Choc et effroi. C’est la stratégie choisie par la préfecture de police pour endiguer les blocages et mouvements non déclarés pendant cette journée de mobilisation. Blindés et surveillance aérienne attendent les manifestants au tournant.
Ce 18 septembre à Strasbourg, le dispositif policier était important. © Maud Karst
Place d'Haguenau, dès l’aube. Les forces de l’ordre traquent un simulacre de mobilisation. « On était 10 personnes sur le parking et ils nous ont couru après avant même qu’on fasse quoi que ce soit », relate Thorstein, militant sous pseudonyme. « En 35 ans de militantisme, j’ai rarement vu ça », déclare, atterré, Alain, syndicaliste engagé à la CGT. Sur ce nœud de circulation, il y a un fourgon de police par manifestant.
Le pari du Centaure
Deux blindés de nouvelle génération Centaures ont également été aperçus dans la matinée. Construits en Alsace par la société d’armement Soframe, ils avaient été commandés en 2020 par le ministère de l'Intérieur pour mettre à jour le parc automobile blindé de la gendarmerie. Cinq ans plus tard, sur les 90 exemplaires fraîchement perçus, ce sont aujourd’hui 80 qui sont présents dans les rues françaises.
Ces géants d'acier sont conçus pour résister à toute sorte de projectiles comme des cocktails Molotov. Équipé d’un lance-grenades lacrymogène pouvant tirer près de 60 munitions avant de devoir être rechargé. Un tel déploiement de force de l’ordre n’a plus été vu depuis le mouvement des gilets jaunes en 2018.
Omnivoyant
Chargées au sol, les forces de l’ordre strasbourgeoises n’ont pas manqué d'être présentes dans les airs. Devenu une habitude lors des rassemblements à travers la France, un arrêté préfectoral est paru hier afin d'autoriser « la captation d'images par aéronef ». Ce sont deux drones qui quadrillent l’ensemble de la ville de Strasbourg. Cette technologie, utilisée depuis le milieu des années 2010, a fait l’objet d'une bataille juridique pour encadrer son usage et interdire le stockage des données récoltées et la reconnaissance faciale. En cinq ans, cette flotte d’objets volants a triplé. Elle comptabilise 965 unités pour la gendarmerie et 650 pour la police nationale, selon les chiffres communiqués par les autorités à l'AFP.
Deux blindés de nouvelle génération Centaures ont été aperçus près de la Place d'Haguenau. © Maud Karst
Casser le mouvement dans l’œuf
Un attirail piloté par près de 80 000 policiers et gendarmes à travers la France — à Strasbourg, l'effectif des forces de l’ordre ne nous a pas été communiqué par la Préfecture — comme l’a requis, aux préfets, le ministre de l'Intérieur démissionnaire, Bruno Retailleau. L'ex-locataire de Beauvau a sommé ses effectifs de faire « preuve d’une grande vigilance sur tous les sites sensibles durant la nuit précédente pour éviter les sabotages, les dégradations et les éventuels blocages ».
« On est choqués de ce qui s’est passé la semaine dernière »
Alexis, jeune militant, en a fait les frais ce matin alors qu’il tentait de bloquer le lycée Kléber avec ses camarades, « ils étaient déjà sur place quand on est arrivés ». Une présence presque sans faille qui a paralysé les élans de mobilisation. Certains jeunes sont encore choqués des interpellations de la semaine dernière. « Les moins politisés ont eu peur. Ça peut se comprendre quand on voit ses camarades se faire plaquer aux sol et emmener en garde à vue », déplore Alexis. Pour rappel, au moins deux interpellations sur les 18 qui ont eu lieu le 10 septembre concernaient des lycéens mineurs.
Mahault de Fontainieu et William Jean
Edité par Axel Guillou