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Traitement de faveur pour l'Espagne


13 mars 2012

Le Premier ministre espagnol, Mariano Rajoy a presque obtenu ce qu'il voulait. A l'issue de la réunion mensuelle de l'Eurogroupe lundi soir à Bruxelles, les ministres des Finances de la zone euro ont annoncé que l'objectif de déficit espagnol de 4,4% du PIB pour 2012 "n'était plus d'actualité".

L'Eurogroupe a accepté d'assouplir l'objectif de réduction du déficit budgétaire de l'Espagne pour 2012, le ramenant à 5,3% du PIB contre 4,4% initialement prévu. C'est une demi-victoire pour Mariano Rajoy. Le 2 mars, en marge du sommet européen , le chef du gouvernement espagnol avait surpris son monde en déclarant unilatéralement qu'il ne respecterait pas les engagments pris par l'Espagne et laisserait glisser son déficit public jusqu'à 5,8% du PIB.

Ce compromis entre l'Espagne et l'Eurogroupe sonne donc comme une demi-défaite pour Olli Rehn. Le commissaire européen aux Affaires économiques avait en effet très peu goûté les déclarations de Mariano Rajoy. Des sanctions contre l'Espagne étaient même envisagées afin de faire respecter la discipline budgétaire. A l'issue de la réunion de lundi, Olli Rehn a préféré insister sur l'objectif de 3% du PIB à atteindre en 2013. "Il était très important que l'Espagne s'engage à respecter l'objectif de 3% du PIB en 2013. Pour l'atteindre, la trajectoire d'assainissement doit être ferme, solide et durable." Le constat a reçu l'appui de Jean-Caude Juncker : "ce qui est vraiment important c'est l'objectif de 2013. Les voies choisies en 2012 pour y arriver sont moins importantes."

Si Olli Rehn a souligné "l'importance de la décision prise aujourd'hui (lundi)", il a refusé, tout comme le président de l'Eurogroupe, l'idée d'un assouplissement des règles de discipline budgétaire signées dans le cadre du pacte budgétaire par 25 membres de l'UE sur 27, il y a à peine deux semaines. "Nous n'allégeons pas les contraintes" a déclaré Jean-Claude Juncker.

Deux poids, deux mesures

Pourtant le traitement de faveur accordé à l'Espagne fait grincer des dents en Belgique, où le gouvernement vient de se plier aux exigences de la Commission. Il a renforcé dimanche son plan de rigueur en adoptant de nouvelles mesures d'austérité d'un montant de 1,82 milliard d'euros qui s'ajoutent aux 11,3 milliards d'économie décidés fin 2011.

L'Autriche a également fait remarquer que cette concession faite aux Espagnols prenait des airs de "deux poids, deux mesures". Le conseil Ecofin s'apprête en effet à sanctionner la Hongrie, qui n'est pourtant pas membre de la zone euro, en la menaçant de geler près de 500 millions d'euros de fonds de cohésion si elle ne respecte pas ses engagments budgétaires.

5 milliards d'économie supplémentaires

Pour autant, tout ne s'annonce pas rose en Espagne. L'effort de 0,5% du PIB demandé par Bruxelles correspond  environ à 5 milliards d'euros d'économies supplémentaires. Cette somme s'ajoute aux quelque 15 milliards d'euros déjà prévus pour cette année. Surtout l'objectif d'un déficit pubic plafonné à 3% en 2013 paraît difficlement atteignable.

Pour obtenir de la marge, le gouvenement espagnol avait mis en avant le dérapage du déficit budgétaire de 2011, attribuable à ses prédecesseurs socialistes, qui s'éleverait à 8,5% du PIB contre 6% prévus. Des doutes importants planent néanmoins autour de la fiabilité des comptes espagnols. Il n'est pas à exclu que le gouvernement de Mariano Rajoy ait agit à l'inverse du cas grec, confie un diplomate européen: les chiffres du déficit de 2011 auraient été volontairement exagérés afin d'obtenir un peu de souplesse. Il faut désormais attendre le mois d'avril et l'examen par Eurostat du rapport définitif des inspecteurs de la Commission européenne, envoyés la semaine dernière à Madrid afin d'évaluer ces chiffres, pour clarifier le sujet.

Thibaud Métais

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