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Le prix du comprimé


12 février 2015

Avouant son impuissance à agir directement sur les prix des médicaments, l'Union européenne cherche d'autres pistes pour améliorer l'accès des consommateurs européens aux produits innovants. Le sujet était mercredi soir de retour dans l'hémicycle de Strasbourg, où les députés ont échangé avec la Commission et le Conseil.

Le prix de certains médicaments innovants, surtout quand il s'agit de maladies rares, est un obstacle évident à leur accès. Ce constat était le point de départ des discussions, mercredi soir, au Parlement européen. Malgré sa bonne volonté, l'Union ne peut guère intervenir qu'à la marge, parce que ses compétences dans ce domaine sont modestes a reconnu la Commission en annonçant la mise en place d'un nouveau groupe d'experts appelé STAMP (Safe and Timely Access to Medicines for Patients). Son rôle sera d'explorer les systèmes  nationaux de régulation afin de trouver des moyens d' accélerer les procédures administratives qui freinent l'arrivée des nouveaux médicaments sur le marché.

Le débat avait un air de déjà-vu: en septembre dernier les eurodéputés l'avaient déjà engagé suite au cas très médiatisés dans plusieurs pays (parmi lesquels la France) du sofosbuvir – traitement prescrit pour l'hépatite C, mais extrêmement coûteux. La Commission avait alors demandé aux États membres de renforcer leurs échanges d'informations volontaires sur les mécanismes de formation des prix et de remboursement des produits pharmaceutiques.

Pas de base juridique pour agir

Mercredi soir, le commissaire en charge de l'aide humanitaire et de la gestion des crises, Christos Stylianides, a rappelé que la réglementation des prix et les conditions du financement public des médicaments demeurent des compétences exclusives de chaque pays. Sans base juridique pour plus d'action, il s'est simplement engagé à continuer à aider les États membres à atténuer les effets financiers négatifs subis par les patients et les systèmes de santé. “L'UE a besoin de développer un mécanisme d'AMM (Autorisations de mise sur le marché) flexible pour les médicaments”, a avancé, quant à elle, la secrétaire d'Etat lettone aux affaires européennes Zanda Kalnina-Lukasevica, au nom de la présidence du Conseil.

 

“La vie n'a pas de coût”

Il faut arrêter le profit des laboratoires au dépens des patients...”, a martelé la française Michèle Rivasi vice-présidente des Verts. Parmi ses propositions figurent l'option d'achats groupés (par plusieurs ou tous les pays membres) pour certains médicaments, une modification du régime des licences obligatoires ou même la suppression des brevets dans les cas exceptionnels. Même logique chez l'espagnol Pablo Iglesias du groupe GUE/NGL – qui réclame un changement des règles sur les droits de propriété intellectuelle pour les produits de santé.

L'allemande Gesine Meissner (ALDE) penche pour la facilitation de l'accès aux molécules génériques et biosimilaires qui, d'après elle, découragerait le tourisme médical. Son collègue portugais Jose Inacio Faria a plaidé pour une plus grande coopération entre les Etats membres afin qu'ils trouvent des moyens pour négocier ensemble les prix des médicaments avec les entreprises.

Les groupes du PPE et des Socialistes & Démocrates ont présenté des positions proches, soulignant le besoin d'introduire des analyses du rapport coût–avantage pour les nouveaux produits pharmaceutiques. Cela, affirment-ils, permettrait de connaître la vraie valeur ajoutée et l'efficacitée des molécules, ce qui renforcerait la transparence dans le processus de négociation de leur prix. “Il faut trouver un équilibre entre les besoins des patients et les profits de l'industrie”, a affirmé Anna Zaborska (PPE).

Autant d'idées qui pour Julie Girling, du groupe des Conservateurs et réformistes européens (ECR) relèvent de la  “politique économique de conte de fée”. Il s'oppose à tout transfert de ce type de compétences au Parlement.

 Le groupe de travail sur la santé publique se réunit mardi prochain à Bruxelles pour discuter de ces défis.

Tsvetana Balabanova

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