Depuis début septembre, les manifestations dans les rues de Martinique ne se calment pas. Les tensions sont telles que les autorités ont instauré à Fort-de-France un couvre-feu depuis le 18 septembre. Le sujet du malaise : la vie toujours plus chère en Outre-mer.
“Il faut se mobiliser pour la dignité des vies d’enfants”, intime Frédéric Bierry, président de la Collectivité européenne d’Alsace (CeA), ce mardi 24 septembre. Des mots qui sonnent fort la veille de la mobilisation du secteur de la protection de l’enfance à Paris, à l’appel du collectif “les 400 000”.
230 enfants en danger
Le président de la Collectivité européenne d’Alsace dresse un constat alarmant. 230 enfants sont en attente d’une mesure de placement en Alsace. C’est 30 de plus qu’en octobre 2023. Une hausse des besoins qui ne s’accompagne pas d’une hausse de moyens humains. En Alsace, le secteur a du mal à embaucher des familles d’accueil. “On a perdu 93 assistants familiaux (familles d’accueil, ndlr) depuis 2021. La majorité sont partis à la retraite…”, déplore Ludovic Maréchal, directeur de l’aide sociale à l’enfance à la CeA. “On ne trouve plus d’éducateurs spécialisés ni d’assistants familiaux”, abonde Frédéric Bierry.
Des bénévoles pour accueillir les enfants
Pour répondre à ces manques, la Collectivité européenne d’Alsace lance un nouveau dispositif : l’accueil solidaire alternatif (ASA). Fixé par la loi Taquet de 2016, il a pour objectif de chercher d’éventuelles personnes ressources susceptibles d’accueillir l’enfant, avant tout placement en foyer. Des bénévoles, dont les fonctions ressemblent à celles des assistants familiaux. “C’est majoritairement les grands-parents, oncles et tantes”, glisse Sandrine Jahnke, qui gère le service. “On fait face à une situation sociale grave et on a besoin de responsabiliser nos concitoyens”, explique Frédéric Bierry, qui compte sur la solidarité des Alsaciens.
Du côté des établissements d'accueil, les places manquent aussi. Le projet de Maison d’enfants à caractère social (MECS) de 22 places qui devait ouvrir en septembre à Colmar a de nouveau été repoussé à avril 2025 en raison de contraintes techniques et de sécurité.
Adèle Pétret
Édité par Paul Ripert
Derrière la caisse d’une petite épicerie libanaise de la Krutenau, à Strasbourg, Sarah Ftouni, franco-libanaise, scrute Al Jadeed, chaîne d’information en continu la plus regardée du pays. Depuis les bombardements israéliens du 23 septembre, ciblant la milice chiite du Hezbollah au Liban, l’angoisse règne pour Sarah et son mari. "Le contact avec nos familles est difficile, le réseau ne passe pas très bien, explique la trentenaire. Hier on a pu leur parler mais ils étaient encore en état de choc."
La famille de Sarah vit dans le sud du pays, zone la plus touchée par Israël. Lundi 23 septembre, les frappes israéliennes ont fait 500 morts et 1 600 blessés dans un pays déjà meurtri par l’attaque des bippeurs. Comme beaucoup de Libanais, ses proches ont dû fuir plus au Nord, en direction de Beyrouth. "Hier, au moment où ils évacuaient, une frappe aérienne les a séparés. L’évacuation était compliquée surtout qu’il y avait des enfants", précise la gérante de l’épicerie. Whatsapp lui permet de maintenir un semblant de contact avec ses proches mais la femme de 39 ans craint que la guerre emporte sa famille. "On s’attend à ce que ça tape encore plus fort. Pour le moment, c’est le désespoir et la peur qui priment sur la colère." A quelques encablures de là, devant une seconde épicerie, le sujet est encore trop délicat à aborder. "La politique, ce n'est pas notre truc, on préfère s’assurer que tout le monde est en sécurité", élude un client tandis que la gérante indique "ne pas vouloir parler de ça maintenant".
Très proche et soudée, la communauté libanaise échange beaucoup sur le sujet depuis ce matin.
"Depuis la France, on se sent impuissants"
La gérante recommande un restaurateur, lui aussi libanais et dont la famille enchaîne les déplacements depuis l’attaque du Hamas le 7 octobre 2023. Hamza*, collier de barbe blanche et téléphone en main, attend des nouvelles de sa famille.
"À Chihine, village à 3 km de la frontière israélienne où je suis né, il reste à peine 10 maisons encore debout", rapporte le Libanais qui réside en France depuis 2004.
Sa sœur, ses frères et leurs enfants vivent encore là-bas. En décembre 2023, après l’attaque terroriste du Hamas contre Israël le 7 octobre 2023 qui a fait près de 1200 morts, ils ont quitté le village natal pour Tyr, la grande ville balnéaire du Sud du Liban, à 25km au nord de Chihine. "Hier ils ont de nouveau bombardé Tyr, donc ma famille a fui vers Sidon, pour essayer ensuite de remonter jusqu’à Beyrouth". Les savoir sur la route l’inquiète. Depuis ce matin, son téléphone n’arrête pas de vibrer. "On les appelle plusieurs fois par jour, pour entendre leur voix et être sûrs qu’ils sont encore en vie. Mais depuis la France, on se sent impuissants", désespère le cinquantenaire.
Dans toutes les têtes revient inlassablement 2006. Il y a 18 ans, "les Israéliens ont essayé de rentrer au Liban, ils ont pris 5 km en 40 jours (Référence au conflit israélo-libanais de 2006 où Israël avait répondu à une attaque du Hezbollah et avait investi une partie du sud du Liban, NDLR). Israël attend juste le bon moment pour prendre la main. Le Liban est un pays trop petit et trop fragile par rapport aux autres pays arabes", estime Hamza.
Si Israël est pointé du doigt par beaucoup, le Hezbollah et le gouvernement libanais n'échappent pas non plus aux critiques. Rita Elias, chirurgienne-dentiste à Strasbourg, a toujours vécu au Liban, jusqu’à son départ il y a trois ans. "Depuis l’explosion au port de Beyrouth, le 4 août 2020, le pays jongle entre anxiété et colère. Aujourd’hui la situation, même si elle est grave, n’est pas inédite", considère la jeune femme de 27 ans qui ne voit "pas le conflit dégénérer en guerre totale". Même constat pour son ami Andréa, étudiant en économie de 22 ans. "C’est triste mais on est habitué. J’ai de la peine pour les civils touchés." Les deux amis sont originaires du nord du pays, région aujourd’hui plus épargnée.
De son côté, Rita, fustige aussi bien le gouvernement libanais que le Hezbollah. "Il n’y a même pas de plan d’urgence, ni de plan d’évacuation. Ce sont les habitants qui organisent tout, le gouvernement est corrompu et ne fait rien pour les Libanais. Si on peut sortir de cette situation il faut qu’on s’unisse et qu’on fasse des compromis."
Gustave Pinard et Ismérie Vergne
Édité par Abel Berthomier et Yanis Drouin
* Le prénom a été modifié
Ce mardi 24 septembre, le président de la Collectivité européenne d’Alsace Frédéric Bierry tire la sonnette d’alarme. Le territoire manque de places et de personnel.