord sur les candidats pour chaque poste”. C’est elle qui, pour sa part, a décroché la présidence de la Commission économique et monétaire.

Coordinateur, un rôle qui compte

Dernier rôle qui compte au sein des commissions, celui de coordinateur. "Un poste politique capital. C’est lui qui négocie la répartition des rapports entre les groupes représentés dans une commission. Il doit connaître tous les rapports de sa commission, répartir les temps de parole, décider des amendements. En bref, il coordonne son groupe au sein de la commission", précise Chantal Rigaud.
“On est plus importants que les vice-présidents de commission qui ne servent à rien, assure la socialiste française Catherine Guy-Quint, l'une des huit Français qui occupent ce poste. Plus le groupe est grand et homogène, plus le coordinateur est important. Si je suis d’accord sur un vote, les 220 membres du PSE suivent".
Là, pas de formule mathématique. Pour être coordinateur, il faut convaincre et être élu par les membres de son groupe au sein d’une commission. “J’avais contre moi la Britannique mais j’avais réussi à convaincre les Allemands, les Espagnols, l’Italien, le Grec. Bref, j’avais fait mon lobby, explique Catherine Guy-Quint. Ca n’a pas demandé beaucoup de temps mais ça nécessite d’être connu dans la commission et d’être fiable. C'est vraiment un vote de reconnaissance des membres du groupe sur des qualités techniques et politiques. En ce moment les lobby sont déjà en train de se structurer", confie-t-elle. Pour ce job, il faut avoir fait ses preuves européennes. “Je ne connais pas de coordinateur qui soient blanc-becs”.
Aujourd'hui, les eurodéputés français, incertains de leur avenir, restent à l’écart de ces grandes manoeuvres. Les Britanniques, eux, sont prêts depuis décembre 2007, les Allemands depuis décembre dernier. Les Espagnols le seront certainement en janvier.

Alexandra du Boucheron, à Bruxelles

En vertu d’un règlement de 2007, les partis européens pourront financer la campagne électorale de 2009, mais en aucun cas les partis nationaux. Ils se sont mutuellement engagés à respecter un certain nombre de règles.

Lorsqu’un règlement du 18 décembre 2007 les autorise à recourir à leur subvention du budget communautaire lors des européennes, mais à condition de respecter 27 lois nationales sur le financement des campagnes, les partis européens comprennent qu’il est de leur intérêt de collaborer. Le 9 octobre 2008, PPE, PSE, ELDR et Verts paraphent une série d’engagements insérés dans un code de bonne conduite.
Certes, les formations politiques entendent se conformer aux bonnes moeurs. Mais elles limitent ainsi implicitement les motifs pour lesquels elles pourraient mutuellement s'accuser d’éventuels écarts. Surtout, elles s'accordent pour éviter l'intervention directe du Parlement dans la formulation de règles contraignantes, assorties d'éventuelles sanctions.
Parmi les grands principes, plutôt vagues, que les europartis s’engagent à respecter, figurent notamment l’interdiction de donner un appui financier direct ou indirect aux partis nationaux et l’obligation de respecter les valeurs et les principes de l’Union européenne.
S’ils n’avaient pas agi, le bureau du Parlement européen l’aurait fait à leur place, en vertu du pouvoir que lui confère le règlement du 4 novembre 2003. «Les partis ont produit un document obligatoire dans lequel ils s’engagent à respecter des normes, notamment dans le domaine financier», explique Helmut Betz, chef d'unité à la DG finances. «Nous n’avons pas besoin d’aller au-delà, ça nous suffit.»

Amaury Prieur

 

L’internet participatif fait son entrée dans la vie des partis européens. Tous possèdent un site internet, et la majorité d’entre eux s'intéresse aujourd’hui aux réseaux sociaux du type Facebook, Myspace et autres blogs collaboratifs.

Le Parti socialiste européen a été le premier à avoir investi la toile. Le PSE a lancé son site de campagne pour les élections européennes de 2009 dès le 17 octobre 2007. Il a servi de lien entre les militants et le parti pour rédiger le Manifesto, le programme commun.
«L’idée de démocratie participative lancée par Ségolène Royal lors de la présidentielle de 2007 nous a plu. Nous souhaitions faire participer nos militants à la rédaction de notre programme, pour éviter ce qui s’est passé en 2004. A l’époque nous avions rédigé notre manifeste en moins de trois semaines, et aucun parti national ne s’en était servi pour sa campagne! Pour les élections de 2009, nous avons donc décidé d’impliquer nos militants via internet et les réseaux sociaux», explique Ghislaine Robinson, responsable de la communication du PSE. «Grâce à cela, nous avons réalisé ce qu’aucun parti n’a réussi à faire : une consultation dans toute l’Europe! Un petit regret cependant, par faute de moyen, nous ne pouvons traduire notre site qu’en anglais et en français», concède-t-elle.

L’exemple Obama...

Au Parti populaire européen, autre poids lourd, on essaie de rattraper le retard face au PSE. Gemma Slaymaker est employée à plein temps pour gérer la communication du PPE sur internet. Elle est en charge du web du parti et de son groupe Facebook, elle se prépare à lancer le support électronique de la campagne des élections européennes. Dialogue TV, la webTV du PPE deviendra le site officiel de la campagne dès janvier prochain. Selon Gemma Slaymaker, il sera un véritable lieu d’interaction entre les sympathisants et le parti. En plus des vidéos, les internautes pourront réagir et poster des commentaires. Ils pourront aussi «tchatter» avec des «stars» politiques du PPE comme José Manuel Barroso, François Fillon ou Wilfried Martens. D’où le slogan : «Without your voice, it will result as a monologue. Welcome to Dialogue TV» (Sans votre voix, cela ne sera qu’un monologue. Bienvenue sur Dialogue TV). En anglais seulement...
Prochaine étape, développer la présence du PPE sur les réseaux sociaux. Le groupe du parti sur Facebook ne compte encore que 900 membres, contre plus de 2000 pour celui du PSE.
Trois autres europartis, le PVE, le PGE et l’ELDR, présents sur Facebook, comptent plus de 500 membres chacun. Le but ? Sortir des schémas traditionnels de campagne et donner la parole à des «personnes authentiques», pas forcément encartées mais facilement identifiables dans ces réseaux sociaux, afin de donner une crédibilité au message véhiculé.
Les europartis sont jeunes, ils existent depuis moins de cinq ans et ne possèdent pas à proprement parler de militants. Leur visibilité est limitée, ils sont difficilement identifiables en Europe. En quête de légitimité, ils misent donc sur le web 2.0 pour se rendre plus visibles aux yeux de leurs sympathisants européens.
Un modèle pour eux, Barack Obama, sacré champion du net. Un slogan, celui de son conseiller Chris Hugues, un des fondateurs de Facebook : «Keep it real and keep it local» (rester réel et rester local).

Gautier Demouveaux, à Bruxelles

 

 

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