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En Biélorussie, les autorités ont une nouvelle fois coupé internet le 14 septembre dernier, afin de casser le mouvement de contestation qui sévit dans le pays depuis la réelection du président Alexandre Loukachenko. En Inde, en Syrie, en Egypte, ou encore en Iran, ce procédé s'est multiplié ces dernières années. Et en France, est-ce que c'est possible ?
Ursula von der Leyen a tenu mercredi 16 septembre son premier discours sur l’état de l’Union à Bruxelles. La présidente de la Commission européenne a appelé de ses voeux l’abolition du règlement de Dublin. Ce texte méconnu du grand public recoupe les principales règles encadrant la politique d’asile européenne.
La cinquième enquête du détective Cormoran Strike est parue en début de semaine en anglais. Une première critique du quotidien britannique Telegraph la qualifiant de transphobe a ensuite été reprise par les internautes et par différents médias. Signée Robert Galbraith, un pseudonyme, Troubled Blood raconte l’histoire d'un tueur en série qui se déguise en femme. En soi, ce scénario ne réinvente pas la roue : entre Psychose (1960) et la mythologie nordique, il semble que les histoires d'hommes se faisant passer pour des femmes pour commettre des crimes ne datent pas d'hier.
Mais Troubled Blood n’est pas n’importe quel livre, et surtout, son auteur n’est pas n’importe qui. Derrière Robert Galbraith se cache la mère de Harry Potter, J.K. Rowling. En juin dernier, Rowling avait dans un tweet expliqué que "les personnes qui ont leur règles" sont forcément des femmes. Des propos transphobes reprochés par ses abonnés.
‘People who menstruate.’ I’m sure there used to be a word for those people. Someone help me out. Wumben? Wimpund? Woomud?
Opinion: Creating a more equal post-COVID-19 world for people who menstruate https://t.co/cVpZxG7gaA
— J.K. Rowling (@jk_rowling) June 6, 2020
Pourquoi transphobe ?
Avec son tweet, J.K. Rowling nie le fait qu’il y a des femmes qui ne menstruent pas et qu’il existe des personnes d’autres genres qui ont leurs règles – en bref : elle nie l’existence et l’expérience d’hommes et de femmes trans et des personnes non-binaires.
Si certains défenseurs de la romancière avaient alors appelé à différencier la créatrice de la création, cette défense devient plus compliquée quand les opinions blessantes de l'autrice s'inscrivent au sein même de son œuvre. Je n’ai pas lu Troubled Blood et il est difficile de juger un livre quand on ne l'a pas encore lu. Mais le seul scénario de l'homme cisgenre (homme dont l'identité de genre correspond au sexe assigné à la naissance) se déguisant en femme pour en heurter d'autres donne à réfléchir. Au regard de ses propos sur Twitter, la transphobie de J.K. Rowling est de plus en plus difficile à nier.
Ses détracteurs ont appelé à boycotter ses œuvres et ont lancé l'hashtag #RIPJKRowling (ci-gît J.K. Rowling). Même s'il a été partagé plus de 100 000 fois pendant la semaine, son but n'est pas de souhaiter la mort de l'auteure britannique, mais de signaler une prise de distance vis-à-vis d'une personnalité qui a perdu toute crédibilité.
C'est parce que la saga autour d'Harry Potter a été un symbole d'acceptation et de tolérance que les propos de J.K. Rowling font aujourd'hui autant de mal à ses anciens admirateurs.
Maike Daub
Après la très courte intervention du Premier ministre, Jean Castex, la semaine dernière, c'est Olivier Véran qui prend la parole, à 17h, pour détailler le plan du gouvernement face à l'épidémie de coronavirus. Ces points d'information auront désormais lieu toutes les semaines.
Qu’est-ce que le règlement de Dublin ?
Le règlement de Dublin, ou Dublin III, est un règlement signé en 2013 par les pays de l’Union européenne. Il est appliqué par tous les Etats de l’Union européenne, mais aussi la Suisse, le Liechtenstein, l’Islande et la Norvège, pays associés. Un principe simple est sous-jacent au règlement : un réfugié effectue sa demande d’asile dans le pays européen dans lequel il arrive. Si, par exemple, un migrant arrive en France après avoir débarqué dans un premier temps en Italie, Rome doit s’occuper de l’accueil et de la demande d’asile de la personne.
Appelé Dublin III, ce règlement délègue la responsabilité de l’examen de la demande d’asile d’un réfugié au pays qui l’a accueilli en premier ; il a été signé en 2013 entre les pays membres de (UE) + Suisse, Islande, Norvège, Liechtenstein (EEE)
— Génération Maastricht (@MaastrichtGen) September 16, 2020
Celle-ci est alors dite "dublinée" et fait l’objet d’une procédure aboutissant à son potentiel renvoi dans le premier pays d’arrivée sur le sol de l’Union européenne. Le fichier Eurodac fait alors office de mine d’informations, enregistre les empreintes digitales du réfugié et permet de déterminer si ce dernier a posé une première demande dans un autre pays européen. "Mais le règlement n’interdit pas d’en déposer une dans un autre Etat", souligne à Cuej-Info Gérard Sadik, spécialiste des questions liées au droit d’asile à la Cimade, une organisation de soutien aux migrants.
Pourquoi ça n’a pas marché ?
2015, des centaines de milliers de personnes fuient le conflit syrien et prennent des risques énormes pour rejoindre les côtes européennes. Les dirigeants européens parlent rapidement de "crise migratoire sans précédent". Leurs propos donnent un écho aux contradictions et exaspérations éprouvées vis-à-vis du règlement de Dublin. À l’origine des rancoeurs de certains gouvernements nationaux de l’Union, la règle imposant une demande d’asile dans le premier Etat d’arrivée du réfugié. Une règle jugée injuste et rapidement dénoncée par la Grèce, l’Italie ou Malte.
Situés en première ligne sur les routes migratoires maritimes, les trois pays ont dû gérer des dizaines de milliers de réfugiés par an au plus fort des arrivées. Plus de 800 000 réfugiés ont par exemple débarqué sur les côtes grecques en 2015. L’égoïsme des autres Etats est alors pointé du doigt, en particulier celui du "groupe de Visegrad", composé de la Pologne, la Hongrie, la République tchèque et la Slovaquie. Seule entente entre les pays européens, la signature d’un accord avec la Turquie en 2016 avec l’objectif de bloquer les arrivées de migrants sur le continent contre le versement de plusieurs milliards d’euros.
Rétrospective 2016 en data @AlterEcoPlus La crise des réfugiés et la cohésion européenne https://t.co/Yg7S5MDly9 pic.twitter.com/O0rCP78Vzd
— Gilles Hérail (@GillesHerail) December 28, 2015
Deuxième problème, un manque d’harmonisation des règles européennes relatives à l’asile. "La logique veut qu’un dubliné soit transféré rapidement dans le pays d’entrée pour que sa demande d’asile puisse être traitée le plus vite possible", explique Gérard Sadik. Sauf qu’en pratique, chaque Etat reste autonome dans son choix ou non d’accorder l’asile et les délais peuvent être plus ou moins longs avant un potentiel transfert. "En moyenne, entre 20 et 30% seulement des transferts sont effectués", déplore Gérard Sadik.
Quelles solutions possibles ?
Ce manque de solidarité européen a régulièrement freiné toute tentative de réformes des mécanismes de Dublin à partir de 2016. Plusieurs solutions ont pu être proposées pour répondre aux pressions importantes exercées sur Athènes et Rome notamment. L’idée de "quotas" - ou "système de redistribution", corrige Gérard Sadik - a longtemps fait son chemin pour suppléer le système du premier pays d’accueil. Mais elle s’est heurtée à la fin de non-recevoir des gouvernements de pays d’Europe de l’Est, peu enclins à accueillir sur leur sol des demandeurs d’asile. 160 000 demandeurs d’asile devaient ainsi être relocalisés dans les pays européens. Seules une minorité l’ont été effectivement. En France, 4 000 réfugiés sur 30 000 ont pu rejoindre l’Hexagone.
#Bruxelles veut réformer la politique de l’asile et de la migration
Depuis la crise migratoire de 2015, toutes les tentatives de réforme ont échoué.https://t.co/SVnxbY97A2 pic.twitter.com/kO6FFEcKLO
— La Croix (@LaCroix) September 17, 2020
La suspension de l’accord du règlement par Berlin en 2015 avait poussé à une logique d’une meilleure répartition des migrants et révélé la caducité de laisser certains pays gérer les flux de réfugiés. Cette suspension s’était traduite par l’accueil de près d’un million de demandeurs d’asile par l’Allemagne alors qu’elle n’était pas le pays d’arrivée. Aujourd’hui encore, la répartition de réfugiés se fait au cas par cas, à l’instar de la décision allemande de prendre en charge 1 500 personnes du camp de Moria, sur l’île grecque de Lesbos.
Qu’en dit la Commission ?
Lors de son discours sur l’état de l’Union devant le Parlement européen à Bruxelles, la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a assuré que le règlement de Dublin serait remplacé par "un nouveau système européen de gouvernance de la migration". La cheffe de l’exécutif européen promet également "un nouveau mécanisme fort de solidarité" et des "structures communes pour l’asile et le retour". Des propos flous qui cachent les difficultés à venir. "Abolir, c’est remplacer par autre chose", note Gérard Sadik.
Deux scénarios se dessinent pour l’avenir selon lui : "Soit le règlement de Dublin est aboli et pour les États la règle du chacun pour soi prédomine, ce qui est peu probable, soit on change tous les critères d’entrée sur le territoire". Fini donc la règle déléguant les responsabilités au premier État d’arrivée ? La Commission doit présenter sa proposition de réforme de la politique migratoire européenne le 23 septembre, très attendue et maintes fois repoussée. Dans tous les cas, rien ne se fera sans un accord des Etats membres, dont l’aval est essentiel pour donner vie à un nouveau règlement. Les discussions risquent d’être longues et sinueuses. Bien trop longues au vu de la situation dans le camp de Moria, sur l’île grecque de Lesbos.
Clément Aubry