Une nouvelle Assemblée générale prévue vendredi
L’Assemblée générale, sceptique face à ces propositions, maintient la mobilisation. Si elle accepte un comité d’examen, elle exige qu’il couvre tous les partenariats, pas seulement les renouvellements. Elle refuse aussi la commission paritaire, perçue comme une manière d’externaliser la décision.
« Toutes les données sont déjà rassemblées dans un dossier constitué {NDLR : par des étudiants et enseignants} en juin et enrichi en décembre, avec des études et des articles montrant les liens entre Reichman et le génocide en cours. Mais pour la direction, cela ne prouve pas que l’université est complice de la guerre », déplore Rosa.
L’Assemblée a voté une nouvelle réunion vendredi à midi et l’organisation de tables rondes sur la situation à Gaza. « Je suis déçue par la direction, qui ne voit que l’impact négatif des blocages sur l’image de Sciences Po Strasbourg », regrette Annaëlle, étudiante en master. De son côté, la direction affirme continuer d’explorer « des voies de sortie de ce conflit dont elle tiendra informé l’ensemble des personnels et des étudiants de l’école ».
Mis à jour mercredi 5 février 2025 à 17h30, suite au communiqué de la direction de Sciences Po Strasbourg.
Paul Ripert
« Si jamais à 18 heures on n'est pas sorti, appelez quelqu’un. » Il est 10 heures ce mardi 4 février 2025, et cinq étudiants de Sciences Po Strasbourg franchissent les portes du Cardo, le grand bâtiment noir et or de l’école. Ils ont été choisis pour discuter avec la direction du partenariat entre l’établissement et l’université israélienne Reichman, un sujet qui cristallise les tensions depuis six mois. La semaine dernière, le conflit a pris une nouvelle tournure avec le blocage de l’établissement, contraignant la direction à fermer Sciences Po Strasbourg et à basculer les cours en ligne.
Dehors, une quarantaine d’étudiants se réchauffent autour de cafés et de pains au chocolat. Beaucoup sont mobilisés chaque jour depuis plus d’une semaine et gardent en tête l’intervention des CRS vendredi dernier. « Nous étions en train de donner une formation sur la gestion de l’eau à Gaza pour illustrer la colonisation israélienne, et les CRS sont entrés pour nous déloger, raconte Rosa, étudiante à Sciences Po. C’est une image forte qui veut tout dire. »
Des revendications rejetées
Les étudiants exigent trois choses : la fin immédiate du partenariat avec Reichman, l’arrêt de la répression et la création d’un comité éthique pour examiner tous les partenariats. Des demandes d’autant plus sensibles que l’école avait déjà voté la fin de cet accord en juin 2024, avant que le directeur ne le rétablisse en décembre.
Vers midi, les cinq étudiants ressortent du bâtiment, le visage fermé. « On n’en peut plus, mais il va falloir se remobiliser », souffle Simon, porte-parole du mouvement. Le communiqué publié dans la foulée par Sciences Po Strasbourg indique que la direction est prête à créer un comité d’évaluation des partenariats et que « la levée du blocage conduirait de facto à l’absence de nouvelles interventions policières ». Elle propose également une commission paritaire mixte pour examiner le partenariat avec Reichman, composée de cinq experts extérieurs.
Malgré une rencontre avec la direction le mardi 4 février 2025, les étudiants de Sciences Po Strasbourg poursuivent leur mobilisation contre le partenariat avec l’université Reichman. Face à une réponse jugée insuffisante, le blocage est reconduit.
Un projet de loi, visant à apporter une meilleure prise en charge des soins liés au traitement du cancer du sein par l'assurance maladie, a été adopté mardi 28 janvier. Dans sa boutique strasbourgeoise spécialisée dans la vente de prothèses mammaires, de lingeries adaptées et de perruques, Elles & Embellies, Monik Bayard-Carette attend encore un peu pour y croire.
"Tout était prêt, les contrats, les emplois du temps… mais on a dû les appeler la veille de leur premier jour et tout mettre en veille." Lundi 3 février, l’association Unis Vers le Sport qui accompagne par le sport les enfants issus des quartiers populaires, devait accueillir trois jeunes en mission de service civique pour une durée de six mois. Elle a dû rétropédaler. La raison : "la suspension de toute nouvelle mission de service civique à partir du 1er février et jusqu’à l'adoption du budget de l’État pour 2025", annoncée, mercredi 29 janvier, dans une note émise par la ministre chargée des comptes publics, Amélie de Montchalin. Ces contrats, majoritairement financés par les pouvoirs publics, sont gelés en l’absence d’adoption du budget. Ce dernier est suspendu au vote, mercredi 5 février, de la motion de censure déposée par La France insoumise en réponse aux 49.3 déclenchés par le Premier ministre François Bayrou.
Un coup d’arrêt inattendu et à effet immédiat. "C’était assez soudain puisqu’on a été averti jeudi [30 janvier] par l’Agence du Service Civique pour une application au 1er février, c’était vraiment en dernière minute", retrace Baptiste Steinmetz, responsable du pôle sport-santé pour Unis Vers le Sport. Créé en 2010, ce dispositif permet à des jeunes de 16 à 25 ans de s’engager dans une mission d'intérêt général au sein d’une association ou d’une collectivité pour une durée de six à douze mois. En 2023, il a concerné près de 150 000 volontaires. Une aubaine pour les associations au budget souvent restreint : l’État prend en charge 80% de l'indemnité, laissant une centaine d’euros à la charge de l’organisme. En plus de sa vingtaine de salariés, Unis Vers le Sport recrute ainsi chaque année une trentaine de volontaires en service civique, notamment pour accompagner des élèves en primaire dans l’aide aux devoirs et les activités sportives.
"On est dans le flou"
Malgré la déconvenue, l’association s’estime pour le moment plutôt épargnée. "Chez nous, les jeunes en service civique réalisent des missions d’accompagnement auprès de nos éducateurs sportifs pour faciliter l’accueil des enfants. Donc au quotidien, cette suspension ne va pas poser un énorme problème. L’association va quand même tourner", rassure Baptiste Steinmetz. D’autant qu’une vingtaine de contrats de service civique sont en cours. "Pour l’instant, on peut encore compter sur les jeunes qui ont débuté leur service civique en début d’année scolaire et vont le terminer en février ou mars. Mais si on ne peut pas poursuivre le processus de recrutement, on ne pourra pas les remplacer, avertit-il. On est dans le flou, c’est difficile de se projeter, mais c’est pour les jeunes que c’est le plus dur, ils se retrouvent le bec dans l’eau."
Pour les jeunes, ces services civiques, qui permettent de s’engager sans condition de diplôme, sont souvent une première expérience dans le monde professionnel "à faire valoir sur leur CV et avec une gratification qui n’est pas négligeable". Parmi les trois volontaires d’Unis Vers le Sport laissés dans l’expectative, deux étudiants de 19 et 21 ans et un homme de 22 ans, en reconversion après avoir arrêté sa formation pour devenir animateur et moniteur sportif. Pour ce dernier, "l’aide financière était essentielle, mais il va reprendre des études en septembre donc on ne peut pas simplement repousser son service civique, explique Baptiste Steinmetz. Pour nous c’est du temps perdu, mais pour lui c’est une vraie occasion manquée".
Le responsable sport-santé d’Unis Vers le Sport reste optimiste : "Même s’il y a un scénario où ça dure, la reprise peut aller assez vite si le budget est adopté. Ça s'est arrêté soudainement et ça peut repartir aussi rapidement !"
Ismérie Vergne
Edité par Angellina Thieblemont