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Le ventre, ce deuxième cerveau
À cause du stress, le Sélestadien Rémi Charles a pris sept kilos : “J’ai mal vécu ce moment, je me suis senti très seul. Je mangeais pour passer le temps.” D’autres ont vécu l’exact opposé. Ce chef d'entreprise de 38 ans basé à Sélestat raconte qu’il “n’avait jamais faim”. “Le fait de m’alimenter était passé au second plan”, regrette celui qui dit désormais essayer de vouloir reprendre de bonnes habitudes et faire à nouveau trois repas par jour.
Quand les rythmes se dérèglent
“Avec le confinement, je me suis pas mal déréglé”, raconte Florent Geslin, 42 ans : “Je déjeunais vers 14h et je dînais vers 21h30.” Une modification du rythme des repas qu’a également connue Justine Reibel. “J’ai eu tendance à vivre la nuit et à peu dormir certains jours”, confie l’élève scolarisée en terminale à Brumath, qui se sent “plus fragile”. Ces changements dans leur horloge biologique ont pourtant eu des effets opposés : là où Justine a perdu trois kilos, Florent reconnaît en avoir pris six. “Comme j’étais moins fatigué de mes journées, je me couchais tard”, explique-t-il. “Il m’arrivait de grignoter vers 23h30-minuit, juste avant de dormir.”
Pendant que Jean-François Grasser disait adieu à ses mauvaises habitudes, Rémi Charles et Florent Geslin en adoptaient d’autres. Le confinement a conduit le premier à “manger un paquet de biscuits par soir. Dès que j’ouvrais le paquet, je me l’enfilais en dix minutes”, avoue ce Sélestadien de 42 ans. Le second s’est mis à grignoter à cause du télétravail : “Quand tu bosses chez toi, tu as tout à portée de main. Entre deux réunions, tu prends un café et souvent un petit gâteau avec.” Contraint par la fermeture des marchés, il a dû remplacer les produits frais qu'il avait l'habitude de cuisiner par des produits transformés.
Tout l’inverse de Sylvie Gruber, quinquagénaire de Schiltigheim, qui a fait du confinement un allié. Bien qu’elle se présente comme une fervente adepte de la nourriture bio, il lui arrivait auparavant de “manger des plats préparés”, par manque de temps. “Pendant le confinement, j’ai commencé à m'organiser en achetant des paniers de légumes”, sourit-elle. “Maintenant, je préfère manger une salade de carottes plutôt qu’un plat tout fait. Avec le confinement, j’ai même eu le temps de manger des pommes !” Sylvie Gruber a perdu cinq kilos. Rien de volontaire mais “un sentiment d’être comme quand j’étais adolescente”, plaisante-t-elle.
Isolés chez eux pendant deux mois, les sportifs bas-rhinois ont dû adapter leurs activités physiques. Le sport à domicile a pu être un complément d’entraînement intéressant pour beaucoup. Mais loin d’être suffisant.
Quentin tend son arc et vise sa cible, placée à dix mètres de distance. Aucune brise de vent pour le perturber. Il se trouve dans le couloir de son appartement, à Strasbourg, où il reprend son hobby universitaire : le tir à l’arc. Mises au placard pendant plus de deux ans, les flèches de Quentin ont retrouvé une seconde vie à la faveur du confinement : “Je continue à faire quotidiennement une centaine de flèches. Ça travaille un peu le corps et ça permet de se vider la tête.” Comme lui, de nombreux sportifs ont dû s’adapter pendant les 55 jours de confinement et bouleverser leurs habitudes.
Redoubler d'ingéniosité
Privé de la salle de sport qu’il fréquente trois fois par semaine, Gislain Guidoni, stagiaire à la SNCF à Strasbourg, a innové pour continuer de pratiquer la musculation. Confiné au domicile familial à Wissembourg, il a utilisé des sacs de livres et des caisses de vin en guise de poids de 15 kilos pour les épaules et les dorsaux, sous le regard étonné de son père. “Même pas besoin de gants, j’avais assez de prise comme la caisse était en plastique !”
Le BMX bosse pour sa reprise
Les pratiquants de BMX ont aussi retrouvé les pistes à la mi-mai, comme celle en terre de Mothern, où le gendarme Quentin Bothet n’a "vu personne durant le confinement". Une reprise qui nécessite des consignes sanitaires spécifiques. Chaque pratiquant doit apporter son propre matériel, le nettoyer avant et après l’activité et se doucher désormais chez lui. Le département compte aussi trois espaces de vélo freestyle et 27 skateparks.
Depuis le 11 mai, le cyclisme fait partie des sports autorisés à la reprise par le gouvernement. Mais la mise en place de consignes sanitaires strictes rend sa pratique compliquée et oblige les coureurs à s’adapter.
Drôle d’ambiance lors du retour en forêt pour les vététistes bas-rhinois. En plus de gérer leur souffle, leurs vitesses et leur trajectoire, les vététistes doivent aussi garder dix mètres de distance entre eux. Dépassements interdits, sauf dans de rares zones très dégagées. De quoi provoquer des frustrations. “Si je fais du sport, c'est pour retrouver les potes et se raconter nos histoires”, rappelle Seb. “Si on doit garder dix mètres de distance, ça devient vite compliqué.” Après l’annonce du Premier ministre, Édouard Philippe, le 28 avril devant l’Assemblée nationale, la Fédération française de cyclisme a édité une notice pour préciser les contours de la reprise.
