Pas de contrôles de vitesse
Si la volonté de faire de la place aux vélos semble unanimement partagée, les façons d’y parvenir diffèrent. Au nom de l’apaisement, la vitesse maximum de circulation est passée de 50 à 30 km/h au mois de juin dernier sur l’ensemble de la route de Bischwiller, “afin de rassurer les cyclistes”, précise Gilles Malherbe, chef de l’urbanisme de la mairie. Mais pas besoin d’avoir un radar dans la poche pour se rendre compte qu’aucun véhicule ne respecte cette nouvelle limitation. “ll n’y a ni contrôle, ni dos d’âne, rien qui oblige les voitures et camions à ralentir”, s’irrite Benoît Ecosse. Une mesure à court terme insatisfaisante, qui s’ajoute aux refus, ces derniers mois, de plusieurs propositions favorables aux vélos. “Après les municipales, nous avons proposé la mise en place d’une circulation à sens unique sur les routes de Bischwiller et De-Gaulle pour laisser de la place à une bande cyclable, mais ça n’a pas abouti”, regrette la présidente de Cadr67.
Le projet de création d’une vélorue, qui rendrait les cyclistes prioritaires sur la chaussée, a connu le même sort. “Bien que plusieurs élus aient soutenu cette proposition, la vélorue a été retoquée. Malgré leurs intentions en faveur des cyclistes, les élus restent dans une logique pro-voiture”, déplore Julien Hofstetter, co-président de l’association la Schilyclette. Au sein même du mouvement Vélorution, l’une des associations à l’initiative de cette idée, la proposition divise : “Il me paraît utopique de vouloir instaurer une vélorue sur cette route, notamment du fait des bus qui ne pourraient pas dépasser les vélos et des bouchons que cela pourrait créer”, admet Benoît Ecosse.
Depuis des lustres, la municipalité de Bischheim rêve de réaménager le croisement de la route de Bischwiller avec la rue du Général-Leclerc. Mais le projet est encore loin de se concrétiser.
D’abord, une camionnette UPS se gare sur le trottoir pour une livraison, obligeant les automobilistes à la contourner et bloquant le peu d’espace qui subsiste pour les cyclistes. Ensuite, un bus de la ligne 3 s'arrête juste devant cette camionnette, qui devra passer en plein milieu de la voie pour continuer sa route, alors que le trafic de voitures et des cyclistes est constant dans les deux sens. Une scène somme toute courante au croisement de la route de Bischwiller et de la rue du Général-Leclerc où passent chaque jour des milliers de voitures.
Selon Fabien Weiss, ancien adjoint au maire de 2008 à 2020, un projet de réaménagement du carrefour est à l’étude depuis plus de quinze ans. La mairie propose d’aligner la rue du Général-Leclerc avec l’avenue de Périgueux afin de faciliter la traversée de la route de Bischwiller. Pour cela, la rue du Général-Leclerc doit être retracée sur une portion de 167 m pour déboucher face à l’avenue de Périgueux et elle doublerait de largeur. Un projet qui s’accompagne d’une limitation de vitesse à 30 km/h, de nouvelles places de stationnement et d’une piste cyclable bidirectionnelle construite sur le trottoir. Le tout afin de désengorger le carrefour et de fluidifier la circulation.
D’après Jean-Louis Hoerlé, maire LR de Bischheim, la pharmacie Premium Santé sera détruite au premier trimestre 2021 afin de libérer l’espace nécessaire au déplacement de la voie de circulation côté rue du Général-Leclerc. Mais la suite du scénario n’est pas encore écrite : deux bâtiments qui doivent aussi être démolis n'ont pas encore été acquis par la mairie.
Les kebabs investissent la route de Bischwiller car de nombreux locaux y sont disponibles à des prix abordables. Pour la maire de Schiltigheim, Danielle Dambach : “Les commerçants de ce type se sont installés là parce que la route de Bischwiller a perdu de son attractivité, à cause du trop grand flux de transit.”
À Bischheim, le manque de dynamisme commercial s'explique notamment par la situation économique de la ville d’après Michèle Frey, chargée de mission municipale au développement économique. “La restauration n’a jamais vraiment décollé. Bischheim est une ville de banlieue aspirée par Strasbourg [...] Si ces kebabs existent, c’est qu’il y a des clients. C’est la loi de l’offre et de la demande”, estime la chargée de mission.
Pistes cyclables manquantes, piétons, voitures, camions... Les obstacles sont nombreux pour les cyclistes sur la route de Bischwiller. La preuve en images.
Rentable ou non, le quotidien de “chef” est harassant. “On ouvre à 10h30-11h, puis on ferme à minuit tous les jours. On travaille sept jours sur sept, avec un seul jour de congé”, soupire Sultan. Une plage horaire conséquente difficile à gérer pour des entreprises dont l’effectif se résume souvent à l’entourage familial.
Un couple d'immigrés azerbaïdjanais a ouvert le Kavkaz il y a treize ans car il ne trouvait pas de travail pour nourrir ses enfants. Depuis, les dettes s’accumulent pour cet ex-policier et cette ex-professeure des universités reconvertis dans la restauration depuis leur arrivée en France.
Chez Ali Baba, Mehmet a quitté son job à l'usine pour le döner dans l’espoir de gagner plus parce que sa femme était tombée enceinte. Patron de son enseigne depuis quatre ans, il concède : “Ce boulot, je ne veux pas le faire toute ma vie.”
Certains snacks comme le Star Express et l’Assado Grill misent quant à eux sur la qualité et continuent d’assembler leurs broches eux-mêmes. La viande, qui provient de boucheries régionales, est plus savoureuse et moins sèche que celles des döners industriels. Mais c'est un choix plus coûteux et chronophage, la viande devant être assemblée tous les matins dès 10h. Un effort qui permet néanmoins de conquérir des palais plus exigeants, comme ceux des employés de bureau et de mairie.
Pour compléter leurs revenus, certains kébabiers vendent des produits d'épicerie, de l’alcool… et flirtent parfois avec l’illégalité, en proposant des cigarettes à des prix défiant toute concurrence. Une vente sous le manteau connue dans le quartier grâce au bouche à oreille. “C’est 4,50 euros le paquet ou 50 centimes la cigarette”, sait Prescillia, 18 ans.