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"La Meinau c’est Kohlmann, bientôt on va renommer le quartier !", plaisantent deux travailleurs de la Plaine des Bouchers à la pause déjeuner. Chez toutes les personnes interrogées, le nom de Jean-Marc Kohlmann ne laisse pas indifférent.

Avec un patrimoine de plusieurs dizaines de millions d’euros et une cinquantaine de sociétés, l’entrepreneur apparaît comme "l’empereur de la Meinau, l’Iznogoud de la Plaine des Bouchers !", selon son ami Patrick Meyer. D’après un ancien associé, 90 % du quartier serait même passé entre ses mains. En trente ans, le millionnaire d’origine lorraine a transformé la zone d’activité.

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Répartition des adhérents du Centre socioculturel de la Meinau par tranches d'âges. © Marie Starecki

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Le train à destination d'Offenbourg arrive en gare à 13h29. L'affluence est moins importante que les trains du matin. © Clara Gross

© Liza Hervy-Marquer

Offre sportive de la Canardière. © Marie Starecki et Lison Zimmer

La sectorisation scolaire de la Meinau. © Arthur Guillamo et Kenza Lalouni

“Quand j’ai acheté, tout le monde me traitait de fou”, sourit-il. Initialement, il souhaite juste y installer son entreprise. Mais face aux importants coûts d’entretien, il aménage des espaces à louer.

Aujourd’hui, le Junkers, “c’est un tiers d’associations et deux tiers d’entreprises”, explique Alain Kiffel, qui pense que les locataires viennent avant tout pour l’histoire du lieu. “Tous les jours, on passe par une porte en fonte qui fait cinq tonnes. C’est dingue, ça n’a pas bougé !”, s’extasie Paola Guigou, fondatrice de l’association M33. Studio d'enregistrement, société de BTP, torréfacteur, cabinet d’architecte, divers secteurs s’y côtoient.

Dans ce paysage éclectique, le collectif d’artistes M33 regroupe depuis neuf ans photographes, vidéastes, musiciens, peintres, graveurs, plasticienne textile. “Ce qui nous a plu, c’est l'acoustique que l’endroit crée, grâce aux briques alvéolaires pensées pour absorber le son des moteurs allemands”, détaille Paola Guigou.

Alain Kiffel souhaite continuer à faire vivre le Junkers. Depuis vingt ans, l’édifice est en perpétuelle réhabilitation, encadrée par l’architecte des bâtiments de France. La seule contrainte est de garder les murs intacts. “Ce bâtiment, c’est un emblème de Strasbourg, une fierté pour moi”, confie Alain Kiffel.

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Comparaison des équipements de l'avenue de Colmar côté est, avant et après les travaux de 2025. © Élodie Niclass

Lors de l’annexion de l’Alsace par l’Allemagne en 1940, les locaux d’Emile Mathis sont réquisitionnés. Le constructeur aéronautique Junkers transforme les lignes d’assemblage pour fabriquer des avions de guerre. En 1941, il élève deux bâtiments, dont le Junkers, destinés à accueillir des bancs d’essais de moteurs d’avions. 

La mémoire dans les briques

Parti aux Etats-Unis au début de la guerre, Emile Mathis fournit les plans de ses locaux aux Alliés qui bombardent le site en 1944. À la Libération, l’entrepreneur engage un plan de reconstruction. Mais sans aides de l’Etat, les dettes le poussent à vendre ses usines à Citroën en 1956.

En parallèle, l’Arsenal de l’aéronautique, en charge des avions de l’armée française, investit le Junkers jusqu’en 1951. En 1978, une entreprise de location d'engins de travaux publics en devient propriétaire pour s’en servir d'entrepôt.

Le Junkers intègre l’inventaire supplémentaire des Monuments historiques en 1993. Son frère jumeau jamais achevé connaît, quant à lui, un sort plus funeste puisqu’il est rasé en novembre 1995. Attiré par l’histoire du bâtiment, Alain Kiffel, entrepreneur dans le gros œuvre, en devient propriétaire en 2000.

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