Un univers virtuel dans lequel donner ses concerts en ligne, c‘est ce que le groupe de techno strasbourgeois Crash Server a mis au point pendant le confinement. Le duo entend désormais faire de ces prestations à distance un rendez-vous mensuel.
“On peut discuter au bar si vous préférez", propose Sébastien Adam, musicien du groupe de techno strasbourgeois Crash Server. Nous ne sommes pas invités à prendre un verre dans une enseigne ordinaire, mais dans un bar univers virtuel, créé de toutes pièces pendant le confinement. Comme dans un jeu vidéo multijoueurs, les internautes peuvent s’y retrouver, discuter et assister aux concerts de live coding du groupe. Lui et Sébastien Van der Kwast, l’autre membre du duo, se servent du codage comme instrument de musique : en tapant des lignes de programmation associées à des notes et accords de musique, le groupe produit différents sons qui constituent un morceau. “En une heure d’apprentissage, tu peux déjà écrire une musique. Mais pour faire un set en live, il te faut au moins trois mois de pratique”, confie Sébastien Adam, qui a appris en 2018 auprès de son acolyte, formateur en motion design.
Une communauté active pendant le confinement
Les premières lignes de code de leur univers virtuel ont été écrites début avril, pendant le confinement. L’inauguration a eu lieu le 16 du mois lors d’un concert à distance retransmis à la fois dans cet univers et sur Youtube. Le duo se produit déjà une fois par an en streaming à l’occasion du festival TopLap, un rendez-vous incontournable de la communauté des live codeurs. Le groupe a surtout profité de cette configuration inédite pour multiplier les lives. Ses méthodes de travail, virtuelles, ont en effet été peu affectées par la quarantaine : “On a l’avantage de pouvoir travailler par écrans interposés, on peut jouer ensemble la même partition. On a pu faire cinq concerts en deux mois pendant le confinement, c’est beaucoup”, détaille Sébastien Adam, technicien de maintenance de profession. La multiplication de ces concerts a permis au groupe d’élargir son audience, notamment au cours d’une prestation pour un festival international qui devait se tenir à Prague mi-mai. “Les organisateurs ont dû le transformer en virtuel et le diffuser sur Youtube. Lors de notre passage, il y avait 140 personnes en live. Pour nous c’est pas si mal, c’était pas un gros festival non plus, si on les a dans une salle de concert, c’est déjà bien”, se réjouit Sébastien.
Les premiers chiffres d’une enquête de l’Inserm encore en cours révèlent que 50% des sondés dorment plus que d’habitude. Une grande partie d’entre eux était en dette de sommeil, et a donc profité du confinement pour rattraper le retard.
À Wissembourg, Alain Leibel a lui aussi remarqué que beaucoup de ses patients dormaient davantage qu’en temps normal. Selon le médecin généraliste, ce phénomène s’explique par “une forme de compensation de l’anxiété. Pendant qu’ils dorment, les gens ne pensent pas à autre chose.” Marc Rey, président de l’Institut national du sommeil et de la vigilance, fait la même observation. “Une des façons de réagir au stress, c’est de mettre la tête dans le sable. Mais ce sont des personnes en situation d’hypovigilance. Elles ne sont jamais bien endormies, leur sommeil est très morcelé.”
En pleine crise sanitaire, l'apprentissage de la musique a dû être repensé, au moyen d'outils technologiques qui ont permis d'innover. Dans le Bas-Rhin, ces pratiques alternatives ont séduit certains professeurs, qui entendent les pérenniser.
Pour beaucoup, cet épisode a été synonyme de réveils nocturnes et d’insomnies à répétition. Entre angoisses et manque d’activités, les corps peinent à tomber dans les bras de Morphée.
Cette nuit, comme toutes les nuits depuis bientôt deux mois, Céline Gaschler a trouvé sa fille de 5 ans dans le salon, toutes lumières allumées. Il est 3h30 du matin. La mère de famille cherche à comprendre. Ses deux aînés ont parfois connu des nuits agitées, mais Melody a toujours eu un sommeil de plomb. “Elle n’a jamais eu de problème pour dormir. Mais depuis la deuxième semaine de confinement, elle s’endort deux heures puis se réveille et ce, tous les soirs.”
Pour la docteure Annabelle Veit, il n’est pas surprenant de voir des enfants comme Melody passer la porte de son cabinet de Benfeld. “Depuis mi-avril, beaucoup de parents viennent consulter parce que leur enfant dort mal. Les problèmes de sommeil touchent absolument tout le monde : enfants, ados, adultes. Les consultations sur ce thème ont pratiquement doublé depuis le confinement.” La docteure Catherine Bastian, installée dans le quartier strasbourgeois de Cronenbourg, dresse le même constat : 80% de sa patientèle souffre de problèmes liés au manque de sommeil. Ces chiffres semblent coïncider avec la moyenne nationale : dans une étude réalisée par l’Ifop début avril, 74% des sondés déclaraient souffrir de troubles du sommeil depuis le début du confinement.