Mardi 16 septembre, Mohamed B. a été condamné à 15 mois de prison ferme et à une interdiction définitive du territoire français par le tribunal de Strasbourg, pour avoir agressé un des résidents de son squat. Son avocate regrette une peine sévère, qu’elle impute à la situation administrative irrégulière de son client.
Le tribunal de Strasbourg a jugé Mohamed B. en comparution immédiate le 16 septembre.
Photo : VBlock
À l’écoute de sa peine, Mohamed B. est pris de sanglots. Il semble perdu. Son regard inquiet jongle de gauche à droite, cherchant tantôt l’appui de son interprète, tantôt celui de son avocate. Le cliquetis des menottes qui se referment sur ses poignets résonne dans la salle du tribunal de Strasbourg, l’homme est évacué. Le président Marc Picard vient de le condamner à 15 mois d’emprisonnement ferme et à une interdiction définitive du territoire français, se calquant rigoureusement sur les réquisitions du procureur. « Ce sont des faits très graves », lâche sobrement le juge.
10 septembre, 12h35, Strasbourg. Une équipe de police découvre Mohamed B. 33 ans, ensanglanté dans la rue du Faubourg de Saint-Pierre. L’homme qui vient de dissimuler un tesson de bouteille sous une voiture arbore plusieurs plaies sur les bras et les paumes. Il sort d’une altercation avec l’un des résidents du squat qu’il occupe. Ce dernier présente pour sa part de multiples lésions au visage et au cuir chevelu. Les deux protagonistes sont hospitalisés.
Une altercation dans un squat
Selon un témoin, le prévenu aurait tenté de squatter un autre appartement que celui qu’il occupait, lorsque la victime l'en aurait empêché. Suite à une bousculade, Mohamed B. se serait éclipsé, puis serait revenu, alcoolisé et titubant, avant d'asséner un coup de bouteille de whisky dans le visage de son antagoniste. L’homme aurait alors retourné les tessons contre lui et aurait fui dans la rue avant de tomber face aux policiers qui l’ont interpellé. Une version que son avocate (qui souhaite conserver l’anonymat), trouve peu convaincante et couverte de zones d’ombre.
Mohamed B. prétend pour sa part s’être fait voler ses affaires dans le squat. La victime l’aurait empêché de les récupérer en le menaçant avec un tesson de bouteille. Le prévenu lui aurait alors retiré le verre des mains (justifiant ainsi ses plaies), avant de lui assener plusieurs coups-de-poing au visage.
« On n’a retrouvé aucun débris de verre dans l'appartement de la victime, aucun. Et le médecin légiste déclare que ses blessures sont parfaitement compatibles avec sa version des faits », balaie le président Marc Picard.
« Il n’a pas le vécu d’une personne lambda »
L’avocate du prévenu résume : « On ne saura jamais quel est le fin mot de l’histoire, mais il ne faut pas tout balayer d’un revers de main et dire que mon client raconte n’importe quoi. Il n’a pas le vécu d’une personne lambda », présente-t-elle, arguant que l’impulsivité de Mohamed B. tient de la précarité dans laquelle il vit depuis qu’il a quitté la Tunisie. La défense tient également à rappeler que le prévenu n’a jamais été condamné. « Oui, il n’a pas réagi de la manière dont il aurait dû, mais je pense que ce sont des éléments qu'il faut prendre en compte », conclut-elle.
Une argumentation qui ne convainc en rien le juge Marc Picard. Le délibéré ne s'éternise pas, après quelques minutes d’attente, le jugement est nonchalamment annoncé. Au sortir de l'audience, l’avocate du condamné arbore une mine désolée. « Je pense que la sentence aurait été différente s'il n’était pas dans une situation administrative telle que la sienne », regrette-t-elle, arguant que sa venue en France sans titre de séjour a pu influencer la décision du président.
Tom Soriano
Édité par : Titouan Catel--Daronnat et Maud Karst