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Perrine et l’homme Desproges

Difficile alors de ne pas l’encenser et le porter au panthéon limité des hommes drôles et engagés, qui ne finiront sans doute jamais au Panthéon. Mais heureusement sa fille Perrine, quand elle cesse de parler de « Pierre » pour dire « mon père », fait entendre quelques-uns de ses défauts.

Pierre avait besoin « de plaire à la folie », était jaloux, aimait les westerns mais pas la Nouvelle Vague. Il la prenait dans ses bras mais était intransigeant sur le français, se foutant des maths, quelle futilité. Aimait d’amour sa femme, sa première lectrice mais pouvait être très « chiant » avec elle. Jouait au ping-pong, était un mauvais acteur, un misanthrope pessimiste qui avait besoin de ses amis. S’est essayé à la chanson, mais n’a pas eu le temps de devenir parolier, quand bien même il aurait peut-être eu l’envie de fustiger en musique quelques trous de balle supplémentaires, s’il n’avait passé l’arme à gauche.

Société constipée ou patrons de chaîne bâillonnés ?

Bien loin de cette intimité de l’homme, l’humoriste réapparaît surtout régulièrement dans les débats sur la liberté d’expression. Réalité un peu triste : avoir besoin de l’invoquer, c’est un peu le constat d’un échec, même s’il reste un Canard enchaîné  et que les plumes engagées façon Charlie Hebdo ont encore la liberté de se faire canarder sous les hourras de la sympathie populaire.

La société des années 1980 était plus permissive diront certains. C’est faire l’impasse sur la pile des courriers de lecteurs indignés, reçue à chaque émission du Petit rapporteur, ou chaque réquisitoire inspiré du Tribunal des flagrants délires.

Surtout, c’est oublier que ce sont les chaînes et les producteurs qui décident du contenu, et donc eux les premiers censeurs. A l’époque, ces brillantes diarrhées linguistiques sont autorisées par un Bernard Lion, producteur, ou un Jean-Louis Fournier, alors réalisateur de la Minute nécessaire de Monsieur Cyclopède, sur FR3.

 

Aujourd’hui les réseaux sociaux font un peu trop enfler chaque polémique, que tout un média et certains humoristes cherchent à éviter. Et de laisser en suspens cette question : ce n’est peut-être pas tant qu’on ne peut plus dire ce que Desproges aurait dit il y à 30 ans, mais qu’on s’empêche de dire.

Que reste-t-il alors de Pierre Desproges ? Des vieux os, des émissions de France Inter enregistrées sur de veilles cassettes pour les inconditionnels, l’image d’un sourire mutin, et la promesse ténue d’une irrévérence future.

Dans la salle de cinéma, mercredi soir, très peu de jeunes et peut-être les deux tiers des sièges vides. C'est malheureux. C'est tant mieux : si, miracle de la mort oblige, Pierre était soudainement devenu consensuel, il ne serait plus vraiment Desproges.

Emilie Sizarols

« On ne pourrait plus dire aujourd’hui ce que disait Pierre Desproges il y a 30 ans » ? Pas si sûr, n’en déplaise au film documentaire diffusé en avril sur France 5, et mercredi à l’Odyssée de Strasbourg.

Il est loin le temps où on pouvait rire de tout, mais pas avec tout le monde. 30 ans au bas mot : la date de la mort de l'humoriste Pierre Desproges.

C'est du moins cette nostalgie que fait entendre le documentaire Une plume dans le culte, titre hommage et évocateur à l'appui, projeté mercredi au cinéma l'Odyssée à Strasbourg, en présence de son réalisateur Christophe Duchiron et de Perrine Desproges. Son père, le poète du quotidien, le sympathique provocateur, le désespéré passionné, apparaît à l’écran tantôt à poil, tantôt fustigeant avec un brio cynique Jean-Marie Le Pen, souvent éloquent dans ses silences.

Et la poésie suggérée de Duchiron ne manque pas d’adjectifs pour le décrire. Irrévérent. Vertuose de la langue. Hypersensible. Pourfendeur de cons. Unique...Il est vrai qu’aujourd’hui tous les ingrédients de la sauce Desproges sont difficiles à rassembler dans un même panier. 

Est-ce à dire qu’on a renoncé à rire de tout, pour parler à tout le monde ? 

Quelques humoristes revendiquent encore cette irrévérence. Christine Angot était presque assez exaltée dans son sketch face à François Fillon lors de la campagne présidentielle de 2017 ; Jérémy Ferrari, a survécu à son one-man-show évoquant les attentats du Bataclan, et à la dernière cérémonie des Molières de l’humour, Blanche Gardin a choisi de se remettre elle-même son prix, agrémentant son discours d’un provocateur « on me dit que des Juifs se sont glissés dans la salle ». Bref, Pierre Desproges a eu beaucoup d’enfants.

Benjamin Stora, La gangrène et l’oubli. La mémoire de la guerre d’Algérie (La Découverte, 1991)

Pourquoi l’Etat français a-t-il mis 60 ans pour reconnaître sa responsabilité dans la disparition de Maurice Audin ? Le livre de l’historien Benjamin Stora, né en Algérie, peut nous fournir des indices. Stora propose de revenir sur les raisons de « l’oubli » qui s’est installé sur les événements de la guerre, en France comme en Algérie. En 1987, Henry Rousso a publié Le Syndrome de Vichy, allant aux racines de l’oubli collectif sur les faits de collaboration pendant la Seconde Guerre mondiale. Avec La gangrène et l’oubli, Benjamin Stora fait de même pour cette autre guerre qui a provoqué une amnésie toujours pas totalement résolue.

Martin Greenacre

Marnia Lazreg, Torture and the Twilight of Empire : From Algiers to Baghdad (Princeton, 2008)

L’ouvrage de la sociologue d’origine algérienne Marnia Lazreg, « La torture et le déclin de l’empire colonial : D’Alger à Baghdad », n’a pour le moment pas été traduit en français. Mais c’est un livre important qui nous rappelle que la torture n’est pas simplement un phénomène historique, mais a une dimension contemporaine. En 2003, le Pentagone projette La Bataille d’Alger, un film de 1966, qui met en scène la torture utilisée par l’Armée française entre 1954 et 1957. Les Etats-Unis sont alors en pleine guerre d’Irak, et ses dirigeants militaires s’inspirent de l’expérience française en Algérie pour apprendre à combattre le terrorisme. Lazreg démontre les similarités entre les méthodes utilisées par les Français et l’administration de George W. Bush, ainsi que les modes de transmission. La notion de la domination coloniale est-elle applicable aux guerres du 21ème siècle ?

Revenu universel : quelles différences entre Macron et Hamon ?

13 septembre 2018

Revenu universel : quelles différences entre Macron et Hamon ?

Le projet annoncé par le Président de la République est bien éloigné de celui proposé par le candidat PS à la présidentielle en 2017.

Cette carte interractive présente la situation des différents pays européens en matière d'IVG, en septembre 2018. Les Etats à la légslation la plus dûre sont Malte, Chypre, Andorre, Monaco, la Pologne et le Vatican.

Raphaëlle Branche, La Torture et l’Armée pendant la guerre d’Algérie, 1954-1962 (Gallimard, 2001)

Si l’on veut s’interroger non seulement sur le « quoi » de la torture, mais aussi sur le « pourquoi », le livre de l’historienne Raphaëlle Branche s’impose. L’ouvrage est riche en témoignages écrits et interviews réalisées par l’auteur avec les tortionnaires mêmes. Branche met en lumière le symbolisme au cœur de cette forme de violence. Elle explique que, « plus que faire parler, elle voulait faire entendre », montrant que, contrairement à la croyance populaire, le premier but de la torture n’est pas d’obtenir des renseignements. Il est de semer la peur, de terroriser, et d’imposer la supériorité d’un groupe sur toute une population.

Pierre Vidal-Naquet, La Torture dans la République : essai d’histoire et de politique contemporaine, 1954-1962 (Minuit, 1972)

Historien et militant contre la torture, Pierre Vidal-Naquet enquêtait déjà sur le sujet pendant les « événements » en Algérie. En 1958, peu après la sortie de La Question, il publie son premier livre, L’Affaire Audin, dans lequel il affirme que Maurice Audin ne s’est pas évadé, mais est mort aux mains des parachutistes. Il va plus loin avec son livre de 1972, démontrant que la gangrène qu’est la torture impliquait les plus hauts échelons de l’Etat français. Un livre essentiel pour comprendre les répercussions de l’utilisation des interrogations violentes sur la démocratie.

Henri Alleg, La Question (Minuit, 1958)

C’est l’un des livres qui ont éveillé le monde aux réalités de la torture en Algérie. Le journaliste franco-algérien Henri Alleg travaille au journal communiste l’Alger Républicain jusqu’à son interdiction en 1955, mais il continue à envoyer des articles à l’Humanité. Alleg est interpellé par l’armée française à Alger le 12 juin 1957, au domicile de son ami Maurice Audin, arrêté la veille. La Question est le récit de sa torture dans une villa du quartier d’El-Biar, en compagnie de Maurice Audin. Officiellement, ce dernier « s’est évadé » par la suite, lors d’un transfert.  Alleg détaille les méthodes de torture qu’il a lui-même subi. Elles sont à la fois physiques (la gégène, par exemple), et psychologiques (menaces sur sa famille, propos et actions pour nier son humanité). Le livre est immédiatement censuré, mais continue à être imprimé en Suisse et des exemplaires clandestins arrivent en France. Les descriptions sont bouleversantes. Un livre indispensable.

Coup de pouce à la création

Toutefois, Musica n'est pas qu'une grande scène dédiée aux hommages et autres reprises. C'est aussi un lieu où chaque année, dix compositeurs de musique contemporaine présentent le fruit de trois ans de travail, en point d'orgue d'une formation en partenariat avec l'académie de composition. Pendant le festival, ces artistes venus du monde entier travailleront dur à la finalisation d'une œuvre, sous l'égide de Philippe Manoury et Luca Francesconi, tous deux compositeurs classiques de renom, interprétée et enregistrée à la fin du festival.

Avec quelque 17 000 spectateurs attendus cette année, le festival espère conforter sa place de grande manifestations européenne consacrée à la musique contemporaine. Et pour cet anniversaire, David Jisse, journaliste musical et figure emblématique du festival, qui reviendra sur 35 ans de souvenirs, d'impressions et d'émotions dans « Comme à la radio », un concert sous casque, nourri d'archives, de sons d'ambiance et d'entretiens. Toute la programmation du festival est à retrouver par ici.

La programmation du festival à retrouver ici : http://www.festivalmusica.org/programme

Boris Granger

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