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Une pièce chauffée, un kit d’hygiène, et du gel, des masques et une prise de température à l’entrée, Covid oblige. Florian Schoettel, cadre opérationnel dans le Grand Est de la Protection civile, est satisfait de ce dispositif mis en place, permettant “d'offrir une petite semaine de répit" aux sans domicile fixe. “Rien de bien sorcier”, reconnaît-il, simplement la “mise en place d’une zone d’accueil, de réfection et de secours au cas ou”, dont la Protection civile est chargée de s’occuper en journée, et la Croix rouge la nuit.

"Retour à la rue"

Sous sa veste orange fluo, masque sur le nez et entre deux coups de téléphone, il explique avoir eu pour instruction de lever le camp dès mercredi matin. L’annonce par la préfecture, ce mercredi 17 février, de la rétrogradation du "plan grand froid" du niveau 2 au niveau 1, faute à des températures qui dépassent les 10 degrés en journée, sonne par la même occasion la fin de ce centre d’hébergement d’urgence éphémère. Et les associations n’ont pas leur mot à dire.

"Retour à la rue", résume Vochi, cinquantenaire au fort accent des pays de l’Est de l’Europe, qui raconte avoir quitté la Tchétchénie pour la France en 2004. "Ici, c’était pas trop mal, mais après, je ne sais pas ce que je vais faire. J’appelle le 115 tous les jours, et à chaque fois ils me disent qu’il n’y a plus de place. On m’a parlé d’une solution pour moi le 3 mars. Et pendant 20 jours je dors et je mange où ? On est traités comme des animaux", peste celui qui passe son troisième hiver consécutif dehors. 

Peur du lendemain

Tous appréhendent la fin de cette semaine au chaud. "Avant de venir ici j’ai passé quelques jours à l’hôtel, explique Raed, un Irakien de 47 ans, arrivé en France en 2017. La seule chose que je sais, c’est que je dois aller à la préfecture pour déposer un dossier, et ensuite, je ne sais pas où je vais aller." "On vit au jour le jour. Je ne sais pas ce que demain me réserve", renchérit Fousseni. 

Déambulant dans les rues de Strasbourg ce mardi soir, à la recherche de sans-abri qui auraient refusé une place d’hébergement par peur souvent de la collectivité, une petite équipe de maraudeurs confie elle sa préoccupation. S’ils assurent ces derniers jours avoir constaté une baisse du nombre de sans domicile fixe, "tous ceux qui le souhaitaient ont trouvé une place d’hébergement", ils s’inquiètent de la fermeture à venir du gymnase et des autres endroits où des places en urgence avaient été trouvées : "Derrière, il n’y a pas de solution. Dans quelques jours il y aura plus de monde à la rue. Ça nous fait de la peine et on est assez frustrés."

Difficile cependant pour les maraudeurs d’évaluer le nombre de personnes qui dorment dehors à Strasbourg. En mars 2020, les bénévoles de la Nuit de la solidarité avaient eux recensé 265 sans-abri dans la capitale Alsacienne, tout en reconnaissant que leur décompte n’était probablement pas exhaustif.

Julien Lecot

Fousseni s'apprête à passer sa septième nuit consécutive au gymnase Branly. © Julien Lecot

Des sans domiciles fixes strasbourgeois ont trouvé refuge au gymnase Branly, transformé en centre d’hébergement d’urgence pour lutter contre le grand froid. Mais ce mercredi, ils sont contraints de retourner vivre dehors.

Les températures baissent à mesure que le soleil descend dans le ciel. Dans le même temps, ça s’active aux abords du gymnase Branly. Le parking se remplit petit à petit en ce mardi 16 février au soir. Bonnet sur la tête, cachant parfois des écouteurs, et un sac en bandoulière, des hommes arrivent les uns après les autres. Aucun coach à l’horizon pour les accueillir, mais deux bénévoles de la Protection civile se tiennent côte à côte sur le pas de la porte d’entrée. Depuis le jeudi 11 février, l’enceinte sportive où rebondissent habituellement ballons de volley et de basket a été réquisitionnée par la préfecture du Bas-Rhin pour accueillir les sans-abri strasbourgeois, et les protéger de la vague de grand froid qui s’est abattue sur l’Est de la France.

"C’est plutôt confortable. On a de la nourriture, des repas chauds le midi et des pâtes le soir, un accès aux douches, et les bénévoles sont sympas… Seuls les lits ne sont vraiment pas confortables !", lâche Fousseni, café à la main. Le jeune homme de 23 ans, bonnet sur la tête, raconte dormir les bons soirs dans l’un des hôtels que le 115 lui fournit. Les mauvais, quand le numéro d’urgence ne lui propose pas de solution, c’est sur le canapé d’un ami ou dans la rue qu’il passe sa nuit. Comme la plupart des bénéficiaires, il reste évasif sur son passé, et sur les aléas de la vie qui l’ont amené à occuper ce soir l’un des 40 lits de fortune alignés militairement le long du terrain de basket.

Le campus de l'Université de Strabourg est vidé de ses étudiants depuis octobre. © David Darloy

Les boutiques strasbourgeoises ont enregistré des ventes records pour fêter les amoureux. Les chiffres, encourageants, ne masquent pas pour autant les difficultés du secteur.

Les boutiques strasbourgeoises ont enregistré des ventes records pour fêter les amoureux. Les chiffres, encourageants, ne masquent pas pour autant les difficultés du secteur.

Le grand bâtiment résonne. Dans le Patio, au campus de l’Esplanade à Strasbourg, cela fait des mois que le brouhaha des discussions estudiantines ne s’est pas fait entendre. Mardi 16 février, à l’heure de la pause déjeuner, quelques étudiants occupent les bancs du hall pour prendre leur repas. Depuis le début du mois, certains ont désormais une raison pour venir à la fac : ceux qui le souhaitent peuvent assister aux cours en présentiel une fois par semaine. Promesse du président de la République formulée le 21 janvier.

Première année "chaotique"

Joy et Camille se sont rencontrées en début d’année, "à l’époque où on avait tous les cours en présentiel". En première année de LLCER anglais (Langues, littératures et civilisations étrangères et régionales), la découverte de la vie étudiante en temps de Covid-19 a été chaotique. "C’est déstabilisant, on est un peu perdues", confesse Joy. Les deux jeunes femmes n’étaient pas revenues en cours depuis le mois d’octobre. "C’est un moyen de retrouver un peu de normalité", estime l'étudiante ."Ça fait du bien au moral, confirme son amie, à la maison il n’y a pas cette ambiance de travail."

Toujours logée chez ses parents, Camille passe plus d’une heure et demie par jour dans les transports pour venir étudier. Si elle salue l’effort du gouvernement, la reprise des cours lui impose une logistique contraignante. "Aujourd’hui par exemple, j’ai cours de 13h à 15h en TD, donc je suis venue. Mais de 15h à 17h, j’ai une visio. Du coup, je dois trouver un endroit calme dans la fac pour suivre", explique-t-elle. 

Les situations sont hétérogènes en fonction des filières. Jean-Sébastien, étudiant en sciences sociales, a lui repris certains cours magistraux en présentiel : "Ça permet de s’intéresser plus au cours, chez moi c’est quasi impossible de tenir, au bout d’un moment, je décroche."

Tractage compliqué

Malgré cette jauge, les couloirs du Patio sont déserts. L'entrebâillement d’une porte laisse parfois apercevoir une salle de classe dans laquelle des élèves masqués sont assis, une chaise sur deux. Il faut aller dehors pour observer un semblant de vie. En cette période d’élections universitaires, des militants se toisent et distribuent des tracts aux quelques âmes présentes. “C’est désert”, témoigne Pierre, de l’UNI (syndicat étudiant de droite). A quelques mètres de là, c’est bien le seul constat partagé par Tom, militant pour l’Unef et adversaire du jour  : "Normalement lors des élections, il y a des étudiants partout, là on doit aller les chercher un par un." Le vote a lieu en ligne, du 15 au 17 février. 

Manque de contacts

Quelques grappes d’étudiants peuplent les tables du campus. Deux étudiantes italiennes fument une cigarette sur un banc. Arrivées en septembre, Rosilda et Frederica avaient imaginé leur année à l’étranger autrement. "On s'attendait à découvrir la France dans tous ces aspects, mais on la regarde surtout de la fenêtre de notre chambre", regrette Rosilda, dans un français parfait. L'étudiante a prévu de retourner en cours en fin de semaine, pour la première fois depuis octobre. "J’ai hâte, à distance, on n’entend pas bien, que ça soit le prof ou les interventions des élèves, c’est dur de suivre !"

Retrouver une vie sociale, c’est ce qui manque le plus à Paul : "On a goûté à la vie étudiante en début d’année, et d’un coup ça s’est arrêté, se remémore l’étudiant en première année de Staps, j’avais commencé à me faire des amis, mais depuis le deuxième confinement je n’ai plus aucun contact." Dans sa filière, seuls les cours de sport se font en présentiel. 

Le redoux des températures en Alsace a fait fondre la neige sur les allées du campus. Les espoirs d’un retour imminent à la normale se sont aussi évaporés pour Paul. "Les profs nous ont déjà annoncé que l’ensemble des examens du second semestre se ferait à distance", souffle-t-il, résigné.

David Darloy

 

 

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