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Travail non-déclaré : une plateforme de concertation en place avant l'été


03 février 2016

Les députés européens ont décidé de la mise en place d'une plateforme de concertation entre les Etats européens pour lutter contre le travail non déclaré.

Comment lutter efficacement contre le travail non-déclaré ? A cette question épineuse, les députés européens ont apporté, mardi 2 février, un début de réponse. Réunis à Strasbourg, les élus ont validé la création d'une plateforme de lutte contre le travail au noir. Initiée par la Commission européenne en 2012, cette plateforme permettra aux Etats membres, de mettre en commun leurs informations en la matière et de partager des solutions pour lutter activement contre le travail non-déclaré.

A partir de cet été, les représentants des Vingt-Huit devraient ainsi se réunir deux fois par an, en présence des partenaires sociaux.

Le travail non-déclaré, qui représente 18% du PIB européen, est lourd de conséquences sociales : conditions de travail précaires, privation de droits sociaux, non-accès à une retraite, concurrence déloyale entre les entreprises et baisse des recettes fiscales pour les Etats. Ces effets néfastes ont été accentués par la crise financière de 2008 et la crispation du marché de l’emploi qui a particulièrement touché les jeunes, les femmes ou encore les migrants.

Initiative nouvelle

Suivant les conclusions du rapport du député bulgare Georgi Pirinski (S&D, sociaux démocrates), la quasi-totalité des eurodéputés a jugé la plateforme nécessaire lors du débat du 2 février. Certains, comme les députés de la GUE (gauche radicale) Dennis de Jong et Kostadinka Kuneva, ont cependant déploré la non-représentation du Parlement au sein de la plateforme.

Malgré ces réserves, la grande majorité des députés a salué une initiative nouvelle dans le domaine de l’emploi où la législation européenne peine toujours à s’imposer. Un accord des députés qui s’est soldé par une adoption massive avec 619 voix pour, 69 contre et 7 abstentions.

Désaccords sur le renforcement des pouvoirs de l’Union

Le projet est soutenu par l’aile gauche du Parlement à l’instar de l’eurodéputée allemande Jutta Steinruck (S&D) qui estime que c’est « un premier pas » et souhaite à terme « un engagement plus fort de l’Union européenne » pour lutter contre le travail au noir. Dans le même sens, Igor Soltes (Les Verts) demande la création d’« une inspection européenne du travail ».

Mais ces évolutions demanderaient un transfert de certaines compétences des Etats membres vers l’Union européenne. Une option vigoureusement combattue par certains, comme l'allemande Ulrike Trebesius (ECR, conservateurs): « La plateforme de coopération est une bonne idée mais les Etats restent les plus compétents pour appliquer une politique efficace en terme de lutte contre le travail non déclaré. » L'eurodéputée pointe aussi les disparités entre les Etats: "Le travail non déclaré représente 1,7% du PIB au Royaume-Uni, et plus de 30% dans d'autres pays".

Un projet rejeté en bloc par les eurosceptiques

Seuls les députés eurosceptiques du parti anglais UKIP et ceux du groupe Europe des nations et des libertés (ENF), qui rassemble le Front National et ses alliés, n'ont pas soutenu le rapport de Georgi Pirinski. Le Français Dominique Martin (ENF) dénonce un « enfumage » pointant notamment un budget trop faible de 225 000 euros par an pour 28 Etats membres. Il ajoute : « La plateforme ne permettra pas de lutter contre le travail non-déclaré, seules des logiques nationales le peuvent. »

Georgi Pirinski s’efforce néanmoins de rassurer les plus sceptiques : « la plateforme est un bon outil pour privilégier une action européenne en préservant les compétences nationales ». Le dossier doit désormais être examiné par le Conseil le 24 février prochain.

Clémence Dubois

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