Vous êtes ici

Le module est validé, il peut être inséré dans un article pour être consulté par les internautes.

Le Parlement face à la crise existentielle de l’Europe

Dimanche 12 février, juste avant le début de la session plénière du Parlement européen, le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, a mis le feu aux poudres. Non seulement il a déclaré qu'il ne briguerait pas un deuxième mandat en 2019, mais il a aussi exprimé publiquement de sérieux doutes sur la capacité des Vingt-Huit à faire preuve de cohésion face aux problèmes qu’ils rencontrent. Des propos largement commentés par les eurodéputés, réunis à Strasbourg entre le 13 et le 16 février.

Symbole des divisions européennes pointées du doigt par Juncker : le CETA. Cet accord de libre-échange entre l'UE et le Canada, débattu et adopté cette semaine au Parlement s’est heurté à de nombreuses oppositions, qu’elles soient partisanes, nationales ou citoyennes. Mercredi 15 février, jour du vote, près de 700 opposants manifestaient devant le Parlement.

Paradoxalement, cette semaine, ce sont les invités du Parlement qui se sont montrés les plus optimistes quant à l'avenir de l’Europe. Le président autrichien Alexander Van der Bellen a appelé mardi à garder confiance en l'idée européenne qui est « unique et vaut toutes les peines ». Jeudi, au milieu de l’hémicycle, le Premier ministre canadien Justin Trudeau a rendu un vibrant hommage à « une Union européenne forte et vigoureuse ».

Forte et vigoureuse ? L'Europe ne l'est plus vraiment. Elle se cherche encore un, comme l’ont montré les débats sur l'avenir de l'UE qui ont occupé les eurodéputés mardi matin, et les discussions sur la Grèce qui attend un troisième plan d'aide financier. Faut-il renforcer les institutions européennes pour résoudre ces problèmes ? Les députés le croient. En attendant, une chose est sure : le Parlement paraît bien isolé pour relever les défis auxquels l’Europe fait face.

Timothée Loubière

Le Parlement européen a validé mardi 14 février à Strasbourg un partenariat de pêche durable avec les îles Cook, un archipel de l’Océan Pacifique. 

« À l’heure actuelle, aucun bateau de l’Union européenne ne pêche dans les eaux des Îles Cook » rappelle l’eurodéputé portugais Joao Ferreira (GUE/NGL, gauche radicale). Avec le nouvel accord de partenariat UE-Iles Cook dans le domaine de la pêche durable approuvé le 14 février par les eurodéputés, l’industrie halieutique européenne se verra prochainement ouvrir l’accès à la zone maritime de 2 millions de km2 entourant l'archipel de l'Océan Pacifique.

[ Plein écran ]

Négocié par la Commission européenne au nom des Etats membres, l'accord offre la possibilité à quatre navires européens de collecter jusqu’à 7000 tonnes de thon par an aux larges des Iles Cook. En contrepartie, le gouvernement de l'archipel recevra 3 millions d’euros sur quatre ans.

Si la majorité des eurodéputés ont validé l’accord, certains élus du groupe des Verts se sont montrés plus critiques. Ils ont notamment questionné la légalité du partenariat, qui n'a toujours pas été validé par la justice des Iles Cook. L’eurodéputée autrichienne Ulrike Lunacek (les Verts/ALE) a ainsi plaidé pour un report de la ratification « jusqu’à ce que la population locale, fortement opposée au projet, ne l’accepte ». Alors que la pêche artisanale en faible quantité prévaut toujours dans l'archipel, les tonnages et la technique de pêche à la senne autorisés par l'accord ont en effet suscité de vifs mécontentements chez de nombreux cookiens.

Malgré ces contestations, l'accord devrait entrer en vigueur dans les prochains mois, une fois le processus de validation par les Parlements nationaux terminé.

Saloua TAOURDA

UN CONSENSUS POUR SAUVER LA GRÈCE

Un avis partagé par les élus du groupe S&D, l’un des principaux du Parlement européen. « Il est temps pour nous d’accompagner et d’aider vraiment le pays », a ainsi estimé l’eurodéputé française Pervenche Berès (S&D, sociaux-démocrates).

Directement pointés du doigt, certains membres du Parti populaire européen (centre-droit) ont tenu à défendre la position de l’Allemagne et de son ministre des Finances, Wolfgang Schäuble, intransigeant sur la question grecque : « Il est facile de s’en prendre au gouvernement allemand. Mais le gouvernement grec n’a pas su maitriser les problèmes. La répartition des impôts est injuste et le fisc grec est inefficace » a ainsi rappelé l’eurodéputé allemand Burkhard Balz (PPE, centre-droit).

Néanmoins, pour la majorité des eurodéputés, la priorité est claire. Trouver rapidement un consensus transcendant les divergences politiques et nationales pour régler durablement le problème de la dette grecque. Mais l’approche des élections importantes en France, en Allemagne et aux Pays-Bas freine les négociations.

LE PRÉSIDENT DE L’EUROGROUPE AUX ABONNÉS ABSENTS

Les parlementaires espèrent influencer la prochaine réunion de l’Eurogroupe prévue le 20 février. Mais dans l’hémicycle, mercredi, aucun représentant de cette instance informelle n’était présent pour débattre avec eux. Longtemps annoncé, le ministre des Finances néerlandais Jeroen Dijsselbloem, également président de l’Eurogroupe, a annulé sa venue à la dernière minute.

« Le Parlement l’a invité à plusieurs reprises, et je sais qu’il a été informé.  J’imagine que son absence est liée à ses activités aux Pays-Bas. Je suis dans l’impossibilité de fournir davantage d’explications », a regretté Jaume Duch Guillot, porte-parole du Parlement européen.

La coprésidente allemande du groupe européen du groupe des Verts/ALE, Ska Keller, a, quant à elle, laissé éclater sa colère face à l’absence du ministre néerlandais : « Il a rejeté l’idée d’un débat. C’est assez scandaleux de constater qu’il n’est pas disposé à faire face à cette discussion. » Une absence symbolique qui, pour beaucoup, montre le peu de considération que les principaux acteurs de la politique économique européenne portent au Parlement européen.

Texte et photos : Simon Cardona et Naoufel El Khaouafi

Ils ont insisté sur l’urgence de la situation. Athènes dispose d’assez de fonds pour se financer jusqu’au mois de juillet 2017. Passé cette date, le pays sera dans l’impossibilité de rembourser les 7 milliards d’euros qu'il doit à ses créanciers.

L’économie grecque montre, pourtant, des signes encourageants pour la première fois depuis 2008. L’année dernière, elle a même connu une croissance légèrement positive de 0,3%. « Les chiffres d’Eurostat montrent que la Grèce a rempli ses objectifs », a souligné l’eurodéputé Dimitrios Papadimoulis (GUE/NGL, gauche radicale) défendant l’action du gouvernement de son pays. « Nous avons un excédent primaire quatre fois plus élevé que celui convenu, et en 2016, malgré les prévisions du FMI, la Grèce a enregistré une croissance positive. »

Les négociations d’un nouveau plan d’aide entre la Grèce et ses créanciers sont toujours au point mort. À cinq jours d’une réunion des ministres des Finances de la zone euro (Eurogroupe), le Parlement européen se saisit du sujet afin de peser sur les décisions à venir.

 

Pierre Moscovici, le commissaire européen aux Affaires économiques, est attendu à Athènes ce mercredi 15 février. L'objectif de son voyage est de débloquer les discussions sur un nouveau plan d'aide économique pour la Grèce. Depuis 2010, aucune banque privée ne veut plus prêter au pays dont la situation budgétaire est catastrophique. En 2014, sa dette publique a atteint 174,5% du PIB, soit 321,7 milliards d’euros. Aujourd’hui le poids des intérêts de la dette sur le budget grec est tel que le Fonds monétaire international (FMI) propose d’en effacer une partie pour relancer l'économie nationale. Une possibilité fermement rejetée par l’Eurogroupe (réunion des ministres des Finances de la zone euro) et particulièrement par l’Allemagne, principale puissance économique de l’Union européenne.

 

LE PARLEMENT CONSCIENT DES EFFORTS GRECS

 

Mardi 14 février, le Parlement européen s’est emparé du sujet, en organisant un débat en séance plénière. La grande majorité des eurodéputés a réclamé un allègement des ajustements économiques, qui forcent la Grèce à de nombreux sacrifices. 

Un deuxième plan d’aide en suspens 

D'ici le mois de juillet, la Grèce doit rembourser 7 milliards d'euros à ses créanciers, essentiellement la Banque centrale européenne (BCE) et le Mécanisme européen de stabilité (MES). Pour faire face à cette obligation et éviter le défaut, le gouvernement grec a besoin d'une nouvelle restructuration de sa dette. Or, au sein de la Troïka (Commission européenne, Banque centrale européenne et FMI) et de l'Eurogroupe, certains veulent conditionner un nouveau prêt à la Grèce à l'adoption de nouvelles réformes structurelles, notamment en matière budgétaire et de marché du travail. Mais Alexis Tsípras n'est pas disposé à céder aux exigences de ses créanciers institutionnel. Le Premier ministre grec a déjà affirmé qu’il refuserait d'imposer de nouvelles mesures d’austérité à son peuple.

Pages