Vous êtes ici

Les trois combats du roi de Jordanie


10 mars 2015

Un mois après le meurtre du pilote jordanien Maaz el-Kassasbeh par Daesh, Abdallah II, roi de Jordanie, s'est exprimé, mardi, devant le Parlement européen réuni en assemblée plénière, pour appeler à l'unité contre l'islamisme extrémiste.

« Notre monde fait face à l'assaut de terroristes aux ambitions impitoyables », a déclaré mardi le roi de Jordanie, Abdallah II, devant le Parlement européen. Leur « motivation n'est pas la foi, mais le pouvoir », a-t-il affirmé, marquant sa distance avec l'idéologie expansionniste des islamistes radicaux.

Ce discours avait une sonorité particulière, un mois après le meurtre du pilote jordanien, Maaz el-Kassasbeh, dont le supplice avait été filmé et diffusé sur Internet par Daesh. Si celui-ci est l'ennemi de la Jordanie, « le combat [contre Daesh] doit être mené en premier par les nations musulmanes. Un combat interne à l'Islam ».

Mais « le danger que représente l'extrémisme doit être vu pour ce qu'il est : un danger mondial », a-t-il ajouté. Le souverain Hachémite a appelé à former un front uni contre un ennemi commun : celui qui « commet des meurtres au nom de Dieu et de la religion pour justifier des actions diaboliques qu'aucune religion ne tolère .

« Ce n'est qu'en coopérant que nos régions parviendront à réduire à néant les sources de soutien aux terroristes et les empêcher d'accomplir leurs desseins » estime Abdallah II, qui a mis l'accent sur trois défis majeurs pour ll'emporter sur l'extrémisme religieux global: la résolution de la question palestinienne, la lutte contre l'islamophobie et la sécurité économique.

« Pourquoi le monde ne défend-il pas les droits des Palestiniens ? »

« Pourquoi le monde ne défend-il pas les droits des Palestiniens ? » C'est à partir de cette question qu'Abdallah II a souligné que le blocage du processus de paix israelo-palestinien « a fourni aux extrémistes un puissant cri de ralliement. Ils exploitent les injustices et les conflits lancinants pour se construire une légitimité et recruter des combattants étrangers en Europe et dans le monde ».

Après plus de 60 ans de conflit, des dizaines de résolutions votées par les Nations Unies, la situation actuelle ne semble pas s'améliorer : « toujours plus de constructions de colonies, et moins de respect pour les Palestiniens occupés », s'est indigné Abdallah II. Cette stagnation serait l'explication d'une perte de confiance en la politique internationale qui pousserait à la radicalisation et accentuerait « la haine, la violence et la terreur dans le monde ».

Il a exhorté les pays européens à présenter avec son pays  « accord final et compréhensif » pour mettre un terme à ce conflit qui attise les passions de la région.

« Le futur réside dans l'unité et le respect, et non pas dans la division et les stéréotypes »

Le roi Abdallah a encouragé l'Union européenne à poursuivre ses efforts pour « mettre un frein à la montée de l'islamophobie dans le monde entier ». « En attaquant et en excluant les autres, en insultant les autres peuples et leurs croyances et convictions, il n'y pas de possibilités d'aller de l'avant. Le futur réside dans l'unité et le respect et non pas dans la divisions et les stéréotypes », a-t-il ajouté.

Plus important encore, il est nécessaire, aujourd'hui, de faire la différence entre les extrémistes « qui ne respectent pas les valeurs de l'Islam ni les valeurs humaines » et les musulmans du monde qui sont devenus leur « cible la plus importante », a ajouté Abdallah II avant d'affirmer, avec vigueur, au nom des musulmans, « nous ne les laisserons pas prendre en otage notre religion ».

Il a condamné sévèrement les attaques contre les chrétiens et minorités religieuses de certains pays, qu'il considère comme une « offense contre l'humanité ». La Jordanie peut se présenter comme exemple, à ce sujet. Historiquement, les communautés chrétiennes y sont profondément enracinés, bien que ne représentant que 6 % d'une population jordanienne majoritairement musulmane.

Un partenariat plus avancé et un soutien financier

La radicalisation de jeunes « se nourrit de l'instabilité économique et de l'exclusion». Le troisième pilier de lutte contre la radicalisation, proposée par Abdallah II repose sur la « création d'un espoir plus profond ». « Les gens ont besoin d'opportunités pour réaliser leurs potentiels et se construire une bonne vie ».

Dans ce but, le roi jordanien a souligné l'importance du partenariat économique et commercial qui existe entre son pays et l'Union Européenne. Il a, par ailleurs, annoncé sa volonté de « travailler [avec l'Union européenne] pour un partenariat encore plus avancé ».

La Jordanie a d'autant plus besoin du maintien de l'aide européenne que la crise humanitaire au Moyen-Orient s'aggrave. Celle-ci a un impact majeur sur le pays depuis le début de la guerre civile en Syrie, en 2011. Le royaume Hachémite a offert « un refuge à 1 400 000 réfugiés syriens, soit 20 % de la population jordanienne, en quelques années ».

La situation du pays va en s'aggravant avec les exactions de l'organisation de l'État islamique qui pousse les syriens à fuir vers le pays voisin. La Jordanie est devenu « le 3ème plus grand pays d'accueil pour les réfugiés dans le monde ».

En introduction de l'allocution, Martin Schulz, le président du Parlement a rappelé la présence du roi Abdallah II et de sa femme, lors de la marché républicaine le 11 janvier à Paris. Il a finalement salué le rôle joué par le royaume Hachémite dans la sécurité de la région, pour conclure cette allocution solennelle.  

 

Marie-Charlotte Roupie

L'arrivée du roi au parlement.

C'est la quatrième fois que le roi vient en visite officielle au parlement.

Le roi Abdallah II de Jordanie lors de son discours solennel au parlement européen

De nombreuses télévisions ont suivi l'allocution.

La salle était comble.

Imprimer la page