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Le virtuel peut-il remplacer le réel ? 

Combler l’absence de galipettes et autres parties crapuleuses est aussi passé par un recours accru aux plateformes de rencontre, permettant à certaines de battre des records de connexions. Pour la seule journée du 29 mars, Tinder, par exemple, a enregistré plus de trois milliards de swipes, ces balayages du doigt sur l’écran pour initier ou non un contact avec un potentiel partenaire. Une première depuis la création de l’application en 2012. 

Benjamin*, étudiant de 21 ans en école de commerce à Strasbourg, l’a téléchargée au tout début du confinement, mi-mars. Résultat : des discussions virtuelles avec des filles pendant plus de deux mois qui ne l’ont pas pour autant convaincu de cette nouvelle manière de draguer. “J’ai désinstallé l’application dès le 11 mai. Ça n’a pas donné grand-chose à part un plan fesse que j’ai concrétisé juste après le déconfinement. Je trouvais ça sympa au début mais c’est 10, 20, 30 fois le même sujet de discussion”, déplore-t-il. “Ça peut vite devenir assez chaud par message”, explique de son côté Alexandre, un responsable de vente strasbourgeois de 27 ans qui s’est rapidement lassé de ces échanges sans lendemain. “Il fallait réussir à maintenir une espèce de contact pour ne pas se faire doubler” et au passage s'assurer une rencontre à la clé.

Une sexualité plus autonome

Si les plaisirs en solo sont passés pour certains par le royaume du porno, la consommation de X ayant augmentée de 50% au début du confinement, d’autres se sont plutôt laissés surprendre par leur inconscient. À l’image de Charline*, 26 ans, éducatrice spécialisée à Strasbourg : “Depuis le confinement et encore maintenant, c’est la fiesta des rêves sexuels et c’est vraiment cool.” Contrairement à ce qu’elle imaginait, Charline ne vit pas mal l’absence de relations charnelles. “J’ai cru que le sexe ou même les contacts physiques me manqueraient terriblement mais en fait, pas du tout !” Réveillée en pleine nuit par l’excitation, les songes érotiques suffisent à la jeune femme pour se donner du plaisir seule.

Ne serions-nous jamais mieux servis que par nous-mêmes ? C’est aussi l’avis de Mathilde, graphiste à Strasbourg. À 22 ans, la jeune femme a décidé de “sauter le pas” et de s’acheter un sextoy pour profiter plus agréablement du confinement. “Je me souviens que ma première réaction après l’avoir utilisé a été d'envoyer un message à mes potes et leur dire ‘ça y est, plus besoin de personne !’”, sourit-elle. 

Booster sa confiance, lever les tabous, prendre son pied seule… Le temps du confinement encouragerait-il la libération de la sexualité féminine ? Selon la sexologue Maria Victoria Hernandez, “certaines ont pu se découvrir à travers leur propre libido plutôt que d’être dans la quête du partenaire qu’elles chercheront souvent à satisfaire sans connaître suffisamment leurs propres plaisirs”. 

Judith Bertolozzi, gérante de la librairie Feuilles de Route à Strasbourg, a pris des dispositions pour accueillir ses clients. Credits : Killian Moreau 

Rêves érotiques, masturbation, sextoys ou encore sexe virtuel : alors que le confinement a provoqué une baisse significative du nombre de rapports, certains, qu’ils soient seuls ou en couple, ont profité de cette période pour repenser leur intimité. 

Le sexe pendant le confinement ? “Ce n’était vraiment pas la folie. On l’a peut-être même moins fait qu’en temps normal”, admet Justine*, étudiante en médecine de 24 ans, qui s’est retrouvée confinée avec son petit ami dans un appartement de 50 m² à Strasbourg. Pendant cette période, la fête du sexe n’a pas eu lieu : l’activité charnelle des Français s’est nettement ramollie, qu’ils soient célibataires ou en couple. D’après un sondage de l’Ifop, 44% d’entre eux n’ont pas eu de rapports au cours du mois d’avril, contre 26% d’ordinaire.

Justine soupçonne les jeux vidéo d’avoir pris le dessus sur les parties de jambes en l’air. “Quand tu essayes de chauffer la situation et qu’il te dit non parce qu’il est en plein milieu de sa partie, t’as vraiment les nerfs”, s’exclame-t-elle. Mais pour répondre aux appels de sa libido, la jeune femme ne s’est pas laissée abattre : “Comme ça se bouge pas trop de l’autre côté, j’ai eu recours à la masturbation et j’ai peut-être eu plus d’orgasmes toute seule qu’avec lui.” 

Plutôt que d’avoir recours à son médecin, elle s’est procurée des hypnotiques sans ordonnance à la pharmacie. “J’ai doublé ma dose. Je n’ai pris que des produits à base de plantes, ça m’a vraiment rassurée.” Dans l’Eurométropole, de nombreuses pharmacies ont confirmé, sans pouvoir la mesurer précisément, une hausse de la demande de somnifères en vente libre et de compléments alimentaires. 

Julien Wimmer a opté pour une solution moins conventionnelle. L’étudiant strasbourgeois en alternance fume du CBD, la version légale et dépourvue de tout effet psychotrope du cannabis. “J’ai eu des troubles pendant deux semaines, le CBD m’a bien aidé. Quand je fume, c’est comme si toute la fatigue que j’avais accumulée me tombait d’un coup dessus. Je peux enfin dormir correctement, à poings fermés.”

L'isolement pèse dans la balance

28 mai 2020

L'isolement pèse dans la balance

Amincies, élargies, alourdies ou plus légères, nos silhouettes ne sont plus les mêmes. Stress, réconfort dans les aliments, télétravail et horaires déréglés ont modifié notre apparence.



Un dispositif encore plus compliqué à mettre en place pour ceux qui roulent entre amis, sans cadre. “Je pensais garder la distance préconisée mais après ma première sortie en groupe, je me rends compte que c’est déjà difficile de maintenir cinq mètres d'écart”, poursuit Sylvain, vététiste confirmé. 

Sur la route, pas facile non plus d’oublier les vieux réflexes. Le cyclisme étant un sport qui repose sur l’aspiration, rouler en peloton semble un comportement tout naturel, presque instinctif. “Depuis le déconfinement, nous avons croisé beaucoup de groupes de cyclistes, raconte Quentin Bothet, gendarme adjoint volontaire à Seltz. Ils étaient en file indienne, avec un mètre de distance, soit plus qu’à l’accoutumée, mais n’avaient pas dix mètres entre eux. D’ailleurs, quand ils nous voyaient, ceux en tête disaient aux autres de respecter les distances.” Les forces de l’ordre ont commencé par de la pédagogie. 

Pour ne pas céder à la tentation, la plupart des cyclotouristes ont suspendu, jusqu’à nouvel ordre, leurs virées. “Nous ne voyons pas quel plaisir nous pourrions retrouver”, avance Denis Vierling, président du comité départemental. À Haguenau, l’école de cyclisme (6-12 ans) a également baissé le rideau temporairement.

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