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Renforcer la lutte contre la traite des êtres humains en Europe


15 février 2021

Dans un rapport adopté le 9 février, le Parlement européen appelle la Commission à renforcer la législation contre la traite des êtres humains.

« Il est grand temps de demander à la Commission et à la société civile de mieux lutter contre ce crime horrible qu’est la traite des êtres humains », s’indigne l’eurodéputée espagnole Maria Soraya Rodriguez Ramos (Renew, libéraux). Dans le rapport qu'elle a rédigé, et que le Parlement européen a adopté le 9 février, elle recommande un durcissement notable de la législation européenne contre la traite des êtres humains. Selon elle, la dernière directive sur le sujet, qui date de 2011, est aujourd'hui inadaptée aux nouvelles réalités du phénomène, dans un contexte de migration tendu, de défaillance de dispositifs nationaux et d’essor des nouvelles technologies. Dans le rapport adopté, les eurodéputés exhortent la Commission à proposer une nouvelle directive pour renforcer la coopération entre les Etats membres et sévir plus efficacement contre les trafiquants mais aussi contre les clients de la traite.

Un problème invisibilisé 

La traite des êtres humains est un problème d'ampleur qui reste méconnu. Selon un rapport de la Commission européenne, en 2018, plus de 20 000 personnes ont été enregistrées comme victimes d’exploitation sexuelle, de travail forcé ou encore d’esclavage domestique dans l’Union européenne. Et ces chiffres sont sans doute sous-estimés, du fait du recours croissant des trafiquants et clients à Internet qui invisibilise les victimes. « Internet remet considérablement en cause notre façon de travailler. » s’inquiète Geneviève Colas, coordinatrice du collectif Ensemble contre la traite des êtres humains. De nouvelles formes d’exploitation se mettent aussi en place, précise Sandrine Goldschmidt, chargée de communication de l’association Mouvement du Nid : « Aujourd’hui des femmes sont amenées de pays pauvres pour devenir des mères porteuses en Europe. »  

Des propositions concrètes  

Les eurodéputés entendent durcir le ton face à ces évolutions inquiétantes. Ils regrettent que les systèmes judiciaires des Etats membres n’encouragent souvent pas les victimes à se faire connaître. Pour eux, il est prioritaire que les Etats renforcent les capacités d'actions des personnes susceptibles d'identifier, de protéger et de soutenir les victimes d’exploitation, telles que les éducateurs ou les agents de protection de l’enfance. Comme le note le rapport parlementaire, ces derniers sont indispensables pour fournir : « une assistance, une représentation juridique, des services d’emploi, un soutien psychologique et médical gratuit » aux victimes. 

L’exploitation sexuelle concerne 60% des victimes de traite, et particulièrement les femmes et les jeunes filles. Un crime « lié au genre » contre lequel les eurodéputés demandent, d'une part, d’intensifier la coopération européenne dans le cadre des enquêtes policières et, d'autre part, de poursuivre plus systématiquement non seulement les responsables de la traite, mais également les clients qui en bénéficient. 

Enfin, alors qu'un nombre significatif de victimes de traite sont des migrants ou des demandeurs d'asile, les eurodéputés souhaitent un renforcement des dispositifs d'aide à destination de cette population vulnérable, et particulièrement parmi elle des mineurs non accompagnés. Pour eux, cela passe par une meilleure identification des victimes potentielles, une implication accrue des organisations de la société civile, un accompagnement scolaire des enfants et l'offre gratuite de ressources et assistances juridiques.

Présente lors de la présentation du rapport, la Commissaire européenne en charge des Affaires Intérieures, Ylva Johansson, a assuré les eurodéputés qu'elle était disposée à faire de nouvelles propositions législatives pour « remporter cette bataille ». 

Laurine Jeanson

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