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Crise des migrants: les eurodéputés doutent du plan d'aide à la Turquie


03 février 2016

Les eurodéputés critiquent le mécanisme d'aide financière aux réfugiés en Turquie, adopté en novembre. Réunis à Strasbourg le 2 février, ils ont remis en cause le versement de 3 milliards d'euros pour 2016-2017 à un gouvernement qu'ils accusent d'alimenter la crise des migrants.

“Pourquoi donner 3 milliards d'euros à la Turquie pour externaliser nos frontières alors que le gouvernement Erdogan massacre le peuple kurde?” Cette question de l'eurodéputée italienne Eleonora Forenza de la GUE (gauche radicale) reflète bien les interrogations du Parlement européen sur le partenariat stratégique entre la Turquie et l'Union européenne adopté le 29 novembre 2015. Ce dernier prévoit la mise en oeuvre d'un mécanisme d'aide financière à la Turquie pour faire face à l'afflux de réfugiés en provenance du Moyen Orient. Il s'agit d'améliorer la situation humanitaire dans les camps de réfugiés syriens sur son sol et de renforcer l'efficacité de ses gardes côtes. En présence du commissaire européen Johannes Hahn, en charge de la politique de voisinage, les députés se sont inquietés du manque de transparence dans le versement de ces fonds et du respect des droits des migrants en Turquie.

Pas d'accord sur le financement

L'eurodéputé espagnol Gonzales Pons du PPE (centre-droit) a reconnu qu'il “ne pouvait pas y avoir de réponse au problème migratoire sans la Turquie”. Il a néanmoins regretté l'incapacité des Etats à trouver un accord sur le financement du plan européen. Sur les 3 milliards d'euros prévus pour la période 2016-2017, la Commission européenne devrait apporter 500 millions d'euros, quand les Etats financeraient les 2,5 milliards d'euros restants.

Le commissaire Johannes Hahn a lui-même admis que les ministres des finances ne s'étaient toujours pas mis d'accord sur la participation de chaque pays. “Ces 3 milliards constituent une somme plafond pour une période de deux ans”, a-t-il ajouté.

Inquiétudes sur le respect des droits fondamentaux

Pendant les cinq heures de débats, les députés ont exprimé leurs doutes sur l'octroi d'une aide humanitaire à un gouvernement accusé de ne pas respecter les droits des kurdes et d'entretenir des relations troubles avec l'Etat islamique. “Ne donnez pas (ces fonds) au gouvernement turc mais directement aux camps, au Liban, en Jordanie et en Turquie”, a lancé le président du groupe ALDE (libéraux démocrates), Guy Verhofstadt. Les députés de la GUE se sont ralliés à cette proposition de verser l'argent aux ONG et aux Nations Unies.

Johannes Hahn s'est voulu rassurant sur le contrôle de l'utilisation de l'aide financière par le Premier ministre Recep Erdogan. “La Turquie aura seulement un statut de consultation. C'est l'Union qui gèrera la distribution des fonds sur place.” Il a assuré qu'une évaluation de la Commission européenne aurait lieu en février 2017 pour vérifier que la Turquie respecte ses engagements. Le 8 février, la vice-Présidente du Parlement européen, la française Sylvie Guillaume S&D (Sociaux démocrate), doit se rendre dans les camps de réfugiés au nom de la commission parlementaire des libertés civiles.

Benoît Collet

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