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“T’es lesbienne, non ? Vu que t’es tatoueuse.” Quand Jade Wilhelmy se met en débardeur, difficile de passer à côté de sa cinquantaine de tatouages, au grand dam de sa grand-mère. Visages, fleurs, vases, papillons, ses bras et ses jambes en sont recouverts. Normal, le tatouage, c’est son métier. Et du haut de ses vingt ans, cette grande blonde au visage fin très maquillé dénote dans le monde viril des tatoueurs.
“J’ai un peu honte, tout le monde te regarde.” Les remarques déplacées, Jade, n’en a plus grand chose à faire. “Pour beaucoup, le tatouage c’est encore synonyme de taulards et de drogués. Ce sont des clichés que partage surtout la génération d’avant.” Le tatouage, pas assez démocratisé ? En 2017, seul un français sur dix est tatoué chez les plus de 35 ans. Près d’un sur trois des 18-34 ans, eux, sont déjà passés sous le dermographe.
Une clientèle très féminine
Quand on rentre dans le salon Art à Vie de Jade à Eckbolsheim, en Alsace, pas de légendaires têtes de mort ni de traditionnel hard-metal. Son local est lumineux et accueillant, les affiches aux murs sont design et la déco soignée. “J’ai voulu un endroit à mon image, qui colle à mon style de dessin”, explique-t-elle.
Son credo : les statues grecques, le feuillage et les écritures gothiques. Le tout en lignes fines. “Mon travail attire surtout des femmes. J’en tatoue une cinquantaine par mois, contre six ou sept gars. Mes clientes viennent me voir parce que je suis moi-même une fille, ça les rassure. Surtout quand elles veulent un tatoo à un endroit délicat comme les côtes, les seins ou les fesses”.
Forcément, il y a une grande intimité qui se crée entre elle et ses clients. “Je partage leur projet de tatouage, l’histoire qu’il y a derrière. Il y a aussi une proximité physique. Je les touche, il y a du sang, ce n’est pas rien.” Tout l’enjeu est de trouver la bonne distance entre tatoueur et tatoué. “Je fais très attention où je pose mes mains, surtout quand je travaille sur un homme. Je ne veux pas qu’il se fasse des idées”. Parce qu’entre la douleur, l’excitation du tatouage et la sécrétion d’endorphines, certains en profitent pour tenter leur chance. Capotes glissées avec le paiement, soutien-gorges dégrafés : “Les clientes aussi ne se gênent pas pour draguer mon copain.”
Parce que le copain de Jade, Hugo, est aussi tatoueur. Ils travaillent ensemble au salon, et ça, ça la sécurise. “Quand j’ai débuté, je recevais mes clients à côté du labo de mon papa photographe. Maintenant, je partage mon local avec Hugo, je me sens protégée. On ne sait jamais sur qui on peut tomber, et on ne va pas se le cacher, le tatouage ramène aussi des gens pas très rassurants. Comme ce mec tatoué et percé de la tête aux pieds, qui s’est fumé son joint en pleine séance.”
“Le tatouage c’est la meilleure manière de vivre du dessin”
Après des études d’esthétique, Jade a décidé de plaquer ce “monde de meufs”. “Je n’aimais pas du tout l’ambiance. Comme je dessinais dans mes cahiers et que j’ai toujours été attirée par le tatouage, j’ai racheté le kit d’apprenti tatoueur d’un ami. J’ai fait mes premiers tests sur des fausses peaux, puis sur moi.” Pas très concluant au départ : Jade fait recouvrir son premier auto-tatoo quelques mois plus tard.” Elle quitte alors son Alsace natale pour Montpellier, où elle va faire ses classes à l’école du tatouage EOMTP. “J’ai réalisé que tenir un crayon et un dermographe, c’était très différent. Mais ça a confirmé ma vocation. Quand tu aimes le dessin, le tatouage c’est la meilleure manière d’en vivre.” Aujourd’hui, la jeune auto-entrepreneuse cherche à déménager son salon dans le centre de Strasbourg, pour avoir une véritable vitrine pour son travail.
Instagram de Jade : https://www.instagram.com/artavie_ttt_/?hl=fr
Eléonore Disdero
L'esport* est un tel phénomène que certains pays ont décidé de l'intégrer à leur système scolaire. C'est le cas de la Suède, où, à la rentrée 2019, plus d'une vingtaine de lycées proposaient d'étudier la discipline. À Nässjö, Stockholm, Göteborg, Borås, Norrköping … «Maintenant, il n'y a pas une grande ville suédoise sans lycée avec une formation en esport», constate Jonte, ancien lycéen option esport à Sävsjö, au sud du pays. Lorsqu'il a commencé en 2015, seulement trois établissements offraient cette possibilité. Maintenant, comme lui, des centaines d'adolescents suédois s'entraînent plusieurs heures par semaine aux jeux vidéo, comme on s'entraîne au volley ou au foot avec l'équipe de l'école.
Où en est la France ? Loin d'être épargnée par la fièvre de l'esport, alors que le match entre Karmine Corp et Solary, deux équipes mastodontes de la scène de League of Legends française, réunit plus de 3 500 spectateurs au Palais des Congrès de Paris, les enseignements de la discipline dans les établissements français n'en sont qu'à leurs balbutiements.
En Suède, une affaire de famille
Si la Suède est autant en avance, c'est que le pays scandinave est l'un des pionniers de la discipline. Il a accueilli les premiers événements liés aux jeux vidéo avant ses voisins européens. « L'esport est notamment né de Counter-Strike, qui émerge en 2000 », explique le français Jonathan Grotzinger, ancien chef de projet de l'entreprise suédoise d'esport ESEN. « Les premières LAN, des événements de partage de données sur des serveurs, avaient lieu entre des codeurs ou DJ par exemple. Et puis, la plupart étaient mordus de jeux vidéo. Ils ont alors pensé à se réunir pour jouer ensemble. » Ainsi sont nés les premiers gros événements esports, autour de Counter-Strike, jeu extrêmement populaire chez les Scandinaves. « Les enfants qui l'ont aimé à sa sortie ont maintenant des enfants. Ils sont devenus des parents sensibilisés et ouverts au jeu vidéo », avance Pierre Loup, ex-manager d'équipes d'esport en France.
En Suède, les familles voient d'un œil positif, sinon bienveillant, la discipline regardée en France avec tant de méfiance. « Là-bas, le jeu vidéo, c'est très famille, ça se transmet. Souvent, les parents initient leurs enfants à ce milieu-là », explique Jonathan Grotzinger. En participant aux conventions "Dreamhack", particulièrement populaires dans un pays et dans l'autre, cette différence lui saute aux yeux : « En France, il y avait très peu de familles. Pour le peu de jeunes accompagnés, on sentait de la part de leurs parents de la crainte, voire de la défiance. En Suède, c'était tout l'inverse. Les enfants devaient presque retenir leurs parents, tant ils étaient partout. » Avec des familles conquises et une histoire ancienne, logique que les jeunes nordiques se tournent plus facilement vers cette discipline dès les études secondaires.
Les Français très scolaires
Malgré une culture plus tardive de l'esport, malgré la méfiance des parents, la France compte tout de même rattraper son retard. Quelques initiatives dans des lycées existent. À Mulhouse, le lycée Louis Armand propose une option esport aux lycéens depuis trois ans, en partenariat avec la Power House Gaming (PHG) Academy. Une expérimentation encore nouvelle, mais positive : une enquête interne à l'établissement montre qu'une partie des élèves a vu ses notes augmenter depuis leur participation – et aucun n'a déclaré de baisse. Dans les Yvelines, une initiative similaire commence à la rentrée 2021, en collaboration avec l'association France Esports. « Ces établissements pilotes sont convaincus que le système éducatif n'est pas adapté à tout le monde. Ils pensent que les jeux-vidéos peuvent permettre de développer des compétences utiles et lutter contre la fracture numérique », témoigne son vice-président Nicolas Besombes. À la différence de la Suède qui mise sur l'esport compétitif, l'éducation nationale conçoit ces projets autour d'objectifs pédagogiques très scolaires : la concentration, l'apprentissage de l'informatique … La compétition reste l'angle mort de ces projets. Retard dans la sphère scolaire ne signifie pas retard général. Sur d'autres aspects, l'hexagone n'est pas en reste, souligne Nicolas Besombes : « La France est en avance sur l'organisation de grosses compétitions, les questions de droit des joueurs professionnels ainsi que sur le tissu associatif.»
Emma Bougerol
*pour electronic sports, défini par l'association France Esports comme « l’ensemble des pratiques permettant à des joueurs de confronter leur niveau par l’intermédiaire d’un support électronique, et essentiellement le jeu vidéo, et ce quel que soit le type de jeu ou la plateforme (ordinateur, console ou tablette) »
Quatrième épreuve : le Baby-foot humain.
Vous ne vous êtes jamais demandé ce que pouvait ressentir un joueur de baby-foot ? Quelle frustration cela doit être de rester coincé à une barre de fer et de ne pouvoir aider l’équipe qu’à travers des déplacements latéraux. Nous y voilà. Dans ce stade à taille humaine, pas de roulettes possibles. La barre piège les joueurs au niveau des avants-bras. Pour un homme de taille moyenne, il faut bien baisser la tête pour continuer de voir le ballon. Allons aux cages, mon poste favori. Le défi : marquer de loin comme j’aime le faire au baby-foot. Succès de la mission. On peut la jouer plus collectif maintenant. Les autres joueurs n'apprécient guère l'expérience. De mon côté, je réalise un rêve secret d’enfance.
Cinquième épreuve : l’Arène multisports.
Trop fatigués pour la dernière épreuve, beaucoup des camarades m’abandonnent pour jouer au « Puissance 4 » à taille humaine. J’étais regonflé à bloc à l’idée de tester cette arène gonflable et de jouer au foot ou au basket en bondissant, retenu par un élastique. Peut-être un peu trop physique pour les plus vieux. Après une petite partie de goal-à-goal, gagnée 4-2, mon dernier partenaire de jeu jette l’éponge. Je me lance dans une séance de décrassage avec des tirs au but et quelques dribbles rebondissants pendant encore un bon quart d’heure, avant de rejoindre le reste de la troupe.
Fin de partie
Ils sont attablés dans la partie bar de l’accueil, en pleine partie de « Jungle Speed ». Je viens remporter la partie grâce à mon expérience acquise à l’école. Mais l’esprit lutin commence à s’évaporer. Les discussions ennuyantes d’adultes reprennent : ça parle abonnés, soirée… Il est donc temps de filer à l’anglaise, le cœur comblé de gaieté folâtre.
Rafaël Andraud
Deuxième épreuve : le “Combat des sumos”
Le premier qui touche le sol est déshonoré à jamais. D’un côté du ring : Nicolas 34 ans, 90 kilos, gonflé à bloc comme son costume de sumo. De l’autre : Rafaël, 11 ans de moins pour un petit 58 kilos, nageant dans sa combinaison. Duel déséquilibré... Surtout : ne pas se démonter, jouer de sa vitesse, être vif comme l’éclair. Ding ding ding, le combat commence : nous enchaînons les bonds pour prendre de l’élan. Les deux carcasses de plastique gonflées se fracassent dans un couinement ridicule. Nous sommes tous les deux projetés en arrière, il faut absolument garder son équilibre. Maintenant, on doit à nouveau se lancer, pour profiter de la fatigue adverse. Dans les contes, les faibles remportent toujours le combat contre les forts par la ruse : j’esquive son assaut plein d’élan. Entraîné par sa puissance, il se retrouve au sol, et, en guise d’humiliation finale, je lui saute dessus. Victoire ! Je bondis de joie, saluant la foule imaginaire. Finalement, le plus difficile dans cette épreuve est de s’extirper de la combinaison pesante de plastique gonflé, dans laquelle le sumo sue trop.
Troisième épreuve : les Joutes de gladiateurs.
Nicolas veut sa revanche. O.K. Réglons ça dans l’arène. Au milieu des boudins d’air se trouvent deux plots et deux joutes. Chacun prend la sienne, se met en équilibre sur les plots et l’affrontement commence. Quelques chocs de joutes et me voilà au sol. Je n’aime pas perdre, je demande une revanche… Puis la belle. Cette fois, le match est plus serré, je me sers du coton-tige géant tel le double sabre laser de Dark Maul dans Star Wars : La Menace fantôme. Mais rien ne menace l’équilibre de Nicolas. Il parvient à parer mes attaques et porte le coup fatal. En pleine chute, je tente un dernier assaut, en vain… J’ai perdu 3-0...
Le monde des adultes me paraît toujours trop sérieux, ennuyant. The Square Indoor, repéré durant ma dernière crise de nostalgie de l’enfance en fouinant sur internet, me faisait de l'œil. Le site internet pose les questions qui taraudent : “Pourquoi diantre les grands devraient toujours regarder les plus jeunes s’éclater et souffrir en silence ? Vous rêvez secrètement de barboter dans des milliers de boules avec une licorne ?” Je clique illico sur le bouton “Mais grave, je réserve”.
“Nagez dans le bonheur, comme si les impôts n’existaient pas”
Le lieu est caché dans la zone commerciale de Geispolsheim. Derrière un magasin, un panneau discret “The Square Indoor” glisse un “Pssst, c’est juste là !”. L’entrée : une toute petite porte. L’affiche y rappelle que “ce n’est QUE pour les adultes”. À l’intérieur, un paradis pour grands enfants de 960 m2. Avec, dès l’accueil, un sas de passage entre le monde de l’adulte et celui de l’enfance : la piscine à boule, dont les bords arborent “Nagez dans le bonheur, comme si les impôts n’existaient pas”. J’y plonge directement. Ce bain de sphères de couleur ? Une sensation unique que l’on ne connait que dans l’enfance. Une sorte de madeleine de Proust qui métamorphose quiconque en petit garçon. Un état d’esprit que je conserverai pour tout le reste de l’aventure.
Je m’incruste dans un groupe de six trentenaires. L’un d’eux, Pharel Green, “influenceur” strasbourgeois, a rameuté quelques abonnés. Jeux gonflables, escape games, Puissance 4 géant, morpion-basket et foot-billard défilent devant nos yeux ébahis. Toute la salle est rien que pour nous. Ensemble, nous traverserons “Les cinq épreuves gonflables”
Première épreuve : l’Attrape-mouche.
Frustrant. L’objectif est de se jeter contre un mur scratché, avec une combinaison elle aussi en scratch, et d’aller le plus haut possible. Résultat : je n’accroche pas au mur, ni à l’activité. Elle ne renvoie pas vraiment à l’enfance, aucun bambin ne rêve de se jeter sur un mur, du moins j’espère. Au contraire, on pourrait la concevoir comme l’allégorie, très adulte, des objectifs que l’on se fixe et que l’on n’atteint jamais, si le sol était l’échec. Passons vite à une autre épreuve